Guy Honoré Tchente, le Secrétaire Général de l’ordre national des conseils fiscaux du Cameroun nous a accordé un entretien.
L’ordre entend désormais mettre de l’ordre dans la profession du conseil fiscal au Cameroun. Quelles sont les actions qui seront menées dans ce sens?
S’agissant de nos confrères, je ne dirais pas confrères, mais des personnes qui exercent illégalement aujourd’hui, les mesures qui ont été prises lors de notre dernière assemblée générale consistent dans un premier temps, à écrire à ces personnes pour attirer leur attention sur le fait qu’elles sont en exercice illégale, afin qu’elles puissent remplir les conditions prévues par la loi pour être inscrites au tableau. C’est seulement au cas où ces personnes ne vont pas se conformer à la législation, que des mesures plus coercitives pourront être engagées en leur encontre. On va également adapter la même démarche par rapport aux personnes qui utilisent les services de ces personnes qui exercent illégalement
Sur ce dernier point précisément, n’avez-vous pas l’impression que cela découle d’un manque de sensibilisation des contribuables?
Effectivement, et c’est dans ce sens que la conférence de presse a été organisée, et l’Assemblée Générale nous en a donné le mandat. Nous nous sommes rendus compte que notre profession est ignorée par beaucoup de contribuables, c’est certainement notre faute. Nous étions un peu chacun dans son coin, et nous avons décidé cette fois ci, de vraiment sensibiliser les contribuables, et sensibiliser ceux qui utilisent nos services.
Quel est justement l’état des lieux de la profession de conseil fiscal au Cameroun?
Ce qui nous désole, c’est qu’aujourd’hui la profession est en grande partie exercée par des gens qui ne sont agréés et qui ne sont pas inscrits. Ceci à cause d’un vide. Nous reconnaissons notre part de responsabilité dans cette situation et des mesures sont prises pour sensibiliser à la fois les contribuables et même l’État, notre tutelle sur cette situation. Nous avons grand espoir que cela va s’améliorer d’année en année.
Quel pensez-vous de la polémique actuelle entre les conseils fiscaux et les experts comptables?
Le débat ou le pseudo débat qui opposerait les conseils fiscaux aux experts comptables pour nous est un faux problème simplement parce que, lorsque l’on pose le problème en terme de querelles de chapelles, évidemment, on ne peut aboutir qu’à de telles situations, mais si l’on commençait par s’interroger sur les attentes des parties prenantes, c’est-à-dire quelles sont les attentes des contribuables d’abord, ensuite quelles sont les attentes de l’État, je pense que la réponse va découler d’elle-même. Si je prends d’abord les attentes du contribuable, lorsqu’il fait appel à un professionnel, le contribuable a besoin d’une valeur ajoutée. Il veut qu’à la suite du passage du professionnel, qu’il aie un minimum de garanties quant à l’application des textes régissant la fiscalité par ses services compétents. Il attend que le professionnel puisse lui dire voilà là où vous pouvez optimiser votre charge fiscale. En l’état actuel c’est une mission de certification des comptabilités, et les experts comptables eux-mêmes très souvent le disent, ils ne certifient pas la fiscalité. C’est pour cela que nous voulons faire évoluer cette mission, d’une mission de certification de comptabilité vers une mission de validation de la DSF (déclaration statistique et fiscale), pour laquelle l’expert comptable et bien sûr le conseil fiscal, seront compétents. Les experts comptables d’un point de vue légal ont aujourd’hui le monopole de la certification et cette certification j’insiste, est une certification comptable. L’acte uniforme OHADA régissant le droit comptable leur reconnaît déjà ce monopole. Le conseil fiscal bien entendu est compétent de par la loi, de part sa formation, de part son expérience, et ça laisse au contribuable le choix de faire appel, soit à l’expert comptable, soit au conseil fiscal. Actuellement ce contribuable n’a pas le choix, il est obligé de faire appel uniquement à l’expert comptable, et comme il n’y a pas en plus de valeur ajoutée pour lui, il a l’impression qu’il est entrain de payer un complément d’impôt.
Enfin, que répondez-vous à ceux qui estiment que l’ordre a verrouillé l’accès à la profession de conseil fiscal?
Je pense que c’est un faux procès, par ce que la profession conseil fiscal, est régit par des textes. A ce jour, je dois reconnaître que la durée de 10 ans que prévoient les textes est longue. Nous sommes tous passés par là, mais pour les jeunes que nous attendons dans la profession demain, nous avons initié un projet de toilettage des textes, qui aura pour finalité de ramener cette durée de 10 à 5 ans. L’erreur a été commise à l’époque où on exigeait simplement un diplôme d’enseignement supérieur, plus 10 ans. On a par la suite dans les années 80, procédé à une reforme des textes au niveau de la CEMAC pour relever le niveau du diplôme, on demandait maintenant un baccalauréat plus 5, et on a oublié de réduire la durée du stage. Le conseil de l’ordre a pris cela comme un problème sérieux, parce que notre grand souci également c’est de permettre aux jeunes camerounais qui sont passionnés par la fiscalité, de pouvoir accéder à cette profession.