Le journaliste gabonais Jean pascal Ndong Obiang parle du climat actuel à Libreville
Voilà plusieurs jours que votre président Omar Bongo a décidé de suspendre provisoirement sa fonction de chef d’Etat et a profité pour aller en Espagne faire un bilan de santé, selon la présidence gabonaise. Cette nouvelle s’est alors propagé comme une traînée de poudre, et depuis, l’on suppute sur l’état de santé réel de votre président. Quel est le climat qui règne actuellement à Libreville?
Ecoutez, tout se passe bien à Libreville, et on ne prépare aucune succession. Il y a toute une procédure, le Gabon est un Etat de droit, un Etat démocratique. Nous avons une loi fondamentale, la constitution qui codifie toutes ces situations. Au Gabon, nous n’avons pas de problème, on ne parle même pas actuellement de l’éventualité d’un nouveau président. C’est vrai le débat sur la succession est là, même si le président de la République n’avait pas interrompu momentanément ses activités, c’est un débat qui existe depuis des années. Qui sera après Bongo ? C’est un débat qui est là. Mais de façon purement pratique et ponctuelle, nous n’en sommes pas là par ce qu’il y a tout un tas d’étapes à traverser. Pour qu’il y ait une vacance de pouvoir, il faut que cela soit constaté par la cour constitutionnelle qui est la plus haute juridiction de l’Etat. La vacance constatée, nous avons deux chambres au parlement au Gabon : l’assemblée nationale et le sénat. Le président du sénat en cas de vacances, assure l’intérim de la présidence de la République et dispose d’un certain délai pour organiser une élection présidentielle. La procédure est celle-là, et il n’y a pas une autre procédure qui va être fabriquée séante tenante par ce qu’on voudrait mettre X ou Y. Non, nous ne sommes pas un Etat anarchique ou encore une république bananière.
Quel est votre regard de journaliste gabonais sur le traitement de cette information à l’échelon international?
Sur le plan international, chacun est libre d’apprécier à sa juste valeur, la communauté internationale est libre de penser comme elle veut, de faire des schémas qu’elle veut, mais moi en tant que gabonais, je pense qu’il faut être prudent par rapport à la qualité des informations émanant de la presse internationale.
C’est-à-dire?
Ecoutez, ce n’est pas un secret pour vous. Il y a déjà un problème de fond qui est posé. Vous savez qu’il y a des organisations non gouvernementales (ONG) internationales qui ont porté plainte contre les chefs d’Etat de la sous région entre autre le président du Gabon, celui du Congo Brazzaville et celui de la Guinée Equatoriale. Alors, il y a comme une transposition situationnelle entre tout ce qui s’est dit autour de ce débat lié aux présumés biens mal acquis par ces chefs d’Etat, et la situation du président Bongo aujourd’hui. Il a décidé d’interrompre momentanément ses activités à la suite du choc émotionnel causé par le décès de sa femme. Donc, il y a toute une transposition de situation, il y a beaucoup de non dits, et face à cela, il faut vraiment être prudent et modéré.
Prudence, modération, mais, c’est la première fois que votre président prend officiellement une telle décision. Reconnaissez quand même qu’il y là de quoi surprendre voire inquiéter plus d’un quant à la suite?
Bien sûr que le peuple est inquiet, c’est un peuple qui est très attaché à son chef d’Etat et cela a été prouvé dernièrement lors du décès de l’épouse de ce dernier. C’est tout le peuple gabonais qui est allé rendre hommage à la première dame. L’inquiétude demeure, surtout que le président de la République n’a jamais habitué le peuple à la situation actuelle. Je peux même vous dire qu’en 40 ans, c’est la première fois qu’on annonce officiellement que le président va se reposer et suspendre momentanément ses activités. Il lui arrive de prendre des petits moments de repos, mais qui n’excèdent pas la durée constatée maintenant. Donc, il y a une inquiétude en toile de fond, et le souci aussi bien du peuple que de la classe politique toute tendance confondue, même les opposants, c’est de revoir le président rentrer dans les meilleurs délais en pleine forme pour, évidemment, reprendre ses activités.
