Les lions, le TKC, l’affaire Mbia, Jean Lambert Nang, la Fécafoot… Lisez!
De passage en France, Essomba Eyenga, l’un des vice-présidents de la fécafoot a commenté l’actualité du Cameroun
Monsieur Essomba Eyenga depuis le moi de Mai dernier, vous occupez désormais le poste haut placé de vice-président de la Fécafoot. Comment avez vous réagi à cette nomination ?
Vous savez, après avoir longuement fait mes preuves comme président de club mais également comme administrateur de la Fécafoot puisqu’en réalité j’en étais jusqu’alors le doyen des administrateurs. A ce titre, je dois dire que c’est une joie immense d’appartenir au gotha des personnalités les plus influentes du football Camerounais. En plus d’être une consécration, cette nomination fait également figure d’une charge, car si le président Iya m’accorde ainsi sa confiance, c’est bien la preuve qu’il sait ce dont je suis capable: je me dois en retour de me donner pleinement à cette mission, pour mériter la confiance qui m’est faite.
On se souvient pourtant qu’il y a quelques années que vous n’étiez pas très favorable au président Iya Mohammed, dont vous critiquiez la gestion au sein de la Fécafoot. Comment se fait il qu’aujourd’hui vous ayez accepté cette fonction de vice-président et donc collaborateur direct?
Vous savez, en tant que doyen des administrateurs, j’ai toujours appartenu à l’équipe dirigeante, mais comprenez néanmoins qu’il y a des moments où vous pouvez avoir des divergences sur la manière de faire. Si à un certain moment, j’ai cru normal d’attirer l’attention du président Iya sur un certain nombre de dysfonctionnements, ce n’était pas dans mon intention de faire la guerre au président Iya mais uniquement contre ces dysfonctionnements. Le président Iya l’a d’ailleurs très rapidement compris et c’est pourquoi des dispositions allant dans le sens de nos doléances ont été prises. Nous sommes aujourd’hui en parfaite harmonie, le président et moi. Notre souci commun aujourd’hui, demeure le devenir du football Camerounais et nous tâcherons de nous en occuper de manière responsable.
Avez-vous a priori une idée de ce que vous pourriez être amené à changer au plus vite?
Nous avons un problème au niveau des jeunes. Outre mon état de santé, leur situation constitue une des raisons de ma présence en France. En effet, j’ai profité de ce voyage pour me rendre au Nord de la France muni d’un mandat de la fédération, afin de pouvoir discuter avec un certain nombre de clubs de cette région des conditions d’amélioration de l’entrée des jeunes dans le football Camerounais et ce par le biais du professionnalisme , point d’arc de notre action. L’entrée du football Camerounais dans le professionnalisme est d’autant plus importante qu’elle permettra un meilleur suivi de nos jeunes et ainsi de régénérer notre football en préparant la relève. Ce professionnalisme débutera la saison prochaine sur la base d’études menées de concert avec de nombreux clubs, qui comme vous le savez, m’ont maintenu leur confiance en m’octroyant le poste de Président de l’Association des Clubs de 1ère division professionnelle.
A propos de rajeunissement de notre football, il y en a eu du côté des Lions Indomptables grâce notamment à l’arrivée de jeunes talents tels que Chedjou ou Nkoulou lors du dernier match, mais également sur le banc avec l’arrivée du jeune (45 ans) technicien français Paul le Guen. Que pensez vous de ce dernier?
Le choix de PLG émane du comité d’urgence dont je suis membre, et je dois dire que dans la situation qui est la nôtre il m’apparaît on ne peut plus judicieux.Nous avons mal débuté ces éliminatoires mais aujourd’hui, le mot ordre est de rattraper les points perdus et pour cela il fallait réinstaurer la paix. La paix entre les joueurs, entre le ministère et la fédération sous l’impulsion du nouveau ministre Zoah qui a clairement compris que la Fédération est une association privée sous la tutelle du ministère des sports, qui en cette qualité, gère tous les sports.Nous avons des obligations envers le ministère, dont nous dépendons. Mais nous ne serons jamais un département du ministère et cela, le ministre Zoah l’a bien compris: ce qui me fait dire qu’ il n’y aura plus jamais de problème entre la fédération et le ministère. Aujourd’hui, la seule orientation possible pour le football Camerounais est celle de la qualification pour le mondial Sud-Africain, car il serait impensable que le Cameroun soit absent au premier Mondial se jouant en terre Africaine, lorsque l’on sait la contribution qui fut sienne dans le football Africain. Si l’Afrique est là où elle est aujourd’hui, sur le plan footballistique, c’est d’abord grâce au Cameroun.
