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Boeing et Airbus: opposés et juxtaposés, une leçon pour l’opposition africaine

Par Vitalis Essala Boeing et Airbus sont les deux seuls géants qui dominent le monde de l'aviation. Si vous avez…

Par Vitalis Essala

Boeing et Airbus sont les deux seuls géants qui dominent le monde de l’aviation. Si vous avez déjà pris l’avion pour aller dans un pays moderne, cinq fois sur dix, vous avez pris un avion fabriqué par Boeing et cinq fois sur dix vous avez pris un avion fabriqué par Airbus. En d’autres termes, les chances que vous ayez pris l’une ou l’autre des deux compagnies sont à 50/50.

S’il s’agissait du monde politique, les sondages montreraient que ces deux candidats principaux ont des chances égales. Mais dans le monde des affaires, on ne parle pas d’opposition. Si c’était le cas, ces deux compagnies américaine et française seraient deux opposants. Mais puisqu’elles sont dans les affaires, elles jouissent du principe de juxtaposition ou de complémentarité, car, elles se tiennent côte-à-côte pour faire avancer l’aviation.

N’allez donc pas vite conclure que Boeing et Airbus sont en conglomérat. Non. Ce sont deux compagnies qui appartiennent à deux administrations différentes et bien séparées. Leur complémentarité se situe au niveau des innovations. Quand l’une développe un nouvel appareil qui fait bouger le monde de l’aviation, l’autre copie ce modèle et y ajoute une technologie légèrement améliorée. Et c’est plutôt le voyageur que vous êtes qui s’en sort plus vainqueur dans toute cette bataille de la technologie ultramoderne. Pour étayer cette affirmation, voici un exemple.

A la fin des années 1980, Airbus introduisait sur le marché son modèle A-320. Elle introduisait ainsi un système qui allait révolutionner l’industrie. D’un, l’appareil était moins lourd. De deux, il consommait moins de carburant. De trois, et de surcroît, avec cet appareil le pilote avait ainsi moins de boulot dans la cabine de pilotage, parce que l’A-320 était équipé d’un pilote automatique. Depuis lors cette technologie a évolué sans cesse. Toutes les autres générations des appareils d’Airbus ont vu une amélioration nette de cette technologie-miracle.

Huit ans plus tard, Boeing l’imposant aviateur américain, mettait sur le marché une copie revue et corrigée de la technologie comprise dans l’appareil français de l’A-320. Le B-777 embrassait le ciel dans un envol éblouissant pour la première fois le 12 juin 1994. C’était le tout premier avion entièrement fabriqué par mode conception assistée par ordinateur. Le confort est magnétique ! La capacité du nombre de passagers est revue à la hausse. La qualité d’atterrissage est aussi douce qu’un nuage d’Afrique. Par-dessus tout, le pilotage par ordinateur passionne les pilotes.

A chaque génération, Boeing ajoute un degré de plus. Au comble, pendant qu’Airbus fait battre le c ur des agences de voyage pour des bénéfices que celles-ci réalisent en termes d’économies sur le carburant, Boeing séduit le c ur des pilotes pour la facilité de pilotage de ses avions. En cas de conflits et de vol mouvementé, Airbus a construit ses avions pour que l’autopilote ait le dernier mot. Boeing d’autre part donne le dernier mot au pilote dans les mêmes circonstances, permettant ainsi à l’homme de prendre les commandes de l’avion en cas de turbulences. Voici donc deux modèles engagés dans une guerre sainte basée sur l’innovation. L’opposition africaine ne ferait-elle pas mieux de copier d’eux ?

Au lieu de condamner pour condamner ne ferait-elle pas mieux de proposer ? Au lieu d’appeler aux émeutes ne ferait-elle pas mieux d’apaiser ? Certes, vous direz que le cas de Boeing et Airbus est un contrexemple. Peut-être. Peut-être que ces deux compagnies sont des entités autonomes et libres de toute pression. Mais au moins elles ne décident pas d’abandonner la scène parce que l’autre a sorti son grand jeu.

