La cérémonie d’attribution de cette distinction scientifique du programme « Science et Diplomatie » a eu lieu à Trieste en Italie
Professeur, parlez-nous un peu du programme Science et Diplomatie plus connu par son acronyme anglais TWAS
Pour commencer, permettez-moi d’expliquer, ce veut dire TWAS. TWAS (acronyme anglais qui veut dire Third World Academic of Sciences) est une académie scientifique basée à Trieste en Italie, qui travaille pour faire avancer la science et l’ingénierie pour la prospérité durable dans le monde en développement. Cette académie mondiale des sciences a été fondée en 1983 à Trieste en Italie, par un groupe d’éminents scientifiques du Sud sous la direction de feu le prix Nobel Abdus Salam du Pakistan. Il a été officiellement lancé par le Secrétaire Général de l’Organisation des Nations Unies en 1985. TWAS représente le meilleur de la science dans les pays en développement. Sa mission principale est de promouvoir l’excellence scientifique et le renforcement des capacités dans les pays du Sud pour le développement durable fondé sur la science. Légalement, TWAS est une unité de l’UNESCO depuis 1991. Les objectifs de TWAS sont : Reconnaitre, soutenir et promouvoir l’excellence dans la recherche scientifique dans le monde en développement ; Répondre aux besoins des jeunes scientifiques des pays en Science et Technologie ; Promouvoir la coopération Sud-Sud dans la science, la technologie et l’innovation Sud-Sud ; Encourager la recherche scientifique et le partage d’expériences dans la résolution des grands problèmes auxquels sont confrontés les pays en développement.
Comment s’est déroulé le processus qui a conduit à votre sélection comme Ambassadeur des Sciences pour l’Afrique centrale ?
Le processus de sélection s’est déroulé en trois phases. D’abord l’appel à candidatures ; puis la sélection elle-même et enfin le déplacement. Pour l’appel à candidatures, les critères de sélection étaient très rigoureux à savoir la sélection au maximum de quatre décideurs et/ou diplomates impliqués dans le secteur énergétique des pays en développement. Ces candidats au titre d’Ambassadeur des Sciences devaient être nés dans un pays en développement, avoir une grande renommée dans leur pays et avoir une grande expérience dans le domaine de la politique énergétique. Je profite pour remercier le responsable de l’ONG AVD (Actions Vitales pour le Développement) qui m’a informé de cet appel à candidatures. En ce qui concerne la sélection elle-même, elle s’est déroulée selon les règles de l’art au niveau du conseil scientifique de l’Académie Mondiale des Sciences. La décision est tombée le 18 octobre 2013 et signée par le Pr. R. Murenzi, Directeur exécutif de l’Académie Mondiale des Sciences. Après la sélection, j’ai soumis une bibliographie succincte et ma contribution à l’avancement de la science et la technologie dans ma région d’Afrique centrale. Pour le déplacement, j’ai été mis en mission par le Pr. Paul Henri AMVAM ZOLLO, Recteur de l’Université de Ngaoundéré.
Du 09 au 13 décembre dernier, vous étiez donc à Trieste en Italie où a eu lieu la cérémonie d’attribution de cette haute distinction scientifique. Comment s’est déroulée cette cérémonie ?
Le séminaire s’est déroulé en cinq phases : La cérémonie d’ouverture, la Session plénière, les Ateliers en groupes de travail, la Visite d’une entreprise et la Cérémonie de clôture.
Quelle est la mission qui vous a été confiée en tant qu’Ambassadeur des Sciences pour l’Afrique centrale ?
Notre mission est triple: Primo, faire avancer les objectifs de l’Académie Mondiale des Sciences dans notre région en collaboration avec les académies des sciences dont je suis membre. Secundo, faire avancer les questions à l’interface de la science et de la diplomatie, et de le faire à l’échelle régionale surtout dans les pays en développement comme c’est le cas de l’Afrique centrale. Tertio, organiser des projets axés sur le renforcement de la coopération régionale et des réseaux entre les membres de TWAS et de leurs pays, et accroître la capacité des Ministères des Affaires Étrangères, les divisions de coopération Internationales au sein des ministères et des organismes de recherche afin d’établir des partenariats scientifiques. Nous étions quatre sélectionnés dans le monde dont un guinéen (Dr. Mohamed S. DIANE), une indienne (Pr. Malti GOEL), un zimbabwéen (Dr. Willie D. GANDA), et moi-même (Pr. César KAPSEU). En qualité de pionniers avec le titre « Ambassadeurs des Sciences » dans le domaine de la science et de la diplomatie dans les pays en développement, nous portons une lourde responsabilité dans la diffusion de cette initiative à l’interface entre la science et la diplomatie
Quelle est la durée de votre mandat ?
