La réflexion de Me Black Yondo après la libération de Lydienne Yen Eyoum

Me Black Yondo, Avocat au barreau du Cameroun

La manière par laquelle le Pouvoir gère la « Justice » expose le Cameroun à l’humiliation, à la risée du monde. Plaçant la Justice aux ordres, aucun dossier n’est jugé conformément au droit et même les pseudo-réformes proposées le sont en dépit du bon sens, en marge des intérêts généraux du pays et au mépris des conventions internationales que nos dirigeants ont librement signées.

Pour sauver l’honneur et la dignité du pays, avant toute chose, le Président Biya doit se séparer de tous ceux qui, de près ou de loin, l’assistent dans le traitement du dossier  »Justice ». Cela commence par le limogeage de messieurs Laurent Esso, Fouman Akame, Belinga M’eboutou, Amadou Ali, Akame M’foumou, Meva A M’eboutou, Issa Tchiroma pour ne citer que les plus en vue dont l’examen des dossiers présentés au chef de l’Etat vise plus les règlements de comptes que la solution en droit des problèmes qui leur sont soumis.

Je suis au Cameroun l’avocat principal de Me Lydienne Yen Eyoum. Cette avocate n’a commis au regard de la loi aucune infraction, mais ses détracteurs ont réalisé l’exploit de la faire condamner par nos cours et tribunaux à 25 années d’emprisonnement, à la confiscation de ses biens et autres peines complémentaires.

Aujourd’hui, pour empêcher aux hommes épris de justice de s’en émouvoir, ils créent à dessein des éléments de confusion qui, n’ayant rien à voir avec le dossier, poussent à la haine, mettent en avant l’amour-propre et éloignent de toute analyse logique du dossier et des questions de principes que pose le cas. Cela n’honore pas le Cameroun, un pays qui regorge de ressources, aussi bien humaines que naturelles et qui en font de ce fait une vitrine du monde. Ces collaborateurs du chef de l’Etat, loin d’être irremplaçables, passeront comme leurs prédécesseurs, mais le Cameroun, lui, ne passera pas.

A force de souffler le chaud et le froid, en condamnant implacablement pour ensuite élargir, ils se trouvent face à leurs propres contradictions qu’ils n’arrivent pas eux-mêmes à gérer. Comment s’étonner dès lors de cette vague de polémiques qui agitent et les médias et tout un chacun. Tout le monde y va de son commentaire. Rien à voir avec les préoccupations du pays. En parler facile, comment mettre en liberté un coupable de détournement de deniers publics à un moment où l’on place sur la sellette la lutte contre cette endémie : une chose et son contraire donc. En réalité, cela tient du fait qu’il y a malgré tout une conscience. L’ il était dans la tombe et regardait Caïn.

Il est en effet difficile de voir jeter en prison pour 25 années du chef de détournement de deniers publics un citoyen qui ne s’est pas rendu coupable d’un tel crime, tout simplement parce que l’on n’a ni le courage ni l’honnêteté intellectuelle de reconnaître qu’on s’est trompé dans l’examen du dossier. A force d’être obstiné, de n’avoir pas daigné prêter l’oreille et seulement écouter les explications apportées tout au long de la gestion de ce dossier, ils ont fini par se fourvoyer dans les manipulations et se soumettre aux ordres.

En voulant maintenant rattraper la situation, ils créent un autre problème que beaucoup dénoncent avec raison, une sorte de « 2 poids-2 mesures ». On aurait évité une telle querelle si le décret du Chef de l’Etat avait porté sur une « grâce amnistiante », ce qui en d’autres termes aurait signifié que Lydienne Yen Eyoum n’a pas commis les faits mis à sa charge.

Le président de la République aurait ainsi tout simplement redressé une erreur judiciaire. Ceci entre constitutionnellement dans le domaine de ses pouvoirs. Et nous serions restés dans de l’Etat de droit que nous appelons tous de tous nos v ux. La dignité du pays en serait sauve, car cela nous aurait permis d’éviter le traitement humiliant de la part du gouvernement français qui donne à penser, comme beaucoup le dénoncent, que le Cameroun, de triste souvenir, continue à recevoir de la France des instructions, que dis-je, des ordres pour la solution de ses problèmes.

