A 37 ans, il est rédacteur-en-chef à Cameroon Tribune et compte déjà une longue carrière journalistique
Atanga Tabi Yves Joël, plus connu comme Yves Atanga est une plume qu’on ne présente plus dans l’univers médiatique camerounais. Calme, posé, serein, souriant et surtout professionnellement très exigeant, ce jeune journaliste de 37 ans est rédacteur-en-chef au quotidien bilingue Cameroon Tribune. Bien qu’ayant été le plus jeune étudiant de la 27e promotion de journalisme à l’ESSTIC (1996-1999), un de ses traits de caractère fait l’unanimité auprès de ses ex collaborateurs, collaborateurs et amis : la simplicité. Pour Emile Zola Nde Tchoussi de Mutations qui l’a côtoyé dans ses premiers pas, il n’a pas changé malgré sa progression dans l’entreprise qui l’emploie en ce moment. Il est un homme bien, humble et surtout aime sa profession. Quant à feu Stéphane Tchakam, le Directeur de la rédaction de Le Jour, son grand frère pour utiliser une de ses expressions, [i YAT est un bonhomme plein d’humour, de bonne humeur, qui a toujours le mot pour rire et avec lequel vous ne vous ennuierez jamais. C’est le bonhomme sans histoire qui n’a jamais un mot plus haut que l’autre. C’est le bonhomme des bons mots, des blagues, des calembours, des tours d’esprit et concetti.
« Le benjamin féru » comme l’appelaient ses camarades de promotion pour vouloir dire qu’il était à la fois le plus jeune et aussi l’un des plus beaux fleurons selon un camarade qui avait rédigé son portrait dans un exercice scolaire, fait ses premiers pas dans le métier par les stages professionnels. En première année de formation, il commence au Poste National de la CRTV et dit-il : je suis parti de là un peu déçu parce que je trouvais que la radio c’est un peu paresseux. J’étais surtout choqué de voir un journaliste partir de son domicile le matin pour le boulot et toute la journée, il ne produit qu’un son ou un vox pop. En deuxième année, en 1998, tout zélé d’avancer vers la profession de ses rêves, il postule pour un autre stage à la CRTV, mais cette fois à la télévision juste pour découvrir confie t-il. Mais à cause d’une mésentente avec le rédacteur-en- chef de l’époque sur la date du début du stage, Yves renonce à ce stage se souvient-il encore en émettant un petit sourire. Et avec son inséparable compagnon Stéphane Tchakam (décédé le 13 août 2012, Ndlr), ils vont rédiger une demande de stage à Mutations. Ils ont été acceptés et j’avoue que là bas c’était une bonne école. Stéphane et moi avons fait un mois à cette rédaction qu’on admirait. Toutefois, j’ai été un tout petit peu déçu encore parce que vu de l’extérieur, je pensais qu’il y avait beaucoup de rigueur. Mais une personne m’avait positivement marqué, Haman Mana qui était le Rédacteur-en-chef et Directeur de publication en même temps. Je me souviens encore de ce jour, alors que j’allais à pied à la rédaction, il m’a aperçu en plein centre ville et a garé son véhicule pour me faire une remarque corrective sur un article que j’avais commis. Et l’apprenant de l’époque se souvient que son tout premier papier avait été publié dans le dossier qui paraissait le lundi et dont le titre était : « Les noms-dits de Ngoa-Ekellé » en rapport avec les noms des mini-cités de l’Université de Yaoundé I. Tout souriant, il se rappelle également que cet article avait été apprécié par Alain Blaise Batongué, coordonnateur de la rédaction. Stéphane et moi étions très vite adaptés et là, très vite adoptés aussi. Malheureusement, la période du stage était arrivée à sa fin, mais la rédaction avait gardé le contact avec nous. Quelques mois après, Haman Mana nous a appelé pour participer à la rédaction du supplément des Ecrans Noirs sous la houlette de Serges Alain Godon, le responsable de la rubrique Culture. Et finalement le 15 novembre 1999, le jour de sa soutenance qui sanctionne la fin de la période d’apprentissage à l’Esstic, à sa sortie de la salle, tout content et soulagé à la fois, il rencontre Haman Mana qui lui dit d’un ton blagueur en lui montrant le doigt : Atanga, il faut venir commencer la travail lundi. A ce moment, Mutations s’apprêtait à passer tri-hebdomadaire, et le jeune journaliste mis à l’essai est affecté à la rubrique Economie. La période d’essai était de trois mois, mais un mois seulement plus tard, j’ai été confirmé et mon salaire était de 100.000Fcfa moins 30.000Fcfa de frais mensuel de reportage et 2000Fcfa pour la Mutuelle. Je reconnais que je ne travaillais pas pour de l’argent d’abord, toutefois, j’avoue que c’était un bon cadre pour exercer le métier. J’étais très enthousiaste, je m’appliquais sur mes textes et je travaillais particulièrement mes titres. Faisant partie de la dernière promotion à être intégrée à la fonction publique camerounaise, le jeune fonctionnaire avait désormais l’obligation d’être au ministère de la Communication : mais je n’avais pas de problème à concilier les deux boulots dit-il.