Le c ur était brisé d’apprendre que le candidat de l’opposition au deuxième tour de la présidentielle malienne du 20 mars 2016 se retirait de la course. Il est vrai que Hama Amadou était évacué en France pour soins hospitaliers, mais l’opposition avait déjà déclaré qu’elle ne reconnaitrait pas les résultats de ce deuxième tour avant même que leur candidat ne se retirât. Pourtant, cette opposition avait eu en tout 52 pourcent des voix au premier tour. Le président sortant, Mohamadou Issoufou, bien que favori, avait eu 48 pourcent au premier tour. Donc mathématiquement parlant, l’opposition était favorite si elle voulait gagner. Elle avait juste besoin de se mettre ensemble derrière un candidat unique. Mais bien entendu, les nigériens ont meilleure maîtrise de leurs propres réalités. Toutefois, la politique de la chaise vide a toujours tort.

Au Cameroun le principal parti d’opposition, le SDF de Ni John Fru Ndi refuse catégoriquement d’entrer au gouvernement de Biya. Et en même temps, les décennies passent et cette opposition s’effrite d’elle-même. Elle s’autodétruit comme par phénomène d’apoptose. A ce jour, les jeunes croient difficilement à l’opposition au Cameroun. Il est vrai que le SDF a des arguments solides de refuser toute main tendue de monsieur Biya. Mais puisque ce parti n’a pas d’autonomie politique comme Boeing et Airbus, pourquoi ne pas entrer au gouvernement et produire la copie revue et corrigée de la gestion des ministres de Biya ?

En guinée Equatoriale, le Front de l’opposition démocratique (FOD) appelait au boycott de la présidentielle du 25 avril 2016. La raison était la plus fréquente : les jeux étaient faits avant l’échéance pour que le président sortant remporte. Certes, par décret, le président Teodoro Obiang Nguema avait avancé ce scrutin qui était normalement prévu pour novembre. Mais dans des pays présidentialistes, où le président de la République a le dernier mot sur tout, il n’est pas avantageux de chercher recours soit à la justice soit ailleurs ! La meilleure chose à faire ne serait-elle pas de s’organiser en un bloc soudé pour faire face à l’échéance et espérer que les « dieux » vous viennent en aide ? Bien entendu le patriarche Obiang vient encore de s’assurer un autre septennat avec 93,7 pourcent des voix. Le principal parti de l’opposition n’était pas de la partie. Ceux des opposants qui se sont aventurés se sont fait avaler par la panthère du parti au pouvoir. Au sport toute équipe qui déclare son forfait perd le match. La politique n’est pas différente. Les absents ont tort.

Dans la politique africaine, l’opposition n’a pas l’autonomie comme Boeing et Airbus. Elle n’a pas les moyens du parti au pouvoir. Elle ne peut donc pas produire très facilement la copie revue et corrigée de la gouvernance du parti au pouvoir. Cette opposition ne peut que suivre le cheminement des deux compagnies de fabrication d’avions que sont Airbus et Boeing. Pour le cas de l’appareil B-777, Boeing s’est inspirée de l’A-320 d’Airbus. Pour cela Boeing a pris un certain nombre d’actions.

L’opposition africaine peut s’en inspirer.Voici ces actions.
(1) Se regrouper autour d’un même but. (2) Consulter huit compagnies de transport aérien. L’opposition africaine peut consulter plus facilement et créer un impact si elle est regroupée autour d’un même but. (3) Définir un plan de travail détaillé et réparti dans le temps. L’opposition africaine peut en faire autant au lieu d’attendre l’année électorale pour se réveiller. (4) Faire plus de propositions constructives au gouvernement en place et moins de critiques délirantes. (5) Aller un peu plus loin que Boeing : accepter d’entrer au gouvernement. Si tout ce qui suit est difficile à suivre, voici une formule plus compacte de tout ce qui précède. Opposition africaine, organise-toi davantage !


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