Ne serait-il pas temps, prenant enfin en compte la volonté populaire, que le Chef de l’Etat songe à renouveler les « hommes » qui l’encadrent ?…


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Lydienne Eyoum doit payer ce qu’elle doit à L’Etat camerounais (officiel)

Le ministre de la Communication a indiqué, au cours d’un point de presse accordé mardi, que la grâce présidentielle «ne concerne que la privation de liberté»

Lydienne Yen Eyoum, bénéficiaire d’une grâce présidentielle le 04 juillet 2016, devra toutefois payer le préjudice causé à l’Etat camerounais dans l’affaire l’ayant amenée à être initialement condamnée à 25 ans de prison en septembre 2014. Elle avait été reconnue coupable du détournement de 1,077 milliard de FCFA. C’est du moins ce qu’a indiqué le ministre camerounais de la Communication hier, au cours d’un échange avec la presse à Yaoundé.

«Mme Yen Eyoum a introduit une demande de grâce amnistiante, c’est-à-dire que cette grâce s’accompagne de l’amnistie. L’amnistie relève d’une loi. Le chef de l’Etat peut gracier mais il ne peut pas amnistier puisque ça relève donc de la loi. Tout ce qu’elle doit à l’Etat camerounais, elle doit payer, c’est-à-dire le milliard 77 millions plus les dépens. La grâce ne concerne que la privation de liberté», a déclaré Issa Tchiroma Bakary.

Le porte-parole du gouvernement a aussi démenti la pression qu’aurait joué le président français, François Hollande, dans la libération de l’avocate. Ce qui apparait pourtant comme une évidence. L’un des avocats de Lydienne Eyoum, Me Christian Charrière-Bournazel, a déclaré hier sur RFI que «le président Hollande avait de manière très ferme demandé à plusieurs reprises à M. Paul Biya de libérer Mme Yen Eyoum».

«La nationalité n’a jamais été et ne sera jamais un passe-droit. Je ne sais pas si vous avez écouté l’avocat de M. Eyoum. Nous avons été choqués, nous avons été outrés par la démesure de ce qu’il n’a pas fait preuve de triomphe modeste quand il dit que le président français a imposé ou a exigé. Je dis que son discours a gêné même la diplomatie française», a réagi Issa Tchiroma.

La libération de l’avocate est intervenue un an jour pour jour après la visite de François Hollande au Cameroun. A cette occasion, au cours d’une conférence de presse, le chef d’Etat camerounais avait reconnu que le cas Lydienne Eyoum avait été posé dans les discussions avec le président français. «Si la Constitution me donne les moyens de faire quelque chose, c’est de bon c ur que je le ferai, le moment venu», avait informé Paul Biya.

«Le président de la France est venu au Cameroun à la rencontre de son homologue dans le cadre d’une séance de travail. Au terme de leur entretien, le président français, amicalement, a introduit une requête sans s’immiscer dans les affaires intérieures du Cameroun», a expliqué le porte-parole du gouvernement mardi.

Lydienne Yen Eyoum
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Hollande avait demandé de manière très ferme à Paul Biya de libérer Mme Yen Eyoum (avocat)

D’après Me Christian Charrière-Bournazel, l’un des conseils de Lydienne Eyoum, la grâce présidentielle accordée le 04 juillet 2016 est le fruit de tractations politiques

Lydienne Yen Eyoum, avocate francocamerounaise condamnée en septembre 2014 à 25 ans d’emprisonnement, a bénéficié d’une grâce présidentielle portant « remise totale de la peine restant à purger », hier en soirée. L’avocate, qui avait déjà épuisé tous ses recours judiciaires, a bénéficié de pressions politiques au sommet comme l’a affirmé l’un de ses conseils, Me Christian Charrière-Bournazel, sur les ondes de Radio France Internationale (RFI) ce mardi, 05 juillet, en matinée.

«Lydienne Yen Eyoum nous a appelé au téléphone, avec une voix extraordinairement joyeuse qui contraste avec le malheur qu’elle vit depuis six ans. Le régisseur venait de lui dire: « venez prendre vos affaires, pour sortir ».

