La capitale de l’Etat de Géorgie se débarrasse progressivement des scories d’un passé douloureux
Martin Luther King, Junior. Le grand rêve de réconciliation de l’Homme avec lui-même et son prochain. Auburn, quartier résidentiel d’Atlanta, en est le symbole incarné. La maison d’enfance du leader noir des droits civiques accueille sans distinction aucune (couleur de la peau, statut social, origine, etc.) le visiteur. L’édifice, acquis en 1909 à la somme de 3500 dollars par le grand père de Martin Luther King Junior, retrace la longue marche vers les acquis d’aujourd’hui. Une maison chic d’au moins cinq pièces, à la fin du 19è siècle, dans un quartier noir aux habitants bien organisés et dynamiques sur le plan économique, malgré la ségrégation raciale. Le rejet de la ségrégation raciale par les populations noires dans les années 1930 – 1940. La revendication de l’égalité par une mobilisation non violente dans les années 50 et 60. Un martyr nommé Martin Luther King, Jr en 1968. Une évolution lente – mais progressive – des mentalités et des réglementations.
Assurément, le grain de blé tombé en terre porte aujourd’hui des fruits mûrs. Atlanta, capitale de l’Etat de Géorgie dans le grand sud jadis esclavagiste, n’hésite pas à donner du concret au rêve (I have a dream) de l’un de ses illustres enfants. Clichés d’une visite guidée dans certaines familles habitant Atlanta. Vicky, blanche à la cinquantaine entamée, vit seule dans un quartier de la ville. La famille immédiate de cette spécialiste de l’immobilier est constituée d’un chat et surtout d’un enfant noir du voisinage. La maman du jeune voisin de Vicky n’en est pas inquiète. Puisqu’elle a fait la connaissance de Vicky, et les deux familles s’apprécient énormément.

Otha est une africaine américaine, originaire du Missouri. Après ses études et les premiers boulots à Oklahoma, elle s’est établie à Atlanta. Elle y exerce comme professionnel de l’immobilier. Sa demeure est une uvre d’art, reflet d’une ouverture d’esprit patiemment cultivée à la suite de ses nombreux voyages à l’étranger. Otha, maman d’un garçon de trente-cinq ans, mène une existence paisible dans l’un des quartiers de la capitale de la Géorgie. Après un début d’année difficile, son activité se porte assez bien depuis que les banques américaines ont décidé de racheter les logements abandonnés par des clients insolvables. Elle envisage, en bonne citoyenne du monde, de reprendre son bâton de pèlerin pour compléter sa connaissance du continent africain. Le Cameroun figure parmi ses prochaines destinations. Le continent de ses racines profondes.
Du rêve de Martin Luther King Jr à la réalité. américaine
Le rêve américain de Martin Luther King Junior est également perceptible sur le plan économique. Atlanta est le c ur commercial et financier de la Géorgie. C’est aussi un centre majeur pour les communications, les transports et la distribution de la région Sud Est des Etats – Unis. Des multinationales parmi les plus prestigieuses, Coca Cola et Cnn entre autres, y ont leur siège. La ville offre par conséquent des opportunités d’affaires et de travail aux personnes méritantes d’origines diverses. C’est le cas de Jenny, hollandaise installée à Atlanta depuis treize ans. Elle n’a pas vu le temps passer dans cette ville ô combien accueillante et hospitalière. Venue pour un contrat de travail de deux ans, elle a pris goût à la vie et à l’environnement de travail d’Atlanta.
Les moins costauds dans le business ne sont pas oubliés. Une cité commerciale souterraine, opportunément baptisée Underground, donne la possibilité aux petits commerces de faire de bonnes affaires. Underground est un monde à part, où la vie ne s’arrête jamais. Après la fermeture obligatoire des commerces à 21 heures, les snacks et boîtes de nuit ouvrent leurs portes sur le même site. La fête commence à 22 heures pour s’achever au petit matin. Coin chaud et toujours embouteillé. Le voisinage des campus universitaires ne facilite pas toujours la tâche à la police. La ville offre d’autres attractions intéressantes : le centre Peachtree, le bâtiment le plus haut d’Atlanta, considéré comme le c ur de la ville moderne.

