Rasop-Africa: l’implémentation du programme évaluée à Yaoundé

Du 13 au 15 mars 2017, l’Association africaine de l’Eau a passé au scanner la première année du programme centré sur la gestion des boues de vidange à Kampala, Lusaka, Yamoussoukro, Yaoundé et Bamako

La ville de Yaoundé a besoin de 7,5 milliards de Francs CFA pour pouvoir assurer la gestion des boues de vidange, déchets issus de la défécation, sur son territoire. Yamoussoukro, capitale politique de la Côte d’Ivoire, en la matière, veut 09 milliards de Francs CFA. Pour la même cause, Bamako, la capitale malienne, nécessite 13,5 milliards de Francs CFA. Quant à Kampala (Ouganda) et Lusaka (Zambie), ces métropoles anglophones ont besoin chacune de 10 millions de dollars US, soit un peu plus de 6,1 milliards de Francs CFA. Tous ces montants sont contenus dans le Plan d’amélioration des performances en matière de gestion des boues de vidange. Ce document a été conçu pour chacune de ces villes dans le cadre des activités du Programme d’Assainissement de grande envergure des pays de l’Afrique sub-saharienne et du Renforcement des partenariats des Opérateurs d’Assainissement en Afrique (RASOP-Africa). Le programme a été élaboré par l’Association africaine de l’Eau, une organisation non gouvernementale basée à Abidjan. Son implémentation s’étale sur tois années (2016-2018) et est financé par la fondation Bill & Melinda Gates, des noms du président-directeur général de la firme américaine Microsoft et de  son épouse.

Du 13 au 15 mars 2017, dans un hôtel de la ville de Yaoundé, l’Association africaine de l’Eau (AAE) a organisé un atelier pour évaluer les activités menées en 2016, première année d’implémentation du programme Rasop-Africa. En ouverture des échanges, le Dr Mbaye Mbéguéré, coordinateur dudit programme au sein l’AAE, a indiqué que 93 % des activités prévues pour cette première année ont été exécutés de façon effective. «L’objectif était de débroussailler le terrain. Il fallait saisir le contexte en place dans ces villes. Cette évaluation initiale nous a permis de comprendre un peu les problèmes dans chacune de ces cités. Nous avons désormais connaissance des lacunes qu’il y a dans la gestion des boues de vidange dans ces villes-capitales. Les consultants ont pu élaborer ce qu’on appelle les plans d’amélioration des performances (PAP). Un PAP est un ensemble de propositions de projets. S’ils sont appliqués, la face de l’assainissement va changer dans ces villes», a-t-il indiqué.

De façon détaillée, à Yaoundé, ville de 3,1 millions d’habitants pour 620 000 ménages, 93,2 % des populations disposent des latrines. 21 % desdites latrines sont construites de façon archaique, 34,6 % sont à fosse septique et il n’y a que 11 % de latrines modernes. Chaque habitant produit en moyenne 0,71 kilogramme de boue par jour. La collecte de cette matière fécale s’opère à un pourcentage compris entre 40 et 50 %. Il existe 03 stations d’épuration réhabilitées, notamment à Messa, à la Cité Verte et à Byem Assi.  Mais il n’y a aucune station de traitement des boues de vidange. Les entreprises de vidange déposent leurs cargaisaons dans une broussaille proche d’un marécage à Nomayos, dans la commune de Mbankomo. En termes de nombre, il y a 12 entreprises dans ce secteur d’activités dans la capitale camerounaise pour un total de 18 camions, tous âgés de plus de 20 ans. Par ailleurs, c’est la commune de Yaoundé 1 qui a le plus accès à la vidange. D’après le Dr Emmanuel Ngnikam, patron d’ERA-Cameroun, l’organisation retenue pour le consulting à Yaoundé, il est urgent d’améliorer les toilettes dans les ménages vulnérables, de construire 400 blocs de latrines aux normes dans les lieux publics et une station de traitement des boues de vidange. Pour cette infrasctructure, la communauté urbaine de Yaoundé a déjà identifié un site.