Donc ce que l’on attend depuis des mois et des mois, ce pour quoi nous avons récemment encore été reçus à l’Elysée par Mme Le Gal, la conseillère du président, vient de se réaliser d’une manière tout à fait extraordinaire car on ne savait plus si on devait attendre six mois, un an, deux ans,

Mais nous savions une chose, c’est que le président Hollande avait de manière très ferme demandé à plusieurs reprises à M. Paul Biya de libérer Mme Yen Eyoum. Or, tout ça se passe à un moment où on se demandait si quelque chose allait sortir de ces contacts, de ces relations. Et d’un seul coup, elle est libre. Nous sommes évidemment profondément heureux pour elle, son mari que nous avons eu au téléphone est lui-même tout à fait heureux», a déclaré Me Christian Charrière-Bournazel, ancien Bâtonnier de Paris (2008-2009) et aussi ancien président du Conseil national des barreaux français (2012-2013).

Me Christian Charrière-Bournazel
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Condamnation de Lydienne Yen Eyoum: un barreau aux ordres

Par Maître Félicité Esther Zeifman, Avocat au Barreau de Paris

Mes chers confrères et cons urs du barreau du Cameroun,

Je reprends en m’adressant à vous la phrase de Wole Soyinka :  » le silence des avocats est plus dangereux que l’épée des tyrans ».

Oui plusieurs d’entre vous se sont tus lors de la condamnation de notre consoeur Lydienne Yen Eyoum Loyse, certains allant même jusqu’à être auprès des autorités judiciaires et politiques du Cameroun des gorges profondes à l’instar d’un confrère du barreau de Paris qui criait haut et fort dans un cocktail : « elle a volé » sans pour autant connaître le dossier mais dans le seul et unique but de plaire aux politiques Camerounais.

Un exemple de solidarité et de confraternité nous vient des barreaux d’Afrique de l’ouest et doit vous interpeller, interpeller votre silence.

Comme un seul homme, tous les batonniers de l’UEMOA se sont levés et sont allés à Ouagadougou pour soutenir notre confrère Mamadou Traoré. Et le résultat est là : il est en liberté.

Combien d’entre vous l’ont fait pour Lydienne ? Je les compte sur les bouts des doigts.
En revanche vous étiez nombreux à aller vous installer dans le bureau du juge d’instruction pour l’enfoncer. Le moment venu, des noms seront donnés.

Nous ne baissons pas les bras et des confrères de bonne volonté manifesteront leur solidarité et confraternité envers Lydienne.

Affaire État du Cameroun et Ministère des Finances C/ Me Lydienne Eyoum. (Avocate franco- Camerounaise)

Je dénonce depuis très longtemps cette espèce d’indifférence de l’Ordre des Avocats face à tous ces procès inéquitables conduits par la Justice Camerounaise dans le cadre de l’opération Épervier. . Le drame c’est que les Hommes et Femmes de droit et de loi qui composent cette instance n’ont pas été capables jusqu’à présent de mettre en exergue la non-conformité de certaines dispositions du Code Pénal et de la Loi portant création et fonctionnement du Tribunal Criminel Spécial relativement aux Instruments Juridiques internationaux et régionaux auxquels notre pays a adhéré à l’instar du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques et la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.

Ceux qui sont victimes comme moi estiment que ce silence est complice et n’honore en rien le Barreau Camerounais. . Bien sûr on entend quelques voix … Me Alice Nkom, Me Assiga etc. Mais il ne s’agit pas d’additionner des voix individuelles des Avocats mais d’arriver à entendre une seule voix, celle du Barreau du Cameroun. C’est un groupe de pression qui pourrait recourir à la technique de la « Robe Morte » en refusant de continuer à cautionner ce jeu de massacre devant le TCS et la Section Spécialisée de la Cour Suprême.
Aujourd’hui, entre se faire entourer d’un Avocat et ne même pas en avoir un ne revêt aucune différence. On sera alors surpris d’assister à la constitution d’un Avocat pour remplir une simple formalité.

Je saisis l’occasion qui m’est offerte pour saluer le soutien juridique dont je bénéficie de la part de Me Esther Zeifman. ..À titre purement bénévole et sans sortir un seul rond. Merci Maître ! : (Déclaration de l’Ex- Ministre Dieudonné Ambassa Zang).


