Le politologue revient sur les récentes élections et explique la différence entre le Sénat et l’Assemblée Nationale
Quelle lecture faites-vous des dernières élections sénatoriales au Cameroun ?
Les dernières élections sénatoriales sont venues mettre en place des institutions qui étaient prévues depuis 1996. Elles sont venues combler une longue attente, mais cela s’est passé dans les conditions controversées puisque le collège électoral chargé de voter les 70 des 100 électeurs était constitué sur la base de conseillers municipaux dont le mandat normal était parvenu à expiation et n’existait plus que par l’effet d’un acte de prolongation qui a suscité de vives controverses politiques, animés par le président du SDF la chairman NI John Fru Ndi et le président du MRC Maurice Kamto. Après quoi, le processus de sélection des listes pour les sénatoriales a fait des gorges chaudes notamment dans le RDPC où un certain nombre de prétendants ont été éliminés et où les sélections ont été essentiellement opérées par le haut. Ensuite le processus de validation des listes par Elecam, puis par la Cour Suprême faisant office de Conseil Constitutionnel qui a eu à disqualifier un certain nombre de listes. Au final, les élections sénatoriales ont conduit à une configuration nettement dominée par le RDPC qui a obtenu par la voie élective 56 sénateurs et le SDF 14. Avec les 30 sénateurs nommés, le RDPC a conforté son empire sur une assemblée dont le président Biya a profité pour nommer des sénateurs venant d’un certain nombre de formations politiques qui n’avait pas pu se présenter au cours de cette élection.
Quelle est la différence fondamentale qui existe entre le Sénat et l’Assemblé Nationale ?
Le Sénat est un organe complémentaire dans notre processus législatif. Cela veut dire qu’il partage le pouvoir de faire les lois et de contrôler l’action gouvernementale avec l’Assemblée nationale. Mais il joue un rôle qui est essentiellement un rôle d’accompagnement et d’appui. L’Assemblée nationale reste en position dominante dans ce processus de production de la loi. Celui-ci est enrichi et complexifié par la lecture que le Sénat peut faire d’un certain nombre de projets de texte.
Les Sénateurs élus et nommés ont-ils selon vous le calibre nécessaire pour mener à bien leur mission ?
Est-ce qu’ils ont le calibre ? Cela n’apparait nettement pas dans un certain nombre de cas. D’autres personnalités ayant eu une expérience politico administrative apparaissent comme des gens qui ont le profil de l’emploi. D’autres ayant une certaine présence et les appareils politiques depuis longtemps font également partis de ceux qui apparaissent comme ayant le profil. Mais on a également des acteurs dont le poids même local n’était pas évident, les acteurs qui en fait sont des miraculés parce qu’ils ont bénéficié essentiellement de la disqualification des listes concurrentes pour pouvoir figurer dans ce Sénat. Il y a en fait des sénateurs qui ne sont là que par la volonté du président de la République qui a choisi de les nommer au sénat. On verra dans la manière dont le Sénat va effectivement s’employer. Si c’est un sénat qui a une certaine envergure, on a un Sénat qui exprime bien les orientations et les tendances politiques telles qu’elles sont construites dans les collectivités territoriales décentralisées dont le Sénat est censé être l’émanation.
Quelle est la place du Sénateurs suppléant ?
En fait, le sénateur suppléant a essentiellement un rôle honorifique. Il n’est pas au premier plan parce que se sont les sénateurs titulaires qui vont figurer dans la chambre Haute. Maintenant, au cas où il y aurait des situations de suppléance, c’est peut-être à ce moment que certains de ces sénateurs là auront un rôle à jouer.
Les 30 nommés, comment se fera la remplacement en cas de besoin ?
Pour les sénateurs nommés, puisqu’on a fait correspondre à chaque nommé un suppléant, la logique voudrait qu’un sénateur qui ne pourrait plus s’occuper de sa charge, soit remplacé par le suppléant qui lui a été associé dans le décret de nomination.

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