Le cinéaste camerounais dont l’annonce du film a suscité la polémique au Cameroun a ouvert ce festival burkinabè de cinéma sur les droits humains et la liberté d’expression
La 9e édition du festival de films sur les droits humains et la liberté d’expression, Ciné droit libre (du 22 au 29 juin), a débuté samedi 22 juin 2013 sur le film »Le Président » du réalisateur camerounais, Jean-Pierre Bekolo, comme projection inaugurale du Festival. Pour Luc Damiba, l’initiateur du Festival, ce thème est provocateur. »L’Afrique a une population à majorité jeune, une économie croissante, les meilleures terres cultivables mais elle reste à la traine », a-t-il souligné. »Le Président », il faut le rappeler est une fiction racontant le règne de l’actuel président camerounais et indiquant également de façon imprécise la fin de Paul Biya. Le film qui ne trouve pas d’espace de diffusion au Cameroun, raconte l’histoire »d’un président vieillissant dont le long règne a plongé son pays dans une incertitude ». En décidant d’aller dans son village, il se perd en cours de route et passe son temps à tourner à rond. Le film selon ceux qui l’ont regardé est assez emblématique de son réalisateur citoyen du monde et fervent critique de l’immobilisme, mais aussi au regard de ses acteurs principaux. Le choix des acteurs aussi est emblématique du message que pourrait cacher le film. Dans le rôle du président qui verrouille le pouvoir, Gérard Essomba, un des acteurs émérites du pays, mais surtout connu pour sa critique du système actuelle des choses. A ses côtés, on retrouvera Valséro, le « Général » autoproclamé des enfants de la liberté. Comme dans la réalité, il écrit au Président lui transmettant des jeunes de ce pays fictif. Un message qui est simple : Il est temps pour le Président de passer la main. Le film met aussi pour la première fois à l’écran, des personnes déjà connues du public camerounais pour avoir marqué chacun son secteur. Il s’agit de l’humoriste Valérie Ndongo qui joue le rôle de journaliste et de l’intellectuel Eric Mathias Owona Nguini, qui dans le film joue aussi son rôle d’éducateur des peuples et d’éveilleur des consciences.
Jean Pierre Bekolo n’en est pas à son premier essaie de cinéaste engagé. Il y a plus de 20 ans lors de la production de son film à succès « Quartier Mozart », plusieurs personnes s’étaient arrêtées sur le côté comique du film, peu de gens avaient vu la dimension sonnerie d’alerte, d’une génération qui se perd et qui n’a aucun repère. Les faits donnent aujourd’hui raison au cinéaste. La société camerounaise, c’est un taux de 5% de séropositifs dont une majorité de jeunes, c’est l’incivisme social, c’est la dépravation des m urs. Avec « Les Saignantes », il a récidivé pour décrier les travers d’une société où le sexe et le pouvoir sont des objectifs à tout prix. En 2010 lors du Festival des « Ecrans Noirs au Cameroun », il a présenté une autre uvre controversée elle aussi : « Les pieds nickelés ». Un documentaire savamment dosé d’où il ressort en substance que l’héritage colonial en Afrique francophone a été transmis aux mauvaises personnes. En Août 2012 lorsqu’il est au festival du cinéma de Locarno en Suisse il a présenté son projet « Le Président », a plusieurs producteurs qui ont décliné sa demande de financement. Monsieur Bekolo s’était alors dit désolé de voir le cinéma, le vrai, se perdre dans le dictat des chaines de télévision et des institutions, et se voir retiré son côté visionnaire. Mais la Suisse ne sera pas seulement un lieu de déception, il y rencontrera la productrice allemande du Weltfim GmbH. « Je lui ai dit ne me parlez pas si vous n’avez pas d’argent. Elle a dit combien. J’ai répondu une quantité importante, elle a rétorqué la moitié, et là nous avons commencé à discuter », peut-on lire sur son blog en réponse aux sources de financement de ce film. Difficile donc de croire que les 2 millions d’appui au cinéma du Ministère des arts aient joué un rôle majeur. Sur le contenu du film, Jean Pierre Bekolo explique. « C’est la première fois qu’un film destitue un président en fonction. Habituellement le cinéma vient toujours après pour raconter les histoires.et on se demande où était passé le cinéma avant ? Le cinéma ne doit pas arriver après, il doit prendre les devants, ouvrir de nouvelles perspectives et impulser les changements. Je ne voulais pas raconter aux gens ce qui s’est passé, je voulais inspirer les gens sur la manière dont cela peut arriver », peut-on lire dans son blog. Un film moins prononcé que celui-ci a déferlé la chronique avec l’arrestation de son réalisateur Djimeli. Pa sûr que cette production reçoivent le prix spécial du président de la république Paul Biya