Elle a lieu du 9 septembre au 9 octobre 2010
Artiste peintre, sculpteur, dessinateur hors pair., Barthélémy Toguo est l’un des rares artistes africains «reconnus» par le marché de l’art. Né en 1967 à Mbalmayo au Cameroun, Barthélémy Toguo est un produit l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux Arts d’Abidjan en Côte d’Ivoire et de l’École Supérieure d’Art de Grenoble en France. Après son passage à l’Académie de Düsseldorf en Allemagne, il va finalement s’installer à Paris. Ce qui ne l’empêche nullement d’aller et venir sans cesse entre les quatre coins de la planète depuis une dizaine d’années. Toujours entre deux avions, ce talentueux touche-à-tout est un artiste polyvalent qui aborde aussi bien la sculpture, la peinture, la vidéo ou la photo, constamment demandé de Paris, à New York en passant par Zürich entre autres. Il a d’ailleurs créé dans la région de l’Ouest-Cameroun ce qu’il appelle « Bandjoun Station », un espace de production et de création qui reçoit des artistes locaux et internationaux.
Pour sa première exposition personnelle à la Galerie Lelong à Paris, Barthélémy Toguo a créé une installation présentée sous la forme d’un théâtre invitant le spectateur à entrer sous un chapiteau fait d’immenses moustiquaires blanches, semblant tombées du ciel. Dans cette mise en scène, l’oeil se pose d’abord sur les murs blancs, attiré par de grands dessins aux titres évocateurs: « Who is the true terrorist ? », « Pollutions », « Purifications »… Ces dessins dépeignent, en couleurs diluées, des scénettes du quotidien: des corps qui à la fois jouissent et souffrent de la vie. Sur les tableaux intitulés « Your face » et « Devils Heads », c’est un homme dévastateur et auto-destructeur qui est représenté. Un homme qui, finalement, est vaincu par la nature.
Au fil du parcours, les fleurs se fanent, se dessèchent, orties et épines envahissent l’espace. La vidéo « Shame on you » nous entraîne dans un tourbillon qui célèbre la force et le pouvoir de l’eau, qui devient plus subtile et poétique dans « Tiny flower ». Au milieu de la salle, des milliers de salamandres en porcelaine, habituellement douces, mais qui dans cette représentation, mangent un nourrisson abandonné seul sur une montagne. L’ensemble du spectacle se déroule sur un sol recouvert de cartons de bananes donnant une sensation de douceur qui permet d’atténuer les souffrances de l’homme.
Cette désagrégation se termine sur un travail en forme de cartes postales avec son oeuvre « Head above Water » réalisé à Hiroshima et à Auschwitz-Birkenau, est une réflexion commencée au Kosovo, que Barthélémy Toguo a ensuite décliné dans différents pays et villes emblématiques: Lagos, Cuba, Mexico, Johannesburg, Australie. Ce qui démontre s’il en était encore besoin qu’un artiste de la trame de Barthélémy Toguo doit un être politique, constamment en éveil devant les évènements de la vie, fussent-ils déchirants ou pacifiques. Et ça, Barthélémy Toguo l’a compris, lui qui se veut être un artiste attentif aux humeurs et rumeurs du monde, car il s’en nourrit et nourrit son uvre. Il ne se contente pas seulement de faire son uvre (l’art pour l’art), mais surtout de faire uvre utile (l’art pour l’utile). Et c’est ainsi qu’à chacune de ses expositions, la parole a été donnée aux habitants pour parler librement de leur environnement, de leur situation, de leurs attentes, de leurs espoirs, sur des cartes postales illustrées qui deviennent alors autant de témoignages.