«Mvetkora», l’album de Sally Nyolo et Djeli Moussa Diawara

Cet album marque la rencontre entre deux instruments de musique africaine : le mvet joué par la chanteuse camerounaise Sally Nyolo, et la kora pincée par le guinéen Djeli Moussa Diawara

Lorsqu’elle a invité Djeli Moussa Diawara et son instrument fétiche sur la scène parisienne du New Morning, en octobre 2014, où elle présentait son album Tiger Run qui venait de sortir, Sally Nyolo avait déjà certainement en tête une idée qu’elle voulait tester en live. Déjà, quelques années plus tôt, l’ex-Zap Mama devenue ambassadrice du mvet avait tenté sur scène un rapprochement Afrique-Asie avec un musicien vietnamien.

Elle qui avait mis en lumière le mendzang, déclinaison du balafon chez les Béti d’Afrique centrale, sur l’album «La Nuit à Fébé» en 2011, avait apprivoisé depuis longtemps ce cordophone ancestral qu’est le mvet, reconnaissable à ses calebasses alignées sur son manche.

Dans son pays natal, il reste associé à l’épopée du peuple fang mais Sally, arrivée en France quand elle avait 12 ans, a pris le pari – sinon le risque – de l’emmener sur un autre terrain. Le faire voyager. Lui trouver un compagnon de jeu inédit, emblématique d’une autre culture du continent africain : la kora, cette harpe aux notes cristallines que les griots du Mali, de Guinée, de Gambie ou du Sénégal affectionnent tant pour chanter les louanges et raconter l’histoire mythique de l’empire mandingue.

Djeli Moussa Diawara, issu d’une famille de balafonistes, s’y est converti depuis les années 70, suivant l’exemple de son frère Mory Kanté. Sa capacité et son enthousiasme à savoir dialoguer avec des artistes s’illustrant dans d’autres genres fait office de ligne conductrice de sa discographie : de sa participation en 1982 à Bringing It All Back Home (« premier disque de blues enregistré en Afrique », selon la pochette) de l’Américain Johnny Copeland au projet Flamenkora, en passant par Ocean Blues avec le joueur de ukulélé Bob Brozman et bien sûr, le Kora Jazz trio, dont il est le cofondateur. Bref, le complice idéal pour passer les frontières musicales. Il a aussi l’expérience nécessaire pour aplanir le chemin et lever les éventuels obstacles liés aux gammes sur lesquelles chacun évolue.

Quand les incantations du Guinéen se font entendre derrière le chant aux motifs répétitifs de Sally, sur le morceau d’ouverture «Indeguele», le mariage n’est plus seulement entre mvet et kora, mais aussi sur le plan vocal. Là encore, les deux protagonistes ont su trouver la formule pour que leur conversation soit complète. Au point même que c’est la Camerounaise, avec sa culture de la forêt d’Afrique centrale, qui vient conter en français sur «Kanbele Fila» l’histoire des Traoré et Diabaté, personnages clés de l’histoire du Mandé d’Afrique de l’Ouest.


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