D’abord les Ambassadeurs des sciences sont des scientifiques avec une longue expérience en recherche, en communication et en politique scientifiques. Très souvent, ces scientifiques ont déjà fait leurs preuves et c’est une confirmation de leur talent et de leur expertise. La durée du mandat n’a pas été déterminée. Nous pensons que comme tout titre, nous allons prouver sur le terrain que nous méritons cet honneur. Prenons quelques exemples pour illustrer notre engagement : Dans mes bagages pour Trieste (Italie), j’ai amené une correspondance du Maire de la Commune de Ngaoundéré IIIème à destination du Maire de la Commune de Trieste. L’objet de cette correspondance porte, entre autres, sur la coopération scientifique afin de résoudre les problèmes des citoyens dans les deux communes partenaires et enfin, mettre les hommes en contact pour créer une synergie d’action et d’échange d’expériences. La diffusion dans les réseaux sociaux à l’échelle régionale des appels à candidature pour les programmes des bourses Sud-Sud. En effet, l’Académie des Sciences pour les pays en développement (TWAS) accepte les candidatures pour le troisième cycle, les études post-doctorales, les chercheurs invités et les programmes de bourse de recherche avancée. Pour plus de renseignements, visitez le site http://twas.ictp.it/prog/exchange/fells/fells-overview. Notre rêve serait d’accroître le nombre de boursiers en provenance de notre région d’Afrique centrale. Il convient de faire remarquer que les femmes scientifiques sont particulièrement encouragées à postuler à ces bourses. Le Cameroun a le deuxième potentiel hydroélectrique en Afrique Subsaharienne. Ainsi, nous pouvons être riches en exploitant la ressource énergétique. Une collaboration avec les pays voisins en utilisant la diplomatie et la science, permettrait de former les masses critiques au niveau régional pour une meilleure intégration de notre réseau électrique et pour le bien être de nos populations. Personnellement, j’ai déjà contribué à former les masses critiques en ressources universitaires en donnant des cours au Congo-Brazzaville et au Tchad.
Est-ce que cette distinction a été reconnue par les autorités camerounaises ?
J’ai bénéficié d’une mise en mission pour participer à ce séminaire du 06 au 17/12/2013. Ceci démontre déjà l’engagement des autorités à soutenir les enseignants-chercheurs. Nous avons également informé le Ministre de l’Enseignement Supérieur du Cameroun, Chancelier des Ordres Académiques de l’obtention de ce titre d’Ambassadeur des sciences. En définitive, les autorités camerounaises sont satisfaites de ce titre qui honore non seulement le Cameroun mais également l’Afrique Centrale. Permettez moi de marquer ma reconnaissance au Ministre des Relations Extérieures qui a facilité l’octroi du visa d’entrée en Italie par la note verbale en date du 13/11/2013.
Votre dernier mot ?
Je pense que c’est l’un des séminaires les plus intéressants auxquels j’ai participé. C’était une occasion précieuse pour moi de faire des liens avec les experts de la politique énergétique de 20 pays comprenant les pays développes et ceux en développement dont la Chine et l’Inde, le Népal, le Bangladesh, le Sénégal, le Zimbabwe et le Cameroun. La science, la diplomatie et la politique sont susceptibles de couvrir les questions telles que l’énergie, la gestion durable de l’eau, la sécurité alimentaire, le changement climatique et l’exploitation durable des océans. Les leçons que je tiré de cet atelier sont les suivantes : la technologie verte sera la grande source des richesses de demain ; les déchets sont une source de création de richesses. Autrement dit « déchets = Argent ». Ces déchets peuvent fournir les biocarburants (le biogaz, l’électricité, les engrais et les minéraux (cendres)) ; la richesse du monde réside dans la diversité humaine. Les situations sont parfois identiques malgré la distance qui sépare les pays ; il faut sortir les résultats expérimentaux des laboratoires et/ou des tiroirs pour les mettre à la portée de la communauté. La diplomatie peut jouer un rôle important en mettant les hommes en contact (universitaires-chercheurs-entrepreneurs-décideurs) ; l’interdisciplinarité est la clé des solutions aux problèmes que nous vivons au quotidien. En effet, aucune discipline seule ne peut résoudre un problème complexe. En conséquence, il faut créer des disciplines à l’interface de celles qui existent déjà, de manière à créer la complémentarité. Aucune source d’énergie ne peut résoudre seule le problème du déficit énergétique. En conséquence, il faut mutualiser les différentes sources d’énergie en présence. Personnellement, je dirige les recherches sur les hybrides suivants : solaire-biomasse, biocarburant-pétrocarburant. Je suis convaincu que demain on parlera de l’Hybride « petrodollars-bioFCFA ». J’étais très ému de recevoir la distinction d’Ambassadeur des Sciences sous l’icône d’Albert Einstein dont le centenaire a été fêté à Trieste (Italie). En effet, je me rappelle avoir reçu de l’American Bibliographical Institute (USA), le titre de « Albert Einstein award for excellence » en 2011. Permettez-moi comme j’ai encore la parole, d’adresser les remerciements au Directeur Exécutif de l’Académie des Sciences (TWAS), au Recteur de l’Université de Ngaoundéré et au Ministre de l’Enseignement Supérieur du Cameroun pour le soutien apporté chacun à son niveau pour la réussite non seulement de ma participation au séminaire « Sciences et Diplomatie » mais également à la cérémonie de reconnaissance en qualité d’Ambassadeur des Sciences. Je remercie les journalistes du Journal du Cameroun de me donner cette tribune.