Le film produit par le réalisateur Jean Pierre Bekolo Obama, pourrait être interdit de diffusion au Cameroun tant les similitudes sont annoncées grandes avec la réalité locale
Selon le journal Le Messager du 13 Mars 2013, la ministre des arts et de la culture aurait reçu une demande d’explication sur la contribution de son département administratif, dans la production du film intitulé « Le Président, comment sait-on qu’il est temps de partir ? » Ce film à la lisière de la fiction et surtout du documentaire, revient avec de nombreuses similitudes sur la situation de longévité au pouvoir tel que vécu au Cameroun par exemple, où le président est au commande depuis 32 ans, ayant lui-même succédé à un dirigeant qui avait passé 22 ans au pouvoir. Le choix des acteurs aussi est emblématique du message que pourrait cacher le film. Dans le rôle du président qui verrouille le pouvoir, Gérard Essomba, un des acteurs émérites du pays, mais surtout connu pour sa critique du système actuelle des choses. A ses côtés, on retrouvera Valséro, le « Général » autoproclamé des enfants de la liberté. Comme dans la réalité, il écrit au Président lui transmettant des jeunes de ce pays fictif. Un message qui est simple : Il est temps pour le Président de passer la main. Le film met aussi pour la première fois à l’écran, des personnes déjà connues du public camerounais pour avoir marqué chacun son secteur. Il s’agit de l’humoriste Valérie Ndongo qui joue le rôle de journaliste et de l’intellectuel Eric Mathias Owona Nguini, qui dans le film joue aussi son rôle d’éducateur des peuples et d’éveilleur des consciences. Jean Pierre Bekolo n’en est pas à son premier essaie de cinéaste engagé. Il y a plus de 20 ans lors de la production de son film à succès « Quartier Mozart », plusieurs personnes s’étaient arrêtées sur le côté comique du film, peu de gens avaient vu la dimension sonnerie d’alerte, d’une génération qui se perd et qui n’a aucun repère. Les faits donnent aujourd’hui raison au cinéaste. La société camerounaise, c’est un taux de 5% de séropositifs dont une majorité de jeunes, c’est l’incivisme social, c’est la dépravation des m urs.
Avec « Les Saignantes », il a récidivé pour décrier les travers d’une société où le sexe et le pouvoir sont des objectifs à tout prix. En 2010 lors du Festival des « Ecrans Noirs au Cameroun », il a présenté une autre uvre controversée elle aussi : « Les pieds nickelés ». Un documentaire savamment dosé d’où il ressort en substance que l’héritage colonial en Afrique francophone a été transmis aux mauvaises personnes. En Août 2012 lorsqu’il est au festival du cinéma de Locarno en Suisse il a présenté son projet « Le Président », a plusieurs producteurs qui ont décliné sa demande de financement. Monsieur Bekolo s’était alors dit désolé de voir le cinéma, le vrai, se perdre dans le dictat des chaines de télévision et des institutions, et se voir retiré son côté visionnaire. Mais la Suisse ne sera pas seulement un lieu de déception, il y rencontrera la productrice allemande du Weltfim GmbH. « Je lui ai dit ne me parlez pas si vous n’avez pas d’argent. Elle a dit combien. J’ai répondu une quantité importante, elle a rétorqué la moitié, et là nous avons commencé à discuter », peut-on lire sur son blog en réponse aux sources de financement de ce film. Difficile donc de croire que les 2 millions d’appui au cinéma du Ministère des arts aient joué un rôle majeur. Sur le contenu du film, Jean Pierre Bekolo explique. « C’est la première fois qu’un film destitue un président en fonction. Habituellement le cinéma vient toujours après pour raconter les histoires.et on se demande où était passé le cinéma avant ? Le cinéma ne doit pas arriver après, il doit prendre les devants, ouvrir de nouvelles perspectives et impulser les changements. Je ne voulais pas raconter aux gens ce qui s’est passé, je voulais inspirer les gens sur la manière dont cela peut arriver », peut-on lire dans son blog. La grande question est de savoir si le gouvernement laissera passer le film. Une contre publicité, sera une publicité gratuite pour un film que tout le monde voudrait voir, des plus jeunes aux plus âgés, casting oblige. Pour Jean Pierre Bekolo, aucun état d’âme. « On demande toujours aux cinéastes de rester à leur place, mais dans un pays comme le nôtre quelle est cette place ? »