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Affaire Nathalie Koah: Samuel Eto’o bipolaire?

Dans son ouvrage intitulé Revenge porn, l'ex compagne de Samuel Eto'o raconte sa relation avec le footballeur, en mettant l'accent…

Dans son ouvrage intitulé Revenge porn, l’ex compagne de Samuel Eto’o raconte sa relation avec le footballeur, en mettant l’accent sur son côté obscur. Interview

« Moi, ce que j’aimerais, c’est de savoir qu’après une journée difficile, tu m’attendes dans une chambre avec une autre fille. Que lorsque j’arrive, vous vous touchiez et qu’on fasse l’amour à trois. Si toi et moi sommes séparés quelques jours et qu’avant un match, je décide de passer du temps avec une autre fille à l’hôtel, ce ne soit pas grave, au contraire. J’aurais plaisir à prendre une photo de nous deux, à te les envoyer, à te raconter ce qu’on a fait. (.) Notre relation sera spéciale, unique. Plus rien ne pourra nous séparer ».

Ces propos sont tirés du livre Revenge Porn, écrit par Nathalie Koah, ancienne compagne de Samuel Eto’o. Oui, c’est une énième histoire de fesses, rien de très original dans le football. Sauf que tout a mal tourné. L’histoire déchaîne aujourd’hui les passions. Après la rupture, Nathalie Koah raconte avoir vécu un calvaire, été menacée et humiliée après la divulgation de photos d’elle nue sur Internet. Aujourd’hui, la jeune femme souhaite que justice soit faite, à un détail près : le footballeur a porté plainte pour atteinte à la vie privée, interdisant du même coup la sortie du livre.

Bonjour Nathalie. Pourquoi avez-vous décidé d’écrire ce livre ?
Pour dire la vérité. J’en avais marre. J’étais fatiguée de voir les médias raconter ma vie à leur guise, faire ma biographie, laisser les gens dire tout et n’importe quoi. Des histoires étaient racontées, montées. Je voulais dire ma vérité. Raconter comment l’histoire s’est déroulée, expliquer la manière dont je l’ai vécue. Dire qui je suis tout simplement.

Pourquoi l’avoir intitulé Revenge Porn ?
Parce que j’ai vécu « un revenge porn ». C’est un phénomène de plus en plus courant qui veut que dès qu’un couple se sépare, l’un d’eux balance des photos de l’autre nu(e) sur Internet. Il y a pas mal de victimes de « revenge porn » en ce moment. Ce sujet est d’actualité. Je l’ai vécu il y a un an et demi.

C’est quel type d’homme Samuel Eto’o ?
(Elle réfléchit)
Il peut être à la fois très gentil, disponible, intense, mais il peut être aussi très sombre, imperturbable. C’est quelqu’un d’assez énigmatique. Il est difficile à cerner. Je ne dirais pas qu’il est bipolaire, mais il est entre les deux en fait. En tout cas, c’est quelqu’un qui essaie toujours d’obtenir ce qu’il veut.

Il vous aurait dit : « Tu sais, j’aime bien regarder ma copine faire l’amour avec un autre homme » . Est-ce qu’on peut considérer que cela symbolise son envie de tout contrôler ?
Oui. Il aime tout contrôler. Autant, il va dire qu’il aime voir sa copine faire l’amour avec un autre homme, autant à côté, il va s’indigner de ce qu’il s’est passé entre Fally (chanteur congolais) et moi. Du seul fait qu’il n’ait pas pu avoir le contrôle.

D’où ça vient, cette envie de contrôle. De sa superpuissance ?
Je ne sais pas si on peut parler d’une « superpuissance » … En même temps, il est assez fragile et pas aussi sûr de lui qu’il peut le laisser croire. J’ai eu l’occasion de le cerner. J’ai vu son côté très profond et fragile et en même temps j’ai côtoyé son côté obsessionnel, qui veut tout contrôler. Peut-être aussi que je n’ai pas su imposer de limites ou de barrières à un certain niveau. Tout ça a fait qu’il s’est senti peut-être à l’aise.

