Du domaine des stades aux hôpitaux, en passant par les hôtels, les routes et les moyens de sécurité, de nombreux défis restent à relever
«A nous la Can 2019»; «Can 2019, Cameroun, pays hôte»; «Organisation de la Can 2019, Au travail!». En début de semaine, la presse camerounaise n’a pas tari d’éloges pour célébrer la décision historique du Comité exécutif de la Confédération africaine de football (Caf) de confier l’organisation de la Can 2019 au Cameroun. Une grande occasion, en effet, qui porte les espoirs de tout d’un peuple sevré de la plus grande compétition continentale depuis, 42 ans.
Les Camerounais sont donc tombés dans l’euphorie, oubliant en l’espace de quelques heures les difficultés. Le Cameroun tout entier a fêté la victoire surprise, au point que l’ambassadeur du Cameroun en Ethiopie, Zaché Benga, a organisé une grande fête, à laquelle Issa Hayatou, le président de la Caf a refusé de prendre part. Qu’importe, la Can est une chance de développement unique. Qu’est ce que la Can peut bien apporter à un pays comme le Cameroun, qui souffre d’un manque criard d’infrastructures sportives et de lourdes pesanteurs économiques ? Apparemment tout, ou, du moins, beaucoup : du point de vue économique, l’effet d’accélérateur provoqué par l’accueil d’une compétition internationale de l’envergure de la Can n’est plus à démontrer : le Mali en 2002, le Ghana en 2008, le Gabon et la Guinée équatoriale en 2012 en sont des exemples éloquents.
De l’avis des autorités en charge du football camerounais, plusieurs secteurs seront mobilisés pour les préparatifs. Pour la seule capitale Yaoundé, outre la rénovation du stade Ahmadou Ahidjo, il est prévu la construction d’un stade ultra moderne baptisé «Paul Biya», d’une capacité de 60 000 places. Il faut, autour des stades, des parkings capables d’accueillir au moins 3000 véhicules et de larges axes routiers pour les y amener.
Paul Biya
Egalement concernée, la ville de Garoua, où est prévue les travaux de réaménagement du stade de Roumdé Adjia. Mieux, selon nos sources, l’Etat du Cameroun prévoit construire un hôtel de quatre étoiles. Et dans cette capitale de la région du Nord, sont prévus les travaux d’agrandissement et d’aménagement des hôtels de la Bénoué, du Relais Saint Hubert et du Motel Plaza. Sur le plan sanitaire, un hôpital de référence sera aussi construit à Garoua. Fruit de la coopération Corée-Cameroun. Dans le même sillage, Bamenda, située à 75 Km de Bafoussam, se verra doté d’un hôpital de référence, construit par l’Etat du Cameroun. Il sera placé en réserve, afin de parer à toute défaillance éventuelle des installations sanitaires de Bafoussam.
A Bafoussam, où un stade de 20 000 places est en train de sortir de terre, trois opérateurs économiques veulent construire trois hôtels de quatre étoiles chacun. Un projet de construction d’un hôtel de quatre étoiles est également en gestation à Foumban, le chef lieu du département du Noun. Dans le département du Fako, qui possède déjà son stade de 20 000 places à moitié couvert à Limbe, est prévu le réaménagement et la transformation de certains établissements hôteliers, tels que le Fini Hôtel et Seme Beach à Limbe; Chariot Hotel et le Mountain Hotel à Buea.
Sur le plan sécuritaire, le pays hôte de la Can 2019 promet un système de vidéo surveillance par GPS sur tout l’étendu de son territoire. De nouvelles unités de lutte contre l’insécurité urbaine et maritime vont être créées. Une de ces divisions pourrait faire face, le cas échéant au terrorisme international. Les autorités en charge du football camerounais assurent également que sur le plan de la communication et des télécommunications, le Cameroun possède déjà la fibre optique et que ses trois stations terriennes faciliteront la retransmission des matches. Mieux, que sur le plan des transports, les réseaux routiers des villes de Yaoundé, Douala, Bafoussam et Limbe, seront réaménagés.
Où sont les stades?
Au Cameroun, le football est un facteur d’indentification nationale, soutenue par exemple par les victoires des clubs camerounais en compétitions africaines et les succès de la sélection nationale aux Can de 1984, 1988, 2000 et 2002, sans oublier la médaillé en or glanée aux Jeux Olympiques de 2000 à Sydney. Mais tout ceci a été obtenu sans que le Cameroun ne soit doté d’infrastructures sportives à la dimension du talent de ses joueurs. D’où le scepticisme de certains compatriotes quant à la capacité des Camerounais de bien organiser un événement de l’envergure de la Can.
D’où vient donc la peur ? Simplement du fait que de nombreux projets n’ont même pas encore vu le jour. Un seul stade, celui de Limbe, est achevé. A Yaoundé, où le Programme national de développements des infrastructures sportives (Pndis) annonce depuis cinq ans un stade à Olembé et un autre à Douala (Bekoko), les constructions ont pris du retard. Sauf miracle, la Can féminine prévue initialement se jouer dans ces stades en octobre 2016, sera délocalisée.
Que feront les supporters entre les matchs ? C’est une grande incertitude: le Cameroun ne possède aucune salle de cinéma digne de ce nom. Les sites touristiques sont inaccessibles, (chutes de la Lobé près de Kribi par exemple), du fait du mauvais état des routes. Relier les différentes villes, avec un minimum de sécurité routière, va relever de l’exploit: une seule autoroute est prévue entre Douala et Yaoundé. Or, près de 1000 Km séparent Garoua de Yaoundé. Pour l’heure, un voyage par route prend au moins 14 heures. Dans un pays où le transport aérien est un luxe, il faudra rendre plus efficace le transport par train. Où vont se nourrir les 10 000 visiteurs attendus? Vivement que le Comité de suivie de cette Can 2019 voit le jour, afin que les grands travaux commencent.
