Initialement soutenu par les populations, Ntsimi Evouna essuie de plus en plus de critiques fâcheuses
Peu de gens le disent tout haut mais dans les coulisses d’une opinion très mécontente, le délégué du gouvernement auprès de la communauté urbaine de Yaoundé est sévèrement critiqué en raison de ses dernières sorties médiatiques et sur le travail qu’il fait dans son périmètre de compétence. Les plus téméraires parlent de folie destructrice et de mépris à l’endroit des classes dites inférieures. On trouve qu’investi du pouvoir pour promouvoir le bien-être de la communauté des populations de Yaoundé dont il est le garant des intérêts, il semble s’être inscrit dans une logique qui à terme peut être assez néfaste pour la cohésion sociale et pour la vie harmonieuse de la communauté. On s’interroge sur les motifs d’une telle dérive, car des dérives il en existerait déjà beaucoup. Une analyse de certains actes et propos du délégué semble conforter cette position de l’opinion.
Tout d’abord il est apparu dans une conférence de presse au coté de l’Archevêque métropolitain de Yaoundé le dimanche 15 mars 09, à l’occasion de la visite du pape au Cameroun. Les médias officiels et certain autres ont fait part d’accusations subversives à l’encontre du délégué du gouvernement. Mais à y voir plus claire il semblerait que non. Répondant aux journalistes qui l’interpellaient sur les mesures d’accompagnement en faveur des petits commerçants et tous les autres victimes des casses, Ntsimi Evouna a choisi de pointer un doigt accusateur sur le gouvernement qui selon lui est incapable d’engager des réflexions. Il a clairement affirmé avoir informé le premier ministre de son initiative de casser tout en ayant conscience de l’impact négatif que cela aurait pu avoir sur de nombreux jeunes débrouillards. La semaine d’après (période précédant l’arrivée du pape), il a cassé dans toute la ville et selon ses propres termes 100 000 personnes.
Ces déclarations ont fait l’objet d’une double interprétation. Dune part le délégué du gouvernement reconnaît expressément avoir plongé près de 100 000 personnes dans un drame humanitaire, économique, social et sécuritaire. Un juriste interrogé sur la question a répondu que si en effet la loi camerounaise prévoit des recours matériels(destruction par exemple) dans le cadre d’un déguerpissement pour cause d’utilité public, il serait néanmoins souhaitable que l’acte de la force publique ne viole pas des droits fondamentaux inscrits dans la constitution comme le droit à un logement, à la sécurité et l’épanouissement économique, autant de droits qui dans ce cadre ont été violés vue le nombre de personnes affectées par les coups de force du délégué. La réalité socio économique camerounaise présente un tissu économique urbain majoritairement constitué de petits détaillants qui à bien y voir sont pour une bonne partie le centre de régulation de cette économie. Ils permettent aux best producteurs d’atteindre plusieurs de leurs consommateurs finaux, et aux consommateurs de pouvoir acquérir un certain nombre de biens à des prix relatifs.
Par ailleurs, ce pan de l’activité est un palliatif sérieux au problème du chômage, au point où le gouvernement à créé tout un programme pour gérer ce secteur informel (le PIASI). Le délégué du gouvernement semble ne pas accorder de l’importance à tout ça. Cela nous amène à examiner la deuxième incidence de ses propos et acte. En déclarant avoir cassé bien que n’ayant pas obtenu l’avis du premier ministre qu’il avait pourtant saisi par écrit, le délégué a fait montre d’une indélicatesse sans la hiérarchie administrative. Le gouvernement a la pleine compétence dans la conduite de la politique du pays, et y engage sa responsabilité, mais pas un délégué du gouvernement qui n’engage sa responsabilité que sous le couvert de sa tutelle à savoir le MINATD. Il ne peut donc pas engager des actions de masse comme celles-ci sans obtenir un avis conforme du gouvernement. Il est évident que Ntsimi Evouna ne pourra pas à lui tout seul résoudre le drame social qu’il a ainsi créé.
Cela nous amène à s’interroger sur les motivations du délégué du gouvernement. La question n’est pas des moindres, car l’argent qui sert à l’embellissement de la ville capitale du Cameroun provient du C2D (contrat désendettement développement) qui représente la part française des ressources PPTE. Pour les jeunes cassés c’est un double motif d’interrogation car ils sont pour la plupart des diplômés des universités du pays. Alors, ils sont conscients que le service de la dette qui est transformé en ressources PPTE est constitué de l’impôt des citoyens. Bien plus, nombre de petits commerçants déguerpis ont souvent eu à payer des petites redevances aux maries locales, ce qui normalement leur donnait un accord tacite de la part des dites collectivités.
Ainsi, à la question de savoir pourquoi, beaucoup penchent pour l’incompétence inconsciente du délégué qui logiquement ne peut pas se substituer au gouvernement fusse-t-il pour une ville dont il possède les clés. Certains autres y voient par contre une volonté manifeste de régler des comptes personnels. Sans vouloir être partisan de mauvaise langue, il est vrai d’admettre que l’actuel délégué du gouvernement auprès de la communauté urbaine de Yaoundé sait ce que ressent un individu cassé, lui même ayant énergiquement défendu son centre commercial qui était et qui est toujours logé dans une zone marécageuse, zone ressortant du domaine publique. Ce qui amène à dire que soit il casse la mort dans la contrainte et ce par cupidité face aux nombreux milliards en jeux, soit il veut profiter de la situation pour redistribuer les cartes de l’économie en excluant certain du jeu par tribalisme et xénophobie. Ce qui serait une grosse aberration et une mauvaise erreur. Cette dernière opinion n’est pas arbitraire. L’histoire nous rappelle que le délégué du gouvernement s’est souvent illustré dans des revendications à caractères autochtones. Et bien plus que ça, ses déclarations au cours de cette conférence de presse prêtent franchement à équivoque « ..vous devez comprendre que j’ai eu à casser plus de 100 000 personnes. On ne pourra pas trouver des boutiques à toutes ces personnes. Mais vous devez savoir que parmi ces victimes il y’a au moins 30% qui ne sont pas des camerounais. Quand les dossiers seront déposés au fonds national de l’emploi(FNE), celui-ci va les examiner et on saura de quelles régions vous êtes. Lorsque les dossiers seront transmis au Comité, nous tiendrons compte des équilibres, on ne pourra pas attribuer des boutiques aux ressortissants d’une même région ou de deux régions ». Un seul constat peut être fait, soit le délégué du gouvernement ignore les lois sur l’activité économique au Cameroun, soit il en a une parfaite maitrise et risque de plonger la communauté de la capitale camerounaise dans un gros climat de tension.