A la suite du départ d’Otto Pfister en mai dernier, la fédération a décidé de la nomination de Thomas NKONO comme intérimaire pour combler la vacance du poste de sélectionneur. Avec le recul aujourd’hui, pensez-vous qu’il aurait dû accepter cette mission ?
Sincèrement, si j’avais été à sa place, j’aurais refusé cette offre car dès le départ, il n’avait pas véritablement à sa disposition les moyens de mener à bien cette mission. Par ailleurs, je pense que ce n’était pas qu’une simple question de changer un coach pour un autre, mais qu’il fallait revoir les problèmes à la base. Sa nomination en catimini le montre bien, puisqu’aucun document officiel ne faisait état de ce mandat qui lui était confié. Je pense que l’on a voulu parer au plus pressé et l’histoire du collectif d’entraineurs aura certainement été plus dommageable qu’autre chose, en l’absence de chef! A la place de Thomas, j’aurais refusé ce poste parce que le véritable problème est que tant que nous continuerons à prendre les entraineurs Camerounais pour des moins que rien, nous n’avancerons pas. Aujourd’hui, nous avons sélectionné Le Guen, et c’est bien. Mais demain, il faudra penser que des Camerounais peuvent être capables de diriger l’équipe nationale aussi naturellement que l’on trouve toujours des Camerounais aptes à occuper les ministères, directions ou même la Présidence de manière satisfaisante. J’ai toujours pensé qu’il y avait des entraineurs Camerounais aptes à diriger cette sélection nationale, et même si certains me le reprocheront, je vous confie qu’un garçon comme Joseph Antoine Bell, pour peu qu’il cesse de croire qu’il faille qu’on vienne le chercher, s’il décidait de se mettre au service de son pays, avec son charisme, son franc-parler et ses résultats il pourrait réaliser de belles choses . Au moment où nous voulions des entraineurs Camerounais, je lui avais demandé de soumettre sa candidature. Mais bon, je ne sais pas pourquoi présenter une candidature gêne quelqu’un.
Des garçons comme Omam [Biyik] ont également de la valeur, mais bon je suis tout de même gêné qu’il dise que des gens de la Fédération ne veulent vraisemblablement pas des anciennes gloires à ce poste. Je pense que ces anciens ne gênent personne, et ont même leur rôle à jouer s’ils le désirent. Je ne vois pas pourquoi nous ne voudrions pas des anciens lorsqu’il y a pourtant du travail. S’il y a des gens qui veulent travailler, qu’ils viennent et laissent mourir ces préjugés selon lesquels les gens de la Fédération ne voudraient pas que les choses changent etc.Il y a de la place pour tout le monde, d’ailleurs vous pensez que le président Iya et ses 32 collaborateurs pourraient à eux seuls s’occuper du Football Camerounais? Nous sommes prêts à créer des commissions, mais nous ne les cèderons pas à des gens qui habitent au Mexique ou même dans des coins dont on ignore la localisation: qu’ils viennent donc au Cameroun travailler !
Pourriez vous nous expliquer la nuance entre le comité d’urgence et le comité de stratégie récemment mis en place?
Le comité de stratégie regroupe quelques membres du comité exécutif de la Fécafoot et des représentants du ministère. Néanmoins, je ne pense pas que notre qualification proviendra de ce seul comité mais sera d’abord le fait des joueurs. Je pense fermement que nous nous qualifierons, mais que ce sera alors le seul fait des joueurs et du sélectionneur, et ensuite l’environnement (ministère, fédération, peuple Camerounais). Je suis de ceux qui pensent comme De Gaulle, que « lorsque l’on veut noyer le poisson il suffit de créer beaucoup de commissions ». Le comité d’urgence pour sa part est une émanation du comité exécutif de la fédération. Il est composé de dix membres dont le président, six vice-présidents et trois conseillers. C’est une instance qui est fonctionnelle depuis les grandes réformes de la fédération, à l’image de ce qui existe à la FIFA. C’est un peu le bureau exécutif de la fédération.
Pensez vous que le baptême de feu réussi des Lions Indomptables sous l’ère Le Guen, lors de la victoire face à l’Autriche sur le score de 2 buts à 0 est de bonne augure pour la qualification ?