Bamako, situation alarmante

Le Dr Bécaye Sidy Diop, consultant du Rasop-Africa pour la ville de Bamako, a exposé le travail abattu dans la capitale malienne.  Pour dresser l’état des lieux, il a travaillé avec l’Agence de Gestion des Stations d’Epuration du Mali, laquelle a été créée en 2007. L’on retient que dans cette cité de 02 millions d’habitants et qui compte 06 communes, l’assainissement est à la charge des collectivités locales. Cependant, celles-ci n’ont pas les moyens pour assumer cette tâche. 33 % des toilettes ne répondent pas aux normes dans cette localité. Alors que 1645 m3 de boue de vidange sont produites chaque jour, il n’existe aucune station de traitement. L’activité de vidangeur y est menée par 03 entreprises privées et d’autres organisations informelles. Leur parc automobile est vieux et elles n’ont pas la capacité d’accéder aux crédits pour financer leur activité. Le lieu de dépotage est sauvage et non aménagé.  Bref, le consultant parle d’une situation catastrophique.

Pour remédier à la situation, le plan d’amélioration des performances prévoit la construction de 20 milles toilettes aux normes à Bamako. La ville a tout de même en projet la construction de 02 stations de traitement des boues de vidange d’une capacité de 600 m3 chacune. Les financements proviendront de la Banque africaine de Développement.

Dans la ville de Yamoussoukro, qui ne compte que 300 mille habitants, la situation est relativement meilleure qu’ailleurs. Jean Birane Gning, consultant du programme Rasop-Africa pour cette localité, a indiqué qu’en moyenne, 233 m3 de boue de vidange y ont été produits au quotidien en 2015. 04 entreprises opèrent dans la vidange, pour un parc automobile comportant 06 camions.  Selon les estimations du consultant, il fallait 15 camions depuis 2015 pour couvrir les besoins. Dans toute la ville, il existe 17 blocs de latrines publiques. En outre, aucune infrastructure de traitement de boue de vidange n’est présente dans la capitale politique de la Côte d’Ivoire. Il y a plutôt un dépôt sauvage qui se situe à 1,2 kilomètre de la ville. L’urgence est donc la construction des stations de traitement des boues de vidange et l’étoffement du parc automobile des entreprises exerçant l’activité de vidange.

A Kampala, ville qui comporte 03 millions d’habitants répartis sur 05 communes, 90 % de la population ont des latrines inadaptées et 70 % des toilettes sont inaccessibles à la vidange. Plus grave, 1% de la population défèque en plein air. L’activité de vidange qui y existe est payée par les clients. Le Dr Charles Niwagaba, qui a travaillé comme expert pour le compte du programme Rasop-Africa dans la capitale de l’Ouganda, milite pour la création dans ce pays d’une entreprise industrielle qui va fabriquer des toilettes prêtes à l’usage. A Lusaka, l’autre ville anglophone de ce projet,  il n’y a pas encore de codification de l’activité de vidangeur et les toilettes dans les domiciles privées ne sont pas aux normes. James Tembo, consultant de Rasop-Africa pour la capitale de la Zambie, note cependant que des fonds sont disponibles pour financer les start-ups qui voudront bien exercer une activité dans le secteur de la vidange.

Sénégal et Ethekwini, des exemples à suivre

Dans le programme RASOP-Africa, l’Organisation nationale d’Assainissement du Sénégal (ONAS) a joué le rôle de mentor pour les villes francophones. La municipalité d’Ethekwini (englobant Durban, entre autres) en Afrique du Sud a mentoré les deux villes anglophones. C’est que, en matière de gestion des boues de vidange, les deux composantes ont pu développer des systèmes efficaces de gestion et de valorisation des boues de vidange qui méritent d’être partagés. Au Sénégal, il existe un fonds de garantie qui permet aux entreprises de vidange d’avoir facilement accès au crédit. Ce pays compte 12 stations de traitement de boue de vidange, dont 03 pour la seule ville de Dakar. La valorisation de ces déchets humains débouche sur une production d’électricité. A Ethekwini, la municipalité a réussi à rendre gratuite la vidange des fosses septiques. Au bout du processus de valorisation, il y a la production de l’électricité et des fertilisants pour les agriculteurs.