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Le message personnel de Me Lydienne Yen Eyoum

Par Me Lydienne Yen Eyoum

Mes chers amis
Votre appel pour ma libération qui semble recevoir un écho bienveillant à en croire la tonalité que la presse camerounaise lui a réservé, en mettant en évidence la vérité, me touche comme toujours énormément et m’est d’un grand réconfort.

Ma gratitude envers vous tous où que vous soyez est profonde.

Dès 2005, point de départ de cette sinistre cabale contre moi, certains parmi mes proches et diverses relations y compris dans le milieu judiciaire m’ont conseillé de quitter le Cameroun parce que j’étais sur une liste noire et que tôt ou tard je serais arrêtée et emprisonnée.

À ceux-là j’ai répondu avec assurance et conviction que non seulement le Cameroun est mon pays, mais qu’en tant qu’avocat faisant confiance à la justice je ne ferai pas ce choix quoi qu’il m’en coûte, car alors je renoncerais à me défendre et à laver mon honneur, celui de ma famille, celui du Barreau du Cameroun.

J’estimais n’avoir rien à cacher ni rien à me reprocher.

J’ai donc fais le choix de rester et de tout faire pour clarifier les choses vis-à-vis de l’État et le cas échéant de répondre de mes actes professionnels devant toutes les instances compétentes.

J’ai naturellement alerté les bâtonniers successifs du Barreau du Cameroun, conformément au règlement et à l’éthique professionnelle, des rumeurs qui grandissaient et tous étaient convaincus qu’il n’y avait pas lieu à litige tels que les faits se présentaient.

Il n’y a en effet jamais eu aucune contestation ni réclamation de la part de mon client le Ministère des finances qui m’avait mandaté et à qui j’ai régulièrement rendu compte de mes actes professionnels quels que soient les ministres successifs en charge.

Ayant compris que les rumeurs de mon arrestation venaient essentiellement du Ministère de la Justice, par souci de transparence, j’ai saisi le Garde des Sceaux de l’époque ainsi que les deux directions concernées (celle des affaires civiles et du Sceaux et celle des affaires pénales).

Je n’ai pas eu l’honneur d’être reçue en personne par le Ministre de la justice Garde des Sceaux mais j’ai eu des entretiens techniques, dossiers à l’appui, avec les responsables de ces services qui concluaient toujours verbalement à l’absence de délit dans les actes professionnels que j’avais posés, ce dont ils doutaient en revanche côté Société Générale de Banque au Cameroun.

Parallèlement le Ministère des Finances répondait aux demandes d’explications du Gouvernement de 2005 à 2010 et déposait en ma faveur à toutes les enquêtes judiciaires et même au procès en 2014 devant le tribunal criminel spécial (TCS).

J’ai été reçue par le Premier Ministre de l’époque à qui j’avais également fait parvenir un dossier avec toutes les explications sur cette affaire et ce dernier m’avait fait l’honneur de me répondre en personne au cours d’une audience que tout était clarifié et que je n’avais pas à m’inquiéter, d’autant que l’enquête préliminaire du SED (Secrétariat d’État à la Défense) en 2006 ordonnée par le Garde Des Sceaux de l’époque avait conclu à une absence de malversations de ma part dans cette affaire.

J’ai fait ampliation des copies de toutes mes correspondances au Président de la République avant de lui écrire directement et avant que mes quatre avocats sollicitent une audience fin 2008 après une curieuse nouvelle enquête préliminaire ordonnée de nouveau par le même Ministre de la Justice Garde Des Sceaux et confiée à la Direction de la police judiciaire non content des conclusions de la Gendarmerie.

De plus en plus inquiets de la persistance des rumeurs de mon arrestation et par ce qui commençait à ressembler à un acharnement, à commencer par le retrait de mon passeport, mes quatre confrères et conseils camerounais sollicitèrent une audience auprès du Chef de l’État et furent convoqués en 2008 à la Présidence de la République pour une réunion technique avec les services juridiques.

