Originaire du Cameroun et installée dans la commune de Conflans en banlieue parisienne, elle a décidé de s’engager au service de sa communauté. Et le fait bien.
Elisabeth MPeck est assistante d’éducation dans un lycée professionnel et grand-mère à tout juste 51 ans. Mais le plus étonnant chez cette dame est son parcours, qui l’a mené à être depuis 2008 conseillère municipale à Conflans Sainte Honorine, ville située dans le nord des Yvelines, en banlieue Ouest de Paris. Elisabeth Mpeck est née à Eséka dans une famille polygame dont la mère était la seconde femme de son père. Elle grandit Bonamouang Akwa Nord avec ses s urs et frères. Elle y fait son école primaire et le collège à Déïdo. En 1965, ses parents partent pour la France et la jeune fille et ses frères sont contraints de vivre avec les grands-parents maternels. Elle découvre que sa grand-mère est une militante de l’Union des Populations du Cameroun (UPC); cette dernière lui raconte l’histoire et les horreurs de la décolonisation car, ses grands-parents avaient perdu tous leurs biens. Trois ans plus tard son père rentre au Cameroun. Il est séparé de sa mère. Elle grandit dans une famille aisée et reçoit une éducation mixte (africaine et européenne) mais ne finit pas son cursus au lycée à cause de sa première grossesse. Elle se mariera en 1983 avant de divorcer une dizaine d’années plus tard. Elle est aujourd’hui veuve de son second mari dont elle s’occupe des deux enfants en plus de ses trois enfants. Ils sont son bonheur. Dès son arrivée en France 1983, elle reprend ses études via le C.N.E.D (Centre National d’Enseignement à Distance), obtient son brevet des collèges en 1984 et à 44 ans passe son BTS.
En 1984 son ex-mari est envoyé en Guinée-Bissau où elle découvre la misère et surtout l’incapacité des gouvernants à contenir cette misère: Les gens marchaient nus, cela m’a donné l’élan, ce fut un déclic, j’ai eu envie de faire des choses. Avec une famille néerlandaise, nous ramenions lors de nos vacances annuelles en Europe, du lait, des biberons, et des produits de soins de première nécessité, comme les antiseptiques, des pansements, et autres. J’apprenais aux mères à donner le biberon à leurs enfants. Sa fibre sociale se réveille et son combat politique commence à prendre forme. Un évènement va nourrir cet engagement politique: Son ex-mari lui avait parlé de son premier vote, socialiste, à l’élection présidentielle de 1981 avec la victoire de François Mitterrand. De retour en France après plusieurs séjours dans les pays tels que le Mozambique, le Zimbabwe, et l’Afrique du Sud en passant par l’Afrique de l’Ouest, Elisabeth décide de rentrer en politique. Son admiration pour François Mitterand la pousse à prendre la carte du parti socialiste. Dès cet instant elle commence à participer aux manifestations, meetings et autres réunions socialistes. Pour elle le parti socialiste incarne la démocratie, la justice sociale, la solidarité, et la laïcité mais aussi le féminisme.
« Je crois que nous, les immigrés, devront nous impliquer davantage en politique »
Domiciliée à Conflans-Sainte-Honorine, Le maire sortant et réélu Philippe Esnol lui demande d’intégrer son équipe. Elle est élue conseillère municipale au Centre Communal d’Action Sociale (CCAS). Notre rôle c’est l’écoute, le soutien et l’accompagnement des personnes en difficultés sociales dont des personnes âgées et les handicapées. Vu son parcours, pour elle cet engagement est tout à fait naturel et, selon elle, c’est sa grand-mère qui lui a inculqué le combat politique. Cette fibre politique vient d’elle. Elle lui parlait beaucoup de décolonisation, de ses convictions et des valeurs démocratiques. Nous avons des enfants nés dans en France qui sont à la fois africains et français. Par conséquent nous avons le devoir de leur montrer le chemin. Il faut qu’ils comprennent qu’ils font partie de ce pays à part entière. Je crois qu’une femme peut apporter quelque chose en politique et que nous, les immigrés, devons nous impliquer davantage. La France a une grande histoire avec ses colonies, donc nous avons un grand rôle à jouer dans la société française actuelle. Les parents immigrés, toujours selon Elisabeth, doivent montrer au préalable l’importance de leur rôle à jouer en France à leur enfants, souvent en quête d’identité (français à part entière mais aussi africains), c’est même un devoir. D’ailleurs le lycée où elle travaille est composé de beaucoup de jeunes issus de l’immigration. Comme elle le dit en parlant de sa profession, il est lié à mon engagement politique. Je suis assistance d’éducation dans un lycée professionnel. Les lycéens sont majoritairement issus de l’immigration, avec beaucoup de difficultés familiales et sociales et aussi des questionnements identitaires. Le grand regret d’Elisabeth est sans doute le peu d’engagement des autres Camerounais et des immigrés de manière globale – Pourtant nombreux dans sa commune – dans la vie politique en France.
