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Cameroun : quand le bilinguisme s’impose aux enfants

L'instabilité socio-politique dans les régions du Nord-Ouest et Sud-Ouest a causé de nombreux déplacements internes dans le reste du pays.…

L’instabilité socio-politique dans les régions du Nord-Ouest et Sud-Ouest a causé de nombreux déplacements internes dans le reste du pays. Arrivés dans d’autres régions, le français s’impose aux ressortissants de ces régions.

Un samedi matin au quartier Melen à Yaoundé. Le climat est assez frais et les bruits récurrents des élèves qui vont à l’école est quasi inexistant. Il est 7H passées de treize minutes.

 Esther, élève en classe de Form 4 (troisième) comme chaque samedi fait sa lessive. Elle décide alors de se rendre à la boutique pour acheter un détergent.

« Please I want omo » lance la jeune ressortissante de Wum dans le Nord-Ouest au boutiquier. À ce dernier de répondre « je n’ai pas Omo, le détergent là est devenu très rare et c’est même trop cher. Il n’y a que Madar et Sabar power ».

C’est face à cette confusion qu’Esther rectifie sa demande en précisant « tonton c’est de ça que je parle (en indiquant de son indexe au boutiquier ce qu’elle veut). Le truc de cinquante qu’on utilise pour tremper les habits », dit-elle.

Des pareils évènements, on en connaît. Récemment encore, on faisait état d’une situation aussi folle que problématique. La scène se déroule toujours à Yaoundé mais au quartier Warda sur l’avenue du collège La Retraite.

Un monsieur d’expression anglaise veut emprunter un taxi. Après plusieurs tentatives, il trouve une voiture disponible et donne sa destination dans la langue de Shakespeare : « foreign office ». Au chauffeur de répondre « Ce n’est pas sur ma route » (une distance pourtant située à moins de 500m sur une ligne droite).

C’est un autre passager qui rectifie le tir et faire la traduction. Il indique au taximan que forgien office fait référence au ministère des Relations extérieures.

Bilinguisme : plus qu’une nécessité

Ce sont de telles confusions qui ont permis à l’écolière d’apprendre malgré elle à communiquer en français. Lorsqu’elle arrivait à Yaoundé en septembre dernier, elle écoutait et parlait français approximativement.

Au fur et à mesure qu’elle butait dans ses échanges avec d’autres habitants du quartier, elle se retrouvait alors dans l’obligation de s’essayer en français.

Ne dit-on pas qu’à force de forger on devient forgeron ? Esther l’a bien compris. Pour se faire écouter, elle n’a pas le choix. Avoir recours au français n’est plus un choix mais une nécessité.

Même si cette situation paraît contraignante, elle nous explique qu’elle a tout son avantage. « La plupart de mes amis ici au quartier sont des francophones. Et pour échanger avec eux, je dois le faire en français. Mais quand je commets des fautes, ils rectifient. Et cela m’aide beaucoup même à l’école ou encore même quand j’accompagne ma mère au marché ».

Esther Kum, bilingue par contrainte

Esther Kum

En quittant son Wum natal, elle n’imaginait pas qu’elle pouvait un jour autant communiquer en français. Mais aujourd’hui, Esther est devenue la principale traductrice chez eux et à base de sa petite expérience, elle va jusqu’à aider ses cadets à s’exprimer un peu en français.

 

 

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