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L’élection présidentielle au Gabon ou le nouvel échec cuisant de la Françafrique

Par Michel Lobé Etamé, journaliste Nous avons tous dénoncé, sans retenue, les élections présidentielles étriquées en Afrique francophone. Les maquillages…

Par Michel Lobé Etamé, journaliste

Nous avons tous dénoncé, sans retenue, les élections présidentielles étriquées en Afrique francophone. Les maquillages et tripatouillages de la Françafrique ne surprennent plus personne. Résignée, l’Afrique francophone ne s’en remet plus qu’à ses heures glorieuses où les combattants de l’indépendance osaient braver le pouvoir colonial.

Nous avons dénoncé avec vigueur ces héritiers qui succèdent à leurs pères. Nous avons eu droit au Togo à Eyadema fils, au Gabon à Ali Bongo fils et en République Démocratique à Kabila fils. Ces rejetons, avec la complicité de l’ancien pouvoir colonial, continuent à régner. Le monde Occidental, si attaché à la démocratie, a couvert de ses mains moites ces régimes décriés.

Nous ne pouvons donc cautionner la victoire d’Ali Bongo au Gabon. Cependant, cette victoire est un moindre mal quand on sait que les médias français et le pouvoir colonial ont soutenu son malheureux adversaire Jean Ping qui est un pur produit du clan Bongo et de la Françafrique.

La victoire d’Ali Bongo est un échec cuisant de plus pour la Françafrique. Après les échecs successifs au Bénin et en République du Congo, la Françafrique vient de subir un nouveau revers au Gabon. Le parti socialiste a pris fait et cause pour Jean Ping. Avec sa discrétion habituelle, le gouvernement français n’a pas résisté à la neutralité qui s’imposait. Son penchant pour « l’opposant » Jean Ping a heurté les sensibilités africaines qui y voyaient une ingérence insoutenable et éhontée.

Un jeu de dupes
Les gabonais ne se sont pas laissés abuser par ce nouveau jeu de dupes. Ils savent que le linge sale se lave en famille et que les deux compères en présence avaient des intérêts communs : préserver l’héritage de feu Omar Bongo. Une fois encore, c’est le peuple gabonais qui a bu la tasse. Une tasse salée depuis l’indépendance où le peuple n’a jamais imposé son choix.

La position de la France et de l’Union Européennes est surprenante. Elles demandent un nouveau décomptage des voix. Nous ne pouvons oublier qu’en Côte d’Ivoire, le président Laurent Gbagbo avait aussi demandé un nouveau décomptage des voix et que la France s’y était fermement opposée. Y-a-t-il ici deux poids, deux mesures ? L’Onu, garante de la souveraineté des états s’était aussi opposée au décomptage des voix proposé par Laurent Gbagbo.

La position de la France et de l’Union Européenne n’est pas neutre. Elle traduit un malaise face à un changement structurel, économique et social d’une Afrique qui veut se prendre en main. Dans quelques mois, le même scénario va se reproduire en République Démocratique du Congo où le rejeton Kabila n’est pas disposé à s’effacer de la scène politique. Nous aurons droit, comme d’habitude, à quelques échauffourées d’une population désespérée car les mêmes causes produisent les mêmes effets.

« Le courage politique d’Ali Bongo »
La chute du prix du pétrole a vu les économies africaines subir des soubresauts. Les pouvoirs en place n’ont pas su diversifier leurs économies. Aujourd’hui, le Nigeria connaît une récession qui provoque des drames sociaux dont les conséquences sont imprévisibles. Dans une moindre mesure, le Gabon, la République du Congo et le Cameroun ont du mal à relancer leurs économies.

C’est dans ce contexte qu’Ali Bongo a choisi de diversifier ses partenaires économiques pour lancer une nouvelle dynamique dans un pays habitué à consommer plutôt qu’à produire. Reconnaissons à Ali Bongo le courage de diversifier ses partenaires économiques. Un choix politique qui passe mal chez ses anciens mentors de la Françafrique. Mais, de nos jours, peut-on imaginer un pays souverain avec un seul partenaire ?

Toute la politique de la Françafrique, si destructrice à l’Afrique, doit être remise en cause. Les anciens colons ont toujours de nombreuses complicités sur place. Elles s’activent toujours lors des appels d’offres, des choix économiques et politiques.

Si l’Afrique veut entrer dans la modernité, elle doit pouvoir choisir librement ses partenaires économiques et nouer des relations avec le reste du monde. Ne nous apprend-t-on pas qu’il ne faut pas mettre tous les ufs dans un même panier ?


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