Je ne suis pas triomphaliste de nature, mais j’avais annoncé à de nombreuses personnes que nous nous qualifierons. Si nous n’avions pas bénéficié du report du match, et disputé la rencontre en Juin, je n’aurais sûrement pas eu la même conviction. Mais autant je peux penser que le Seigneur nous avait frappé en 2006 avec ce penalty tiré à la dernière minute -sans que nous ne tirions d’ailleurs les leçons de cet échec- autant je pense que le peuple Camerounais et ses dirigeants ont compris que le report du match nous a été bénéfique. Je rappelle que psychologiquement et physiquement, les joueurs étaient à bout et ces deux mois offerts par la Providence leur auront permis de souffler. La victoire de Klagenfurt face à l’Autriche annonce ce qui est à venir: quelque chose de grand et comme je l’ai dit, les Camerounais doivent continuer à croire en Dieu. Il ne nous oubliera pas cette fois-ci.
Lors de son match inaugural à la tête de la sélection, Paul Le Guen a posé un acte symbolique en retirant le brassard à Rigobert Song. Votre réaction?
Je m’abstiens de juger les actes du sélectionneur national, car comme vous le savez, le ministre lui a solennellement fait comprendre lors de son intronisation au Cameroun que personne ne viendrait s’ingérer dans la gestion qu’il fera de l’équipe nationale. Nous lui avons donc donné les pleins pouvoirs, et en ma qualité de membre de la fédération, je ne peux que montrer l’exemple en lui témoignant mon soutien. Du reste, je dirais que le 1er brassard de Samuel Eto’o s’est soldé par une victoire, ce qui est appréciable.
Comment pouvez-vous résumer les dix ans de capitanat et la brillante carrière de Rigobert Song, qui est passé par le TKC dont vous étiez le dirigeant ?
C’est une très belle carrière, très grande carrière. J’ignore si le brassard lui a été définitivement retiré, car il me semble qu’il ait été blessé lors du dernier match de son club avant le stage des Lions. Rigobert est un très grand joueur, qui a eu le mérite de conserver la confiance des Camerounais au fil des ans, et je pense qu’en récompense de tout cela, le Cameroun lui offrira surement une participation en Coupe du Monde car il le mérite.

Concernant votre actualité brûlante, il est à noter que vous avez récemment présidé au Cameroun une commission concernant l’affaire entre les clubs Aigle et Danay. Un mot sur ce dossier ?
C’est une commission d’enquête et vous savez que la personne indiquée pour se constituer principal ampliateur de notre rapport sera le président de la fédération.Vous comprendrez donc qu’à ce jour, il m’est interdit de rendre public le contenu de ce rapport. Néanmoins, retenez que c’est un signal fort qu’a voulu envoyer le président Iya à l’endroit d’éventuels fraudeurs qui pourrait se résumer à un refus systématique de tolérer des agissements contraires à l’éthique sportive.
Justement, l’affaire Mbia qui met aux prises les sieurs Gilbert Kadji (président de KSA), François Ngoumou (président de Pyramide de Mfou) et Elamè Mikado est en ce moment sous le feu des projecteurs. Que vous inspire cette affaire ?
Je ne connais pas l’affaire Mbia, mais je suppose que la rixe tourne autour de l’indemnité de formation et de la prime de solidarité compte tenu du fait que le joueur n’a pas encore célébré ses 23 ans. Pour ma part, ce que je crois, au risque de me tromper, c’est que Mbia a joué pour Pyramides dans sa jeunesse et donc que Ngoumou est de ceux qui ont formé Stéphane Mbia. Qu’il ait joué pour Kadji, cela je l’ignore. Nous avons eu des affaires semblables, où dans le cas d’Emana par exemple, les gens ont fabriqué de fausses pièces, bref . Aujourd’hui, même si je crois que Pyramides a sans doute aidé à former Mbia, la question est de savoir si Pyramides existe encore ou si l’on va juste recréer ce club pour récupérer cette indemnité. Je pense également qu’il existe une dame dirigeant actuellement une structure de formation pour jeunes à Yaoundé qui a déclaré avoir formé Mbia. Bref, je crois que tout ceci est lié à l’appât du gain qu’exerce ces indemnités.
Ultime affaire à avoir défrayé la chronique, mais où cette fois-ci vous êtes directement impliqué, c’est la sortie du très polémique ouvrage de Jean Lambert Nang «Desperate Football house». Comment avez vous réagi à la sortie de ce livre où vous êtes mis en cause par l’intéressé ?
