La crise est une occasion pour l’Afrique de faire promotion du rôle que ses valeurs pourraient jouer dans l’amélioration de la situation
Au moment ou les principales capitales occidentales ont officiellement reconnu l’état de crise financière et qu’elles admettent progressivement l’idée d’une crise économique d’envergure internationale, des dirigeants africains se sont rendus à Brettons Wood pour exhorter les bailleurs de fonds à ne pas abandonner l’Afrique. Dans l’opinion publique africaine certains se sont bien interrogés sur la démarche de leurs dirigeants. Il était clair que dans les pays occidentaux les concertations étaient d’avantage pour s’expliquer sur le choix que les uns et les autres prendraient, chacun tirant la couverture de son coté. Alors on peut valablement s’interroger si dans cette situation l’Afrique ne peut s’en sortir qu’avec l’aide extérieure. Assurément pour beaucoup d’économistes africains ayant fait le choix de l’ouverture, il est grand temps pour l’Afrique de cesser de s’accrocher sur des principes et des solutions qui ont montré leur limites. Les solutions de privatisations des entreprises y ont eu des conséquences sociales dramatiques. Et aujourd’hui on voit des Etats ultra capitalistes procéder à des interventions directes pour soutenir leurs économies.
L’analyse est toute simple : comment l’Afrique peut-elle continuer de croire à des personnes qui visiblement l’ont trompée ? A la première vraie crise qu’ils ont affrontée depuis plus 70 ans les Etats occidentaux ont tous versé dans un interventionnisme à coup de centaines de milliards de dollars, solution qui a été gentiment déconseillée à l’Afrique qui affronte une crise permanente depuis près de 30 ans. Pour beaucoup d’hommes politiques africains les choses devraient changer. En maitrisant mieux les causes de la crise que traverse son économie, l’Afrique a les moyens de traverser cette crise sans trop grands dommages, et même de s’améliorer.
L’idée selon laquelle le sous développement en Afrique est tributaire de deux principales causes structurelles est de plus en plus admise au sein de l’élite des économistes de l’Afrique. On peut ainsi déterminer deux causes de cette nature. D’une part la déstructuration de la personnalité des Noirs suite aux traumatismes engendrés par l’esclavage et la colonisation en est une. Le problème identitaire est important en Afrique, et ce n’est pas une simple vue de l’esprit. A l’intérieur comme à l’extérieur, on développe des complexes d’infériorité, une absence de conscience historique, le manque de confiance et de foi en soi qui conduisent les populations à la soumission et à la dépendance. Un exemple illustratif de la différence à laquelle peut conduire cette donnée est l’exemple chinois. Classée à la même enseigne que l’Afrique il y a trente ans, la Chine est aujourd’hui une puissante machine économique. L’exercice sans partage du pouvoir par les dirigeants et les élites africaines vient compléter ces freins qui continuent de freiner l’Afrique dans ses objectifs de relance. La seconde cause du sous-développement en Afrique d’autre part relève bien évidement du modèle de développement imposé par l’Occident au continent, notamment au travers de toutes les mesures d’ajustement structurel et de programmes économiques avec entre autre la dénaturation de l’aide publique au développement qui sert plus à financer des grands groupe occidentaux, l’imposition de pratiques commerciales discriminatoires, la survivance des structures maintenant le continent dans une totale dépendance etc….
A partir de ce constat, plusieurs solutions sont envisagées pour un développement autonome de l’Afrique axé sur le renforcement des coopérations régionales, la restauration de l’autorité de l’État dans la formulation des politiques économiques et sociales, la rupture avec le paternalisme occidental et les politiques néolibérales prônées par les institutions de Brettons Woods (FMI et Banque mondiale) qui par ailleurs ont montré leurs limites. Cependant, à tout programme économique on devrait renforcer les valeurs éducatives en vue d’une transformation radicale des mentalités, une restructuration de la personnalité de l’homme noir, une modernisation des sociétés africaines et une révision de la conception de l’exercice du pouvoir. D’un autre coté les divisions et l’absence d’intégration régionale et sous régionale sont les facteurs quantitatifs d’arriération des pays. La recherche d’unité a buté jusqu’ici sur l’absence de motivation réelle et de volonté politique de la part des dirigeants africains et sur l’interférence permanente des anciennes puissances tutélaires. Cette absence d’unité est encore plus limitant dans un contexte de mondialisation où la richesse des nations se fonde sur leur capacité à produire et à exporter des biens manufacturés et à attirer des investissements. Dans une telle configuration économique, les pays doivent mettre en place des stratégies qui donnent une priorité absolue au développement économique intégré, de préférence dans un cadre régional pour bénéficier des avantages de la mondialisation tout en maîtrisant ses forces déstabilisatrices. C’est une condition préalable pour se prémunir contre les implications dévastatrices tout au marché et échapper aux conditions inéquitables qui caractérisent les échanges internationaux.
L’environnement économique africain est favorable à une révision radicale des stratégies de développement, sachant que les conditions requises pour une industrialisation florissante sont remplies. Tout d’abord on y retrouve des taux de profits élevés : c’est en Afrique, selon le Bureau d’analyse économique du Département d’Etat des Etats-Unis, que l’on réalise les meilleurs taux de profit. Ensuite la sécurité des investissements : elle se mesure à la solvabilité des débiteurs. Les débiteurs africains ont toujours été considérés comme les bons élèves des institutions de Brettons Woods. A l’exception de ceux en proie à des guerres civiles, ils n’ont jamais manqué à leurs engagements. De même de plus en plus l’Afrique bénéficie d’une main-d’ uvre qualifiée qui ne manque pas. En témoin la fuite des cerveaux : 23 000 universitaires et 50 000 cadres supérieurs et intermédiaires africains s’exilent tous les ans dans les pays occidentaux, selon l’organisation internationale pour les migrations. Enfin et on ne le dira jamais assez l’existence avérée d’énormes réserves d’énergies renouvelables : solaire, hydraulique, éolien. Et une population qui possède les moyennes d’âge les plus jeune du monde
Pour adopter une telle stratégie de développement, l’Afrique doit s’affranchir de l’ostracisme financier dans lequel l’Occident l’a cantonnée en la privant, aux indépendances, d’accès aux marchés des capitaux. Pour ce faire, on pourrait selon Sanou MBAYE économiste et écrivain sénégalais construire des organisations panafricaines des producteurs-exportateurs de matières premières, bâtie sur le modèle de l’OPEP. Ceci pour réguler les cours des matières premières ; rompre avec le néo-libéralisme ; pourvoir les pays des ressources financières nécessaires à leur développement, à la construction et au fonctionnement de leur unité politique, économique, et monétaire.