À l’issue de celle-ci les parties arrivèrent à la conclusion que les soupçons de détournement de deniers publics qui avaient donné lieu à ces différentes enquêtes provenaient de renseignements erronés donnés par le Ministère de la Justice mais que tout était clair désormais.
Mais la suite fin 2009 début 2010 m’apportera la preuve que les métastases du mal s’étaient répandus dans l’ombre et que j’étais irrémédiablement condamnée à la prison à vie.

En effet, c’est l’un des Conseillers côté Présidence de la République ayant assisté à cette réunion qui, devenu le tout premier Président de la nouvelle juridiction d’exception créé spécialement et qui avait donc une parfaite connaissance de ce dossier, qui m’a condamné à 25 ans d’emprisonnement sur la base strictement des mêmes éléments déjà connus et appréciés différemment.

Il m’avait dit en début de procès au cours de la formalité de l’identification qui s’est déroulée dans son cabinet avec l’air de plaisanter… : « Lydienne je sais que tu es innocente mais si je dois te condamner je le ferai sans état d’âme  » et je lui ai rétorqué sur le même ton « Monsieur le Président si vous me condamnez alors que vous êtes convaincu de mon innocence alors vous aussi vous serez condamné ». Je ne pensais pas alors que cela puisse être possible. Il l’a pourtant fait..

Et sans état d’âme.

Dans son livre « un long chemin vers la liberté », Nelson Mandela a écrit: «un homme qui prive un autre de sa liberté est prisonnier de la haine, des préjugés et de l’étroitesse d’esprit ».

J’ajouterais que si cet homme ou cette femme est un juge ayant prêté serment de rendre la justice au nom du peuple Camerounais, c’est un crime contre l’humanité à l’égard des nombreuses victimes empilées les unes sur les autres à la prison centrale de Kondengui à Yaoundé comme à New-Bell à Douala.

Tout le processus ayant conduit à mon arrestation, puis à ma détention, et pour finir à ma condamnation définitive demeure un mystère pour moi car tout ce que mon expérience et mes compétences professionnelles m’ont appris sur le déroulement d’un procès pénal et en général sur les grands principes d’une justice juste et équitable dans un État de droit s’est révélé inefficace face à l’absurde et au cynisme.

Voilà pourquoi j’avais confié à l’époque à mon avocate parisienne lorsqu’elle m’a demandé si en cas de condamnation je solliciterais une grâce présidentielle que je ne le ferais pas, car je me battais pour faire reconnaître mon innocence devant la JUSTICE et que c’est cette reconnaissance judiciaire de mon innocence que j’attendais plus que tout.

Non pas que je sois incapable de solliciter le pardon en cas de faute par manque d’humilité ce qui ne correspondrait pas à l’éducation reçue de mes regrettés père et mère tous deux instituteurs, au contraire je suis fière et attachée aux valeurs qu’ils m’ont inculquées dès l’enfance, qui sont ceux d’humilité, de respect, du travail bien fait, de l’intégrité physique et morale, de solidarité, mais parce que profondément convaincue de mon bon droit je ne me voyais pas solliciter le pardon.

Je suis bien placée pour savoir que dans les affaires judiciaires la simple grâce présidentielle n’enlève rien au principe de la condamnation et n’efface ou n’atténue que la peine.

Je me suis toutefois décidée après la conférence de presse conjointe donnée en juillet dernier par les Chefs d’États camerounais et français.

La main tendue par le Président de la République Paul Biya et la manière exceptionnelle avec laquelle il s’est engagé publiquement à examiner ma situation conformément à la Constitution si je lui en faisais la demande après avoir fait la démonstration de sa bonne connaissance de toute l’affaire m’a redonné confiance et j’en ai été honorée.

J’ ai ainsi formulé et introduis une demande motivée de grâce amnistiante, afin d’obtenir que la décision que le Chef de l’État prendra me permette non seulement de retrouver mon honneur bafoué , mais de vivre et de travailler dans mon pays d’origine le Cameroun en toute liberté, d’aller et de venir partout dans le monde, de retourner en France auprès de ma famille et de mes amis à ma guise, sachant que mon passeport Camerounais m’a été confisqué en mai 2008 donc depuis 8 ans! et que je ne possède pas encore de passeport français.