Je n’ai même pas lu ce livre, on est venu me dire que JLN a dit ceci .Je l’ai entendu à la télévision dire un certain nombre de choses mais bon j’ai décidé au final de ne pas lui répondre. Jusqu’à la semaine dernière, je voulais lui intenter un procès. Mais j’ai discuté avec des «petits frères» ici à Paris qui m’ont dit: «Grand frère, restes grand comme tu l’as toujours été, car on peut taper un chien mais cela ne l’empêchera pas d’aboyer». Si Nang est si grand, qu’il trouve du travail, sinon qu’il devienne entrepreneur, c’est tout ce que je peux lui dire. Je suis un démon au n ud papillon ? De toute façon ce n’est pas à lui de me juger, Dieu seul me jugera. Bref, concernant Nang, je n’ai vraiment rien à dire!
Vous avez quitté vos fonctions de président du club de football Tonnere Kalara Club, poste que vous occupiez pendant près de deux décennies. Si vous deviez raconter à vos petits-enfants le TKC, que leur diriez vous ?
Je leur dirais qu’en tant qu’ex-dirigeant du Tkc, j’ai tiré à la fois beaucoup de satisfaction, de joie pour cette équipe, mais également j’ai dû affronter beaucoup de haine et d’ingratitude. J’ai été déçu déçu de l’ingratitude de la part des joueurs et des supporters et c’est une des raisons de mon départ. Néanmoins, si c’était à refaire, je le referais parce qu’aider les jeunes et le Football Camerounais comme je l’ai fait était écrit dans ma vie, et je l’ai fait. Aujourd’hui je suis certes parti d’un club, mais je continue à servir le football Camerounais et Africain en ma qualité de vice-président de la Fecafoot, je suis arbitre au tribunal arbitral de Lausanne. Sur près de 242 membres on retrouve deux camerounais: je suis à mon deuxième mandat et je compte en briguer un troisième, puisque celui-ci expire en décembre 2010. Bref mon passage au Tonnerre, je ne le regrette pas, même si à un moment donné, j’ai quand même beaucoup de ressentiment.
Si vous deviez citer des joueurs qui auront marqué votre présidence, quels seraient-ils?
Vous savez ils sont nombreux! Il y en a tellement que j’en oublierais sûrement .Des joueurs comme Rigobert [Song], Mbozo, Fouda Bachot étaient de très grand joueurs. D’autres comme Nlend Paul, Ndongo Paul Gaston . Si je vais ailleurs que mon club, il y a eu des joueurs de la trempe d’Abéga, de Mbida, de Tsébo. Bref le Cameroun a eu tellement de talents alors qu’il n’y avait pourtant pas d’infrastructures. Ce sont des joueurs de cette trempe que le président Iya et moi espérons faire renaitre dans notre football d’ici deux ans. Aujourd’hui, je vous le répète, ce qui prime, c’est l’action sur les jeunes, car ce n’est pas parce que le jeune Camerounais sait déjà dribbler qu’il doit penser à s’en aller en Indonésie, en Iran, au Pakistan, ou en France …Qu’il commence par prouver ce dont il est capable sur la scène nationale. Nous avons vu ce dont était capable des joueurs tels que Milla, lui aussi un ancien du TKC, qui était un phénomène à part entière. Il faudrait donc qu’aujourd’hui nous parvenions à en ressortir des comme cela.
Il y a quelques années un projet d’élaboration d’un salon du football au Cameroun était évoqué.Où en est-il aujourd’hui ?
Ce projet me tient particulièrement à c ur depuis que j’ai eu la chance de visiter le salon GALAXY FOOT qui se tenait à Cannes, il y a 5 ans. J’ai heureusement fait depuis la rencontre de Mr Willy Alaga et d’un compatriote à Lille, Mr Nkameni Albin Michel, qui ont manifestement envie eux aussi, de réaliser ce projet. Je pense que d’ici Mars-Avril de l’année prochaine, nous parviendrons grâce à notre synergie à monter un salon du football au Cameroun, avec la participation je l’espère, de clubs de l’hexagone. C’est un projet auquel je compte bien sûr associer la fédération et le ministère, car c’est sans doute par ce genre d’action que l’on pourra faire revivre notre football.
Un dernier mot?
Que le printemps du football Camerounais entamé grâce à cette victoire des Lions à Klagenfurt puisse augurer un été réussi et ce, par le biais je l’espère d’une qualification en Coupe du Monde 2010.
