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La CPI condamne Jean-Pierre Bemba à 18 ans de prison

Mardi 21 juin 2016, l'ancien vice-président congolais a été reconnu coupable de «crimes contre l'humanité» et «crimes de guerre» Reconnu…

Mardi 21 juin 2016, l’ancien vice-président congolais a été reconnu coupable de «crimes contre l’humanité» et «crimes de guerre»

Reconnu coupable de « crimes contre l’humanité » et de « crimes de guerre », l’ancien vice-président congolais Jean-Pierre Bemba a été condamné, mardi 21 juin 2016, à dix-huit ans de prison par la Cour pénale internationale (CPI). Le procureur avait requis « vingt-cinq ans au moins », contre le vice-président de la République démocratique du Congo (RDC), mais il n’a pas encore décidé s’il ferait appel, a dit Jean-Jacques Badibanga, qui a conduit le procès pour l’accusation.

« Notre demande était de vingt-cinq ans parce que nous étions conscients de la souffrance des victimes, parce que nous pensions aussi que les supérieurs hiérarchiques ont un rôle tout particulier, qui doit être mis en avant dans les jugements et que leur responsabilité est plus élevée que celle des troupes qu’ils commandent ». Mais « dix-huit ans de prison c’est une peine sérieuse », souligne-t-il.

Coupable en tant que chef militaire
Il y a trois mois, Jean-Pierre Bemba avait été reconnu coupable de « crimes contre l’humanité » et « crimes de guerre » en qualité de chef militaire du Mouvement pour la libération du Congo (MLC), parti politique qu’il avait créé en 1998. Le sénateur congolais n’était néanmoins pas poursuivi pour avoir ordonné ces crimes, mais pour ne pas les avoir punis ou empêchés. A lui la responsabilité, à ses soldats l’exécution. En 2002 et 2003, envoyé soutenir le régime centrafricain d’Ange-Félix Patassé, alors en proie à une rébellion conduite par le général François Bozizé, le bataillon de quinze cents hommes du MLC avait commis des meurtres, des viols et des pillages. Pour les juges de La Haye, « l’inaction » de Jean-Pierre Bemba « visait délibérément à encourager l’attaque contre la population civile ».

Les trois juges, trois femmes, ont souligné que les viols, les meurtres et les pillages avaient été perpétrés avec « une cruauté particulière », retenant cela comme une circonstance aggravante. La présidente de la chambre, Sylvia Steiner, a rappelé que les victimes avaient subi des viols collectifs, souvent sur la place publique. Saluant la décision, la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), qui avait été particulièrement active en 2005 lorsque les autorités centrafricaines avaient demandé à la cour d’enquêter, espère que « la sentence sera un avertissement à tous les autres commandants » qui laissent leurs soldats brutaliser des civils.

Seul Bemba a été ciblé par la cour
Le procès laisse néanmoins en suspens de larges pans de l’histoire de la guerre civile centrafricaine de 2002-2003. Seul Jean-Pierre Bemba a été ciblé par la CPI. Ni le président centrafricain déchu Ange-Félix Patassé, ni son successeur auréolé d’un coup d’Etat victorieux, François Bozizé, n’ont été inquiétés par la cour, pas plus que les milices impliquées dans les crimes. Ce n’est pas la première fois qu’un supérieur hiérarchique est condamné par la justice internationale. D’autres ont été jugés, dont notamment l’ancien président du Liberia Charles Taylor, condamné à cinquante ans de prison par le Tribunal spécial pour la Sierra Leone.

Jean-Pierre Bemba n’en a pas fini avec la CPI. Ses avocats ont annoncé qu’il ferait appel du verdict, et la procédure pourrait encore prendre plusieurs mois. Il est par ailleurs poursuivi pour avoir corrompu des témoins au cours de son procès. Dans cette seconde affaire, dans laquelle il risque jusqu’à cinq ans de prison, le verdict est toujours attendu.

Ambitions politiques
En entendant sa peine, Jean-Pierre Bemba ne s’est pas manifesté. Il y a trois mois, lors du prononcé du verdict, le sénateur congolais était apparu particulièrement abattu. Ce jugement met en suspens pour longtemps des ambitions politiques qu’il n’a jamais cachées. En prison, Jean-Pierre Bemba suit de près la vie politique congolaise et avait tenté de se présenter à la présidentielle de 2011.

Mais les juges avaient refusé de lui accorder une libération provisoire pour qu’il puisse déposer sa candidature à Kinshasa, même s’il assurait à la cour le faire à moindres frais, en utilisant son avion personnel. A quelques mois de la présidentielle en République démocratique du Congo, prévue en décembre, et alors que l’opposition au président Joseph Kabila tente de montrer un front uni, Jean-Pierre Bemba semble désormais bel et bien hors-jeu.

Jean-Pierre Bemba.
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