Le nouveau président s’est dit favorable à un gouvernement d’union nationale
Lundi 6 décembre, le nouveau président guinéen Alpha Condé s’est dit favorable à la mise en place d’un gouvernement d’union nationale qui regroupe toutes les composantes de la nation, mais qui ne soit pas une coalition de partis, dans un entretien accordé à Radio France International (RFI). Quand je dis gouvernement d’union nationale, cela veut dire que toutes les composantes de la Guinée doivent se retrouver dans ce gouvernement, que ce soient les composantes régionales ou les forces vives, que ce soient les partis, les syndicats ou la société civile, a déclaré l’opposant historique devenu président de la Guinée. La Cour suprême ayant confirmé vendredi 3 décembre la victoire à la présidentielle d’Alpha Condé, opposant historique de 72 ans, face à Cellou Dalein Diallo, ancien Premier ministre. N’ayant jamais participé à aucun pouvoir en place, Alpha Condé a été victime de la répression du régime dictatorial d’Ahmed Sékou Touré (1958-1984) et des régimes militaires qui ont suivi depuis lors.
Le nouveau président s’est dit déterminé à réformer l’armée, avec l’ambition de rendre à l’armée sa dignité en améliorant les conditions de vie des militaires et en les formant au respect des personnes et des biens. Il prévoit de faire participer l’armée à la relance de l’économie, qui passera avant tout par de grands projets agricoles. Avec une politique basée sur la réconciliation, le tissu social qui est déchiré va être recousu, a enfin estimé le nouveau président, qui a plusieurs fois plaidé pour la mise en place d’une conférence vérité-réconciliation afin que les guinéens se disent les vérités sur les crimes commis tout au long de l’histoire de la Guinée indépendante, soit depuis plus d’un demi-siècle. Il est temps de nous unir pour faire face aux nombreux défis auxquels est confronté le pays, a déclaré Alpha Condé. Cela ne sera possible que dans une atmosphère de calme et avec la coopération de tous les guinéens, a-t-il ajouté. Au nombre de ces défis, figurent la fin des rivalités ethniques entre Peuls et Malinkés, l’exploitation rationnelle des minerais, notamment celle de la bauxite (dont la Guinée détient deux tiers des réserves mondiales), de l’or, du diamant, du pétrole et de l’uranium, la lutte contre la pauvreté et l’analphabétisme, la mécanisation de l’agriculture, l’industrialisation moderne, l’amélioration des soins de santé, la construction de grandes infrastructures de communication, et sans oublier la restauration de l’autorité de l’état par des institutions stables et démocratiques. Autres défis majeurs, Alpha Condé devra travailler durement pour faire jouer à la Guinée un rôle prépondérant au sein de la Communauté économique des états de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) et d’autres organisations internationales. En d’autres termes, la Guinée sous Alpha Condé doit caresser le rêve de participer avec dignité à la mondialisation économique qui s’impose à tous les pays de la planète.
L’élection d’Alpha Condé est considérée comme la première élection démocratique organisée depuis cinquante-deux ans dans ce pays de l’Afrique de l’ouest. Né le 4 mars 1938 à Boké, en Guinée maritime, Alpha Condé est issu de l’ethnie malinké, majoritairement installée dans l’est du pays. Il part en France à 15 ans pour y poursuivre ses études et y obtient des diplômes en économie, en droit et en sociologie. Il va ensuite enseigner à la prestigieuse université parisienne de la Sorbonne. Il a à son actif politique la qualité d’avoir affronté toutes les dictatures de la Guinée. Ce qui justifie son long exil dans le vieux continent et l’emprisonnement dans sa Guinée natale. Il a dirigé dans les années 1960 la Fédération des étudiants d’Afrique noire en France (FEANF) et animé des mouvements d’opposition au régime dictatorial d’Ahmed Sékou Touré, père de l’indépendance de la Guinée, ex-colonie française qui a acquis sa souveraineté en 1958. Sékou Touré condamne Alpha Condé à mort par contumace en 1970. Il rentre au pays en 1991, sept ans après la mort de Sékou Touré. Au dictateur a succédé un caporal autoritaire, Lansana Conté, qui a dû accepter une timide démocratisation permettant à Alpha Condé de se présenter à la présidentielle en 1993, puis en 1998. L’élection du professeur Alpha Condé à la présidence est considérée comme l’aboutissement heureux du processus électoral en Guinée.