L’autre fait extrêmement marquant pour moi lors de cette conférence de presse est d’avoir entendu de la bouche même du Président de la République que je n’étais pas une activiste politique !

Cela a été pour moi et j’espère bien pour tous ceux qui ont entouré mon arrestation d’autres faits infamants de  » tentative d’atteinte à la sécurité de l’État » un verdict de disculpation implacable.

De 2005 à ce jour du 8 janvier 2010 où j’ai été interpellée par deux impressionnantes unités de polices spéciales et durant tous mes procès, ce crime présumé a pesé sur mes frêles épaules pendant 5 années au cours desquelles des officiers de police judiciaire et des juges et procureurs chargés de cette affaire m’ont presque tous fait comprendre qu’ils « avaient les mains liés ».

Je devais comprendre qu’ils n’avaient pas d’autre choix que de m’envoyer en prison, de m’y maintenir et de me condamner à vie.
J’ai écopé de 25 ans .avec circonstances atténuantes.

J’ai toujours pensé que ce sont de mauvaises raisons, et le discours prononcé le 23 février dernier par le 1er Président de la Cour Suprême du Cameroun lors de la rentrée solennelle de la Cour Suprême me conforte dans cette conviction que les juges sont seuls responsables des décisions qu’ils rendent, il ne saurait en être autrement dans un État de droit.

Et prétendre avoir les mains liées est un déni de justice.

Ceux des juges et procureurs qui ont pour seule ambition d’envoyer des citoyens dans des prisons qui ne sont que des lieux de concentration d’êtres humains sans droits élémentaires comme la nourriture, la santé, l’accompagnement judiciaire et psychologique, un environnement sain minimum, outre la privation de liberté, doivent se souvenir de cette autre pensée du grand homme déjà cité qui, en parlant de son pays l’Afrique du Sud où disait-il, les citoyens africains emprisonnés étaient traités comme des animaux, « on ne devrait pas juger une nation sur la façon dont elle traite ses citoyens les plus riches mais sur son attitude vis-à-vis de ses citoyens les plus pauvres ».

Je suis meurtrie de côtoyer depuis plus de 6 ans la mort, la faim, toute sortes de dangers, les maladies les plus dangereuses dont celles liées au péril fécal que les spécialistes de la santé publique mondiale connaissent et classent en tête des risques sur la santé publique les plus élevés.

Mon combat pour la vérité et la liberté a rencontré ici le combat quotidien de milliers de camerounaises et de camerounais présumés innocents pour la plupart, sans voix et sans moyens de survie de 10 à plus de 77 ans.

J’ai souvent été ravagée de sentiments divers mais j’ai pu trouver la force de tenir en contribuant à aider et à partager avec plus faible que moi. C’est une petite goutte d’eau dans un océan malgré de nombreuses autres bonnes volontés.

Tous les bienfaiteurs et bénévoles extérieurs comme intérieurs qui se sacrifient comme ils peuvent pour sauver de nombreux détenus de ce camp de concentration sis à Kondengui savent que tous leurs efforts pour nourrir, soigner et habiller les détenus bien que louables sont insignifiants au regard de l’ampleur de la situation.

Car ici, « riches ou pauvres » nous subissons tous non pas seulement des « double peines » mais une multitude de « double peines » sans compter que nos pauvres familles qui doivent veiller au quotidien à nos besoins élémentaires le subissent aussi.

Malgré tout, j’ai foi en cette parole présidentielle et j’espère vous revoir tous bientôt.

Merci à tous du fond de mon c ur.

Prenez bien soin de vous où que vous soyez dans ce monde en chamade où nous avons besoin d’amour, de solidarité, de respect et de pardon afin de chasser la haine et l’obscurantisme.

Prison de Kondengui, le 1er mars 2016.

Cellule de Lydienne Yen Eyoum
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Cameroun: affaire Lydienne Eyoum, le fils d’Engo écrit à François Hollande

Par Joël Didier Engo

Monsieur le Président Hollande, n’oubliez pas Mme Lydienne Yen Eyoum au Cameroun ! Face à l’arbitraire d’un régime totalitaire et en toute humilité, nous ne cesserons jamais d’implorer le « bon c ur » de notre Président à vie aimé Paul Biya, afin qu’il libère enfin, « cette personne », qui n’est autre que l’avocate Franco-camerounaise Lydienne Eyoum séquestrée parce qu’elle aurait « détourné » ses propres honoraires.

