Un rapport de l’ONU détaille « les viols » subis par de « jeunes garçons affamés et sans-abris » par des troupes françaises en République centrafricaine
Intitulé « La violence sexuelle sur les enfants par les forces armées internationales », un rapport de l’ONU détaille « les viols » subis par de « jeunes garçons affamés et sans-abris » par des troupes françaises.
Le rapport était censé rester confidentiel. Mais parce qu’il jugeait que l’ONU n’engageait pas les moyens qu’il fallait pour agir, Anders Kompas a décidé de le transférer aux autorités françaises. Pour avoir fait cela, il a été suspendu, révèle le « Guardian » mercredi 29 avril.
Que contient ce rapport de si confidentiel? Les détails de l’exploitation sexuelle d’enfants par des troupes françaises stationnées en Centrafrique dans le cadre de leur mission de maintien de la paix, la Minusca.
Contacté par « l’Obs », le ministère de la Défense et l’état-major des armées n’ont pas répondu à nos demandes d’informations.
Le ministère de la Justice a confirmé mercredi à l’agence Reuters que le parquet de Paris avait ouvert le 31 juillet 2014 une enquête préliminaire portant sur ces accusations après avoir pris connaissance du rapport des Nations unies.
Des actes sexuels contre de la nourriture ou de l’argent
Intitulé « La violence sexuelle sur les enfants par les forces armées internationales », le rapport est estampillé « confidentiel » sur chacune de ses pages, écrit le « Guardian ». Il détaille « les viols et les sodomies » subis par de « jeunes garçons affamés et sans-abris » par des troupes de maintien de la paix françaises, « qui étaient censées les protéger », dans un centre de réfugiés à Bangui, capitale de la Centrafrique.
Selon le quotidien britannique, qui dit avoir consulté le rapport, les cas d’abus sexuels auraient été commis entre décembre 2013 et juin 2014.
Des entretiens avec les enfants maltraités ont été réalisés entre mai et juin 2014 par un membre du Haut-Commissariat aux droits de l’homme et un spécialiste de l’Unicef. Selon le « Guardian », les enfants identifiés et interviewés ne représentent qu’un aperçu du nombre potentiel de victimes.
Les enfants, pour la plupart des garçons, décrivent lors de leurs entretiens les circonstances des abus sexuels qu’ils ont subis, en échange de nourriture et d’argent. Le « Guardian » cite l’exemple d’un garçon de 11 ans qui affirme avoir été abusé quand il est allé à la recherche de nourriture.
Un autre enfant de neuf ans décrit l’agression sexuelle qu’il a subi avec son ami par deux soldats français au camp de réfugiés à l’aéroport de M’Poko de Bangui quand ils s’étaient présentés à un poste de contrôle pour trouver à manger. Le rapport pointe, selon le « Guardian », l’état de détresse de l’enfant pendant son témoignage. Le jeune garçon, terrorisé, aurait fui le camp après l’agression.
Vers « une querelle diplomatique majeure »?
Le rapport avait été commandé par le bureau du haut-commissaire de l’ONU pour les droits de l’homme, à la suite de rumeurs d’abus dans le camp de M’Poko.
Anders Kompass est directeur des opérations de terrain au Haut-Commissariat de l’ONU pour les droits de l’homme, basé à Genève. Il est accusé d’avoir fait fuiter un document confidentiel et d’avoir court-circuité sa hiérarchie.
Selon le « Guardian », le cas d’Anders Kompass, qui est de nationalité suédoise, menace « de déclencher une querelle diplomatique majeure ».
L’ambassadeur de Suède aux Nations Unies aurait mis en garde les hauts fonctionnaires de l’ONU. Selon lui, cela ne serait pas une bonne chose « que le haut-commissaire aux droits de l’homme force » Anders Kompass à démissionner. Selon le « Guardian », l’ambassadeur aurait même menacé de révéler au grand jour l’affaire.