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La face invisible
On s’en doute, tout n’est pas rose à Atlanta. En effet, le rêve de Martin Luther King tarde à se concrétiser pour ces personnes incapables de manger à leur faim. On en trouve dans les coins de rue ou devant les issues de magasins et de supermarchés. Ils sont généralement des noirs. Ils font la manche. Sans honte. Avec un argument presque imparable : « I’m hungry », j’ai faim. Comment ne pas prêter une oreille attentive à une personne dans un besoin aussi vital qu’élémentaire? Comment ne pas interroger sur les moyens mis en uvre pour voler au secours des nécessiteux ? Les clochards courent également les rues. Mal famés, ils suscitent parfois la crainte chez ceux qui ont dépassé ce type de problème. Ces laisser – pour comptes sont de tous les âges ; ils sont la mauvaise conscience d’une ville et d’un système qui prétendent pourtant mettre l’individu au c ur de toutes politiques.
Les préoccupations sociales et humanitaires de la cité sont pourtant affirmées, à travers des institutions comme le Centre Jimmy Carter. Le trente – neuvième président des Etats- Unis d’Amérique y a en effet établi depuis 1982 le quartier général de l’organisation non gouvernementale qui porte son nom. Trois principaux domaines d’intervention intéressent le Centre Jimmy Carter : la paix dans le monde ; la démocratie et les droits de l’homme ; la santé. A Atlanta, le Centre Carter emploie en moyenne 125 personnes. Son budget annuel fluctue entre 120 et 130 millions de dollars. Les programmes du Centre Jimmy Carter se veulent orientés vers des projets concrets, afin d’impacter immédiatement sur la vie des populations cibles.
Atlanta payera sa dette à l’Afrique
Le continent africain a beaucoup apporté à l’Afrique. A Atlanta, on cite par exemple l’arbitrage décisif de l’Afrique dans le choix de la ville des jeux Olympiques de 1996. Grâce à la mobilisation concertée de toutes les forces vives de l’Etat de Géorgie – et particulièrement des africains américains -, Atlanta fit le plein des suffrages africains. Pour l’Etat de Géorgie, ce soutien africain est une dette à rembourser. Et déjà des actes concrets sont posés au niveau universitaire. L’université d’Etat de Géorgie, à travers le Franklin college of arts and sciences, enseigne vingt-une langues africaines. En l’occurrence le Swahili, le Yoruba et le Zulu. 150 étudiants y suivent un cursus académique plafonné par une certification en études africaines et une licence en langue et littératures africaines. L’université d’Etat de Géorgie emploie treize enseignants africains. C’est le chiffre le plus important enregistré dans les universités américaines.
La WGA, radio universitaire affiliée publique, diffuse une demi-heure démission hebdomadaire sur l’Afrique. Les rédactions les plus en vue d’Atlanta suivent le mouvement. Elles s’apprêtent par exemple à donner un écho retentissant à la première coupe du monde de football organisée en terre africaine. Pour le patron de la rédaction de Atlanta Journal-Constitution (plus grand quotidien de la ville), l’occasion est belle pour montrer l’Afrique sous un jour favorable. A CNN, on n’en pense pas moins. La chaîne internationale aux deux milliards de téléspectateurs prétend avoir anticipé sur la façon de montrer l’Afrique au reste du monde. Et de citer deux nouveaux programmes valorisant le continent : Insight to Africa et African Voices. Une meilleure image de l’Afrique. Ce serait bien une autre réconciliation. Celle de l’Afrique avec elle-même. Celle du continent avec le reste du monde. On n’évoquera plus le grand malentendu – réel ou supposé- entre le continent et les africains américains. A la suite de Otha, les africains américains pourront définitivement découvrir la terre de leurs ancêtres. « C’est très important car les africains américains sont ignorants de leurs origines et de l’histoire y relative; ce qui peut laisser libre cours à toutes sortes d’interprétations ou de malentendus », argumente-t- elle. Le rêve américain de Martin Luther King se réaliserait alors en Afrique.