Après les travaux en salle, tous les participants se sont rendus à Nomayos, sur le site de dépotage sauvage des boues de vidange collectées à Yaoundé. Ils ont assisté à une opération de vidange de deux camions appartenant à la société Ange Express Hygene et Services. D’après son directeur, Martin Fotso, par ailleurs président de l’association des vidangeurs de Yaoundé, il n’y a aucun traitement administré à cette matière fécale déversée dans la nature. Ibra Sow, président de l’Association des Acteurs de l’Assainissement du Sénégal, s’est dit surpris du retard du Cameroun dans ce domaine. «La distance est longue, la piste qui mène au site de dépotage est impraticable, il n’y a aucune infrastructure disponible pour accueillir ces boues-là. On déverse directement dans la nature. Les boues ne sont pas traitées. C’est la catastrophe. C’est ce que nous vivions à Dakar il y a 20 ans. Je pense que le RASOP va pouvoir faire quelque chose», a-t-il affirmé.

Après ces jours d’évaluation, le Dr Siméon Kenfack, directeur des programmes à l’Association africaine de l’Eau, a exprimé sa satisfaction. «À tous les niveaux, nous constatons qu’il y a une prise de conscience de la part des parties prenantes dans les localités concernées par ce programme, qu’il s’agisse des autorités publiques, des vidangeurs ou des populations bénéficiaires. Il y a des villes où les gens ne se rendaient pas compte de l’urgence à organiser la gestion des boues de vidange. Mais ils comprennent aujourd’hui qu’il s’agit d’un service urbain de base», a-t-il indiqué. Et maintenant que le diagnostic est fait et que les projets sont identifiés, la deuxième année d’implémentation du Programme RASOP-Africa va servir à «travailler à organiser la table ronde des bailleurs. Il sera question de mobiliser l’argent qui servira à financer ces différents projets», a indiqué le Dr Mbaye Mbéguéré, le coordinateur du programme.

La représentante de la fondation Bill & Melinda Gates, Erin McCusker, a pris part aux travaux de Yaoundé. Elle a affirmé que cette organisation philanthropique souhaite oeuvrer pour que les gens vivent en santé à travers le monde. D’où le financement du programme Rasop-Africa. Au nom du conseil des Ministres africains chargés de l’Eau (AMCOW), Kitch Bawa a également promis des appuis à ce projet. Quant à Jean Michel Ossete, représentant de la Facilité africaine de l’Eau, une composante de la Banque africaine de Développement, il a insisté sur l’urgence de mettre en place dans les villes concernées par le programme, un cadre institutionnel suffisamment clair et pertinent susceptible de convaincre les bailleurs de fonds.

L’atelier d’évaluation des activités de la deuxième année du programme Razop-Africa aura lieu au premier trimestre de l’année 2018 à Dakar.

Eau potable: la CDE enregistre 15000 branchements sur les sept dernières années

L’information a été communiquée jeudi à Douala, lors des deuxièmes assises du Conseil scientifique et technique de l’Association africaine de l’eau

Le concessionnaire du secteur d’eau, la Camerounaise des eaux (CDE), filiale du groupe marocain l’Office national d’eau potable (ONEP), a réalisé 15000 branchements au Cameroun au cours de sept dernières années, a-t-on appris jeudi, 30 juillet 2015, à Douala, au terme des deuxièmes assises du Conseil scientifique et technique (CST) de l’Association africaine de l’eau (AAE).

Une amélioration de l’offre en eau potable qui a notamment bénéficié aux grands centres urbains, en l’occurrence, les villes de Douala et de Yaoundé avec près de 10000 nouveaux branchements.

Ces travaux ont nécessité un investissement d’environ 15 milliards de francs CFA et devront se poursuivre dans le cadre du projet d’extension de la desserte en eau potable, ont indiqué les responsables de cette entreprise.

Toutefois, précise-t-on à la CDE, l’objectif de couvrir 50 pour cent de la population camerounaise à l’horizon 2020 est loin d’être atteint puisque seulement 35 pour cent des Camerounais ont accès à l’eau potable.


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