Après la grâce partielle accordée par le Président de la République à Mme Jacqueline Sauvage, comment ne pas avoir une pensée particulière pour Mme Lydienne Yen Eyoum, pour laquelle l’Élysée devrait s’investir encore plus dans le processus de libération au Cameroun, même si celle-ci – contrairement à Mme Sauvage – ne dépend (ra) pas uniquement de la volonté de François Hollande. En effet, toutes les violences sur les personnes et singulièrement celles faîtes aux femmes sont inacceptables, parce qu’elles procèdent hélas si souvent de la même logique de domination masculine.

Lydienne Yen Eyoum n’est évidemment pas Jacqueline Sauvage (et vice-versa), mais son calvaire carcéral depuis 6 années émane du même instinct d’aliénation de la gente féminine, avec un facteur aggravant au Cameroun : le travestissement institutionnalisé et au plus haut niveau de la vérité. Monsieur le Président, n’oubliez pas Mme Lydienne Yen Eyoum !

Lydienne Yen Eyoum.
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Cour suprême: Peine de 25 ans de prison confirmée pour Lydienne Eyoum

La Haute juridiction du Cameroun a confirmé mardi le jugement rendu par le Tribunal criminel spécial (TCS) à l’encontre de l’avocate franco-camerounaise, condamnée pour détournement de deniers publics

La Cour suprême du Cameroun a confirmé mardi la condamnation à 25 ans de prison de l’avocate française d’origine camerounaise Lydienne Yen-Eyoum, jugée en 2014 à Yaoundé pour détournement de fonds, a-t-on appris de source judiciaire.

Le pourvoi en cassation introduit auprès de la Cour suprême par Me Yen-Eyoum le 29 septembre 2014 avait été examiné le 28 mai par les magistrats de la section spécialisée de la haute juridiction. Lors de l’audience, le conseilleur-rapporteur (magistrat qui prépare le dossier pour la Cour) s’était prononcé pour le rejet du pourvoi.

Le 26 septembre 2014, le Tribunal criminel spécial (TCS), juridiction spécialisée dans la répression de la grande corruption, avait reconnu Lydienne Yen-Eyoum coupable du détournement de 1,077 milliard de FCFA (1,5 million d’euro) et l’avait condamnée à 25 ans de prison. L’avocate avait attaqué la décision devant la Cour suprême, en dénonçant la violation de plusieurs dispositions légales.

Écrouée depuis janvier 2008, s’est toujours dite « innocente ».

Me Yen-Eyoum, mandatée par le ministère camerounais des Finances, avait mené en 2004 une opération de recouvrement des créances de l’ex-Office national de commercialisation des produits de base (Oncpb) auprès de la SGBC, filiale de la banque française Société générale en contentieux avec l’Etat camerounais. La justice camerounaise lui a reproché d’avoir gardé par devers elle une partie des fonds recouvrés.

Devant la Cour suprême, Me Yondo Black, l’un des avocats camerounais de la Franco-camerounaise, avait accusé cette filiale d’être à l’origine de ses ennuis judiciaires.

La Société générale est connue dans le monde comme un faussaire, un manipulateur, a-t-il lancé.

Contactée en mai par l’AFP, la Société générale avait expliqué ne pas avoir de commentaires à faire « dans une affaire où nous ne sommes pas partie et qui semble résulter des relations entre Me Eyoum et l’Etat camerounais. »

Les conseils du Cameroun à la Cour suprême, le 28 mai dernier, ont fait valoir le fait qu’« un avocat n’est pas fondé à recouvrer l’argent pour le compte de l’Etat ».

Il était reproché à Lydienne Eyoum d’avoir fait virer l’argent récupéré à la SGBC dans son compte personnel. L’ex ministre des Finances, Polycarpe Abah Abah, qui lui avait délivré le pourvoi spécial pour saisir les sommes querellées, avait été quant à lui acquitté par le TCS.

Me Lydienne Yen Eyoum
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