A la création à Mutations du poste de secrétaire de rédaction assistant avec rang de chef de rubrique, Yves n’a pas hésité à embrasser son rêve. Comme a confié Stéphane Tchakam : il avait une vraie prédilection et une réelle passion pour le secrétariat de rédaction (SR). Et il était sans doute le meilleur. Mais en un an et demi seulement d’exercice, Yves Atanga a eu des prises de bec avec ses collègues qui ne supportaient pas qu’on retouche leur article même quand la faute venait de l’édition précise t-il. Ne supportant plus les injures qui se multipliaient j’ai alors compris que le métier de SR est ingrat. J’ai perdu ma motivation du fait des reproches et du manque du terrain. Quelques temps après, Mutations a connu une réorganisation et il est devenu le chef de la rubrique Economie. Et c’est à la période où Mutations passait quotidien qu’il a reçu la proposition de travail à la Sopecam. C’est finalement en mars 2002 qu’il commence officiellement dans sa nouvelle structure. L’un des meilleurs souvenirs qu’il garde de son ancienne rédaction c’est le journal satirique « Imitations » qu’il avait crée. Un journal interne à la rédaction qui passait au peigne fin la vie de l’entreprise et celle des employés.
Arrivé à Cameroon Tribune, j’avais le même désir, bien faire tout ce que j’ai à faire. Affecté au service Culture et Société, la promotion ne s’est pas fait attendre. En 2003, il est nommé chef service Société à ma grande surprise confie t-il. Les premiers jours je me demandais comment je vais tenir. Et j’ai eu la chance qu’à l’époque, il y eu un rajeunissement de la rédaction et cela m’a permis de reconstituer mon équipe. Il y a passé huit années et la hiérarchie lui a demandé de commencer à rédiger le «Coup de griff» ce qu’il a fait avec très peu d’assurance au début. A ma grande surprise encore, je suis affecté au service politique que je détestais. Et juste quelques temps après, l’homme qui a fait ses preuves est nommé Rédacteur-en-chef de Cameroon Tribune. J’ai mal accueilli la nouvelle sur le coup comme toutes mes nominations d’ailleurs. A la lecture du communiqué au Poste National de la CRTV, Yves s’en souvient encore bien: j’ai mis mon téléphone sur vibreur pour ne pas décrocher les nombreux coups de fils et je suis allé me coucher. Ce n’est qu’autour de 20h que je suis revenu en moi et j’ai commencé à prendre certains appels. Mais honnêtement dit le REC: je n’ai pas fais ce métier pour les postes, parce que je suis reporter et les postes m’éloignent un peu du terrain. Et je pense aussi à ma petite famille que je ne vois pratiquement pas. J’estime qu’elle se sacrifie énormément pour moi du fait de mon absence. Aujourd’hui, je ne me prends pas la tête, je ne prends pas mon poste comme un truc prestigieux. Pour moi, le plus important c’est d’informer les gens, écrire dans un style convivial. A la question de savoir son secret, M. Atanga confie que c’est de la chance et Dieu aussi. Sans oublier la discipline et la rigueur personnelle.
Ce père de deux paires de jumeaux né d’une famille de quatre enfants est passionné de musique. D’ailleurs son tout premier salaire lui avait permis de s’acheter une chaîne musicale. Pendant ses heures de loisirs, très rares, il est à la maison auprès de sa compagne et de ses enfants. Et pour rigoler comme il aime bien le faire, Stéphane Tchakam s’était souvenu d’ une anecdote parmi 1 000 pour vous montrer comme Yves Atanga peut être drôle et espiègle. A une époque, à Cameroon Tribune, nous formions un trio avec Osvalde Lewat, notre camarade et amie. Une fois, cette dernière gagne un prix pendant des awards organisés par Sévérin Tchounkeu. Elle ramène son trophée chez elle et, manque de pot, le trophée tombe et se brise. Yves et moi lui rendons visite et elle nous raconte l’histoire. Et Yves, pince sans rire, de balancer « bien mal acquis ne profite vraiment jamais ». Nous étions morts de rire.