C’est quoi le monde de Samuel Eto’o ?
Tout ce qu’il y a en dehors du foot. Sa cour, son jardin secret, ses fantasmes. Il aime les plans à trois, voir une autre personne toucher sa copine. Il ne pouvait pas s’ouvrir à tout le monde. Peut-être par peur d’être incompris, d’être jugé ou exposé. J’étais jeune, il a peut-être senti que j’étais malléable. Peut-être que me dire cette phrase a formaté mon cerveau, m’a rendue entièrement disponible pour lui. Après, si je voulais vraiment le posséder, ne faire qu’un avec lui, je devais m’approprier ses fantasmes.

Est-ce que le fait d’entrer dans son monde n’a pas conduit aux problèmes ?
Ça a plutôt accentué son sentiment de possession. Il pensait qu’il me possédait, que j’étais sa chose, que j’étais à lui. Il disait que j’étais la seule à comprendre son monde, donc je lui appartenais. À force de franchir certaines limites, on s’est retrouvés très connectés. Donc à chaque fois que j’essayais de partir de là, je n’y arrivais pas et lui pareil.

Alors qu’il est en colère contre vous, il vous gifle et déclare dans la foulée : « Si tu ouvres encore la bouche, je te jette du sixième ». Qu’est-ce qui a conduit à cela ?
C’était en décembre 2010, on était à l’hôtel, il avait l’habitude de faire venir ses amis de partout. J’étais dans une chambre, lui a décidé de prendre une autre suite. Je l’ai alors croisé avec une journaliste. J’avais déjà eu vent de leur petite histoire, mais ça m’a fait de la peine qu’il me fasse venir pour ce résultat. J’ai exprimé à ce moment-là mon mécontentement, mon désir de rentrer au Cameroun. On ne se voyait déjà pas beaucoup, s’il fallait en plus que dans nos rares moments passés ensemble, il ramène d’autres filles… Je lui ai envoyé des messages de reproches et Samuel l’a mal pris, on s’est querellés. Mais un de ses amis m’a convaincue de revenir à l’hôtel, j’étais mal. Samuel est entré dans ma chambre et il s’est mis dans une colère noire.

Il avait l’art de renverser la situation. Chaque fois que je le coinçais dans une situation et que je lui faisais part de mon mécontentement, il la retournait à son avantage, il me faisait passer pour une idiote. Après, je n’explique pas la gifle. Tout ce que je sais, c’est qu’elle est arrivée.

Samuel pense que des complots se trament contre lui, notamment au sujet de votre flirt avec Fally Ipupa, qui aurait été selon lui commandité par Rigobert Song.
Samuel a été mis au courant de mon flirt avec Fally. Il s’est mis en colère, dans une rage folle; pour lui, il fallait que je répare l’affront qui lui avait été fait. Il estimait que Rigobert Song était derrière tout ça. Pour lui, tous ses anciens amis avaient formé un clan contre lui. Le fait que je sois amie avec Fally était pour lui une trahison. Le seul moyen que j’avais pour me rattraper, était de lui montrer que je lui étais loyale en lui apportant des photos de Fally nu, quitte à coucher avec lui si besoin.

Pour lui, ce serait une marque d’amour ?
Une marque de dévouement. Je lui ai proposé de couper les ponts avec Fally, mais ce n’était pas suffisant. Il voulait des photos. Je ne sais pas ce qu’il voulait en faire, peut-être la même chose que ce qu’il a fait avec les miennes. En tout cas, à ce moment-là je me suis dit qu’il était fou. Ça n’avait pas de sens. J’ai vraiment pris conscience que j’avais bien fait de me séparer de lui. J’étais dans un pétrin terrible, il fallait que je m’en sorte par tous les moyens. C’est étrange, car lorsque tu lui es entièrement dévoué, il peut te mépriser, et quand ce n’est pas le cas, tu es son ennemi. En fait, c’est comme s’il y avait toujours une bataille.

En fin de compte, vous prenez seulement un selfie allongée à côté de Fally.
Au début, je n’avais pas de moyens de me défendre. Je ne voulais même pas en parler. On ne m’aurait pas cru. Je me suis dit qu’il se serait peut-être calmé au bout de quelques semaines. Un mois et demi après ce n’était pas le cas. Je me suis dit que j’allais lui faire croire que j’allais faire ces photos, quitte à lui dire au final que je n’avais pas pu. Pour qu’il sache au moins que j’avais essayé de remplir ma mission.

