Sous le couvert d’une réunion de concertation, il a dicté la volonté du gouvernement
Assiste-t-on au début d’une nouvelle discorde entre le secteur privée et l’Etat au Cameroun? La question ainsi posée semble trouver une réponse affirmative. La rencontre entre le ministre des finances et les partenaires privés impliqués a laissé planer une ombre de mécontentement. La question objet de la discussion est celle portant instauration d’une vignette sur certains produits locaux et importés. la vignette est un outil de traçabilité et d’identification qui va permettre de contrôler l’origine de tous les produits distribués sur le marché camerounais tout en servant de source de recette pour le trésor public. Selon le Ministre des finances, cette vignette va aider à lutter contre la contrebande et la contrefaçon. Le tabac, l’alcool et les médicaments sont pour le moment concernés par cette mesure. Le ministre a parlé d’une vielle pratique dans certains pays, laquelle leur a permis d’avoir une certaine traçabilité. Il s’agit donc selon ses propos de maîtriser le marché. Pour les produits de consommation concernés par cette première phase, il s’agit d’une question de santé publique. Tout comme, indique le ministre des Finances, il ne s’agit pas d’une mesure d’urgence commandée pour le renflouement du trésor public. Le prix de cette vignette étant marginale : entre 4 et 5 francs Cfa. La mesure qui devrait être applicable au deuxième semestre de l’année budgétaire en cours sera assortie d’une sanction pouvant aller jusqu’à la destruction des produits objets de la contravention.
Les opérateurs concernés par la mesure ne sont pas tous satisfaits de l’intervention du ministre. Bien que ce dernier s’en soit défendu, il apparaît clairement que la mesure intervient juste après que le gouvernement ait reconnu des risques de déficit budgétaire cette année. Ne pouvant pas rentrer dans une session de modification de la loi de finance qui serait trop complexe et trop onéreuse, le ministère des finances aurait certainement fait rejaillir cette disposition qui avait déjà laissé entrevoir la difficulté de son application. Au-delà des reproches, les opérateurs font observer que les délais qui leur sont donnés pour se mettre en conformité avec la mesure sont très courts, alors même qu’elle entraînera des investissement importants pour se faire installer le système d’étiquetage. De même la mise en uvre de la mesure pour certaines structures devra impliquer des effets sur le conditionnement. Le ministre a balayé les préoccupations d’un revers de main. A une des préoccupation il a reprécisé : Prenez toutes les dispositions nécessaires, parce que si les équipes de contrôles retrouvent vos marchandises sur le marché sans étiquettes elles seront saisies.
Le gouvernement a officiellement annoncé l’effectivité de l’impact de la crise économique mondiale sur le Cameroun, et la nécessité de mesures urgentes pour la relance de son économie. La surprise est donc réelle lorsque l’Etat débute par une augmentation des taxes. Les conséquences n’énumèrent. Augmentation des charges à l’importation ou à la production, augmentation du coût chez les consommateurs, baisse de la consommation, faillites des petits producteurs et avec elles des licenciements et des crises sociales majeures. Les autres critiques apportées à la solution du ministre trouvent leur fondement dans les raisons qui justifient la mesure. Le ministre a évoqué le souci de recettes de l’Etat vraie. Mais le souci de santé publique convainc moins bien. Il est vrai que l’alcool le tabac et les médicaments présentent des risques majeurs d’atteinte à la santé publique, mais en réalité pourquoi ces produits et pas les autres ? La crise du lait chinois récemment vécue dans le monde n’avait trait ni à la boisson ni à l’alcool. De même en ce qui concerne l’alcool et le tabac, les contrefaçons existantes dans le monde touchent en général la protection du label ou de la fiscalité mais pas vraiment la santé car au Cameroun une cigarette étiquetée pourrait tuer autant qu’une cigarette non étiquetée.
La vérité est que les trois produits visés sont pour le moment ceux dont la consommation est restée stable lorsqu’elle ne s’est pas accrue. les analystes se sont demandés enfin si pour les produits d’importation il faudra aussi étiqueter alors même que certains de ces produit sont commercialisés par des producteur internationaux et nationaux à la réputation irréprochable comme par exemple la Centrale d’approvisionnement en Médicaments Essentiels (CENAME). Enfin la remarque est faite quant au fait que les sanctions assorties ne sont pas prévues par la loi, et la proposition du ministre de détruire les produits non étiquetés est anticonstitutionnelle. D’une part on ne règle pas tout avec les ordonnances, et d’autre part les questions relatives aux finances publiques et aux sanctions relèvent en temps normal de la loi.
La mesure s’appliquera à coup sûr, mais loin d’être une solution elle risque de constituer un risque majeur d’une nouvelle inflation surtout si elle se généralise, ce dont l’économie du Cameroun n’a absolument pas besoin.