Après plus de six ans de relation intime, le couple se sépare dans un climat de tension.
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Finalement, vous refusez de lui donner plus que le selfie. Il continue de vous menacer et vous décidez de l’enregistrer à son insu.
Entre novembre et décembre, j’essaie de remplir la mission, mais je n’y arrive pas, Samuel menace. Je craque, j’appelle ma mère, lui raconte que je me suis déjà retrouvée deux fois devant le procureur pour des histoires qui n’ont pas de sens. L’avocat me dit : « Tu sais que face à Samuel Eto’o, ta parole ne pèse pas. Le seul moyen de te défendre est d’amasser le maximum de preuves, il faut que tu aies des enregistrements vocaux » On s’est donc remis ensemble. J’étais en mode « mission ». J’ai bien compris qu’il ne changerait pas et qu’il mettrait un jour ses menaces à exécution : « Je vais te faire tuer, je vais te faire violer ».

Mais aujourd’hui encore, tout le monde ne me croit pas. Mais c’est la réaction des femmes qui m’a le plus blessée. On m’a prise pour une menteuse. On a dit que je voulais me faire de l’argent, que je voulais détruire sa carrière. On m’a traitée de « pute » . Au final, moi, j’ai dit la vérité, bien étalée sur des enregistrements sonores, remis à la justice au point que des procédures soient ouvertes contre lui au Cameroun.

Samuel Eto’o est tout puissant à ce point ?
En juin 2014, il l’était oui. Je me suis retrouvée en cellule pour rien du tout. On va partir du principe qu’il ait rédigé une plainte exigeant de lui restituer ses cadeaux, ça ne vaut pas trois jours en cellule. J’aurais dû être présumée innocente. Et puis, ça ne vaut pas une interdiction de sortie de territoire ni une confiscation de mon véhicule. Il a joué de ses relations et de sa puissance. Est-ce qu’il est toujours puissant aujourd’hui ? Je pense qu’il a toujours ses réseaux, mais il sera difficile pour lui de refaire la même chose, sauf si on finit par lui donner raison dans ce combat.

À la fin, vous déclarez pourtant ne pas lui en vouloir.
Je lui en ai voulu, mais je refuse de vivre avec la haine et la colère. C’est lourd. Bien sûr, j’étais en colère contre lui lorsque les photos sont sorties. Je l’ai haï, mais après, j’ai appris à vivre avec, à réorienter mon combat. Les photos sont sorties, je ne pouvais rien y faire. De toute façon, s’il doit payer, ce sera par le biais des procédures judiciaires. Mais moi, je n’ai pas à vivre avec ce fardeau. Il est difficile d’être en colère en permanence. Car tu es esclave de la personne qui t’a mis dans cette situation. Aujourd’hui, je refuse d’être esclave de lui plus longtemps. En tout cas, j’avais besoin de lui pardonner. Mais pardonner, c’est reconnaître que la personne a fait quelque chose de grave.

Pensez-vous qu’il le regrette ?
Honnêtement, non. Il compte sur ses fans pour le blanchir, mais aussi sur son aura et sur son petit cocon familial pour décrédibiliser ce que je dis. Je pense qu’il a les moyens de sa politique. S’il le regrettait, il aurait stoppé les procédures et il se serait excusé.

Vous avez le même avocat que Nafissatou Diallo. Faut-il voir un parallèle entre vos deux histoires ?
J’ai vu la manière dont les hommes puissants agissaient sur les personnes lambda. Vu qu’il a été l’avocat de la personne faible, celle qu’on a traitée de menteuse, je me suis sentie dans la même situation même si ce n’était pas les mêmes faits. Le combat reste celui d’une personne lambda qui n’a pas vraiment d’identité dans la société contre une personne superpuissante avec tous ses moyens, tout son charisme. Je l’ai pris comme l’avocat des « sans-voix ».

Avec ce livre, vous espérez changer les mentalités ?
Quand on est victime, il n’est pas question qu’on se taise, au risque de se prendre les foudres des conservateurs ou des moralisateurs. Il faut dénoncer. C’est en dénonçant que ça n’arrive plus. D’un autre côté, il faut sensibiliser ceux qui nous voient avec des yeux plein d’envie. Celles qui veulent être avec un footballeur et tout… J’ai envie de leur dire : « Voilà mon histoire ». Même s’ils ne sont pas tous comme ça. Si tu penses pouvoir le faire, sans renier tes valeurs ou ta morale, fais-le, mais voilà mon histoire. Je n’ai pas le droit de te faire une fausse publicité de ce monde-là.


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