Par Shanda Tonme
1 -Depuis deux ans, nous étions mobilisés par plusieurs sources sur des pratiques managériales peu orthodoxes instaurées à la Commission nationale anti corruption par ses dirigeants. Ces pratiques allaient des dépenses exorbitantes de fonctionnement, des recrutements sectaires, des séminaires et autres activités de pure distraction de fonds, des salaires et indemnités scandaleux, une mauvaise interprétation des missions de l’institution, à une arrogance de ses membres à diverses occasions.
2 – Par exemple lors de la présentation du rapport annuel, le président fait attendre les ambassadeurs et les membres du gouvernement, impose ou s’octroie une solennité digne de chef d’Etat. Les membres du corps diplomatique ont souvent dénoncé en sourdine cette boulimie et d’autres ont souvent quitté précipitamment les lieux en signe de vexation, pendant que d’autres encore s’épargnaient ce spectacle en renonçant à honorer l’invitation.
3 – Les rapports de la CONAC en la forme, sont pitoyables, de très mauvaise fabrication et impression, alors que la SOPECAM aurait pu s’en occuper pour un meilleur produit. Il est probable que l’affaire est un marché dans le genre biaisé, pour aider une relation. Pire encore, on nous fait savoir, en pleine salle, qu’il faut remercier tel ambassade, pour avoir financé l’impression du rapport, une injure de trop à notre pays, car nous ne manquons par l’argent pour une telle bricole. De qui tiennent-ils l’autorisation d’aller quémander pour si peu?
4 – En dépit de tous ces travers, nous avions maintenu des relations de travail avec la CONAC, par souci d’associer et d’unir les forces, dans un élan exemplaire de patriotisme pour combattre les fléaux de la corruption et des atteintes à la fortune publique.
5 – Au fur et à mesure que la CONAC a évolué, les maux suscités se sont aggravés, transformant la maison en une autre caverne d’Ali baba où les abus administratifs et fautes de gestion, sont les mêmes qui écrasent le peuple camerounais partout, ruinent la réputation internationale du pays et découragent les investisseurs locaux et étrangers.
6 – Depuis deux mois, il es apparu au grand jour, que dans le cadre des missions permanentes de contrôle et de vérification de la gestion des organismes publics, effectués par qui de droit avec les pouvoirs règlementaires à cet effet, les citoyens et citoyennes camerounais ont été exposés à la réalité de la galaxie malfaisante de la CONAC.
7 – Le 26 juin 2014, usant d’un droit de réponse qui n’en n’est pas un, et qui dénote au contraire la panique, la honte et la désolation, monsieur le président de la CONAC a ameuté la presse pour une conférence de presse, doublée d’un autre exercice où des liasses de billets sont distribuées à des rédactions pour porter immanquablement et correctement la bonne nouvelle au public. « LA CONAC CONTRE ATTAQUE ». Combien a coûté cette manchette ?
8 – La Commission indépendante contre la corruption et la discrimination qui a pris connaissance de la substance des déclarations du président de la CONAC, observe avec peine, pitié, colère et révolte,
-Que le président de la CONAC ne réfute pas les faits de mauvaise gestion et d’atteinte à la fortune publique.
-Que le président de la CONAC informe l’opinion publique, qu’il a reçu mandat du chef de l’Etat pour se donner à lui et à ses collaborateurs, les salaires et indemnités qui leur plaisent, en toute discrétion, en toute liberté et en toute souveraineté.
-Que le président de la CONAC confirme implicitement qu’il a un salaire mensuel de 7.000.000 (sept millions) de Fracs CFA.
-Que le président de la CONAC se réfugie derrière des exemples pris ailleurs, fallacieusement, pour justifier un intolérable gaspillage, le vol de l’argent public sous le couvert de protection contre d’imaginaires tentations. « On abuse aussi dans tel ou tel pays, et c’est pourquoi j’abuse aussi ici. Mon salaire est grand pour m’empêcher de voler ou d’être corrompu, sinon je vais me lâcher et m’offrir en prostitution ». Une véritable démonstration par l’absurde, pire qu’un argumentaire de déséquilibré.
9 – La Commission indépendante rappelle que monsieur Massi Gam’s touche un autre salaire pas loin de 2.000.000 (deux millions) de Francs CFA à Elécam dont il est membre, et un autre presque du même montant à la Commission nationale des droits de l’Homme, dont il est aussi membre, le tout majoré des indemnités et libéralités multiples partout. Dieu est-il au courant? En tout cas nous au COMICODI, nous le sommes.
10 – La Commission indépendante contre la corruption et la discrimination considère comme un crime intolérable, une telle facilité d’appropriation de l’argent public, au moment où des enseignants sortis de l’école normale sont sans salaires, où des professeurs d’université et des médecins touchent à peine 300.000 (trois cent mille) Francs CFA et ont du mal à assumer leur rôle et statut social, où il manque de l’alcool et des compresses dans les hôpitaux, où des milliers de familles vivent avec moins de 1000 (mille) Francs CFA par jour.
11 – Voici un haut citoyen pétri semble-t-il de spiritualité, nanti de la confiance du chef de l’Etat, qui s’ouvre un boulevard de dépenses et de traitements, sans se soucier du niveau de vie de ses compatriotes, au nom de la lutte d’une corruption qui n’a fait que s’épandre et se porte plutôt mieux avec la CONAC. Avez-vous un c ur et une dignité, monsieur le président de la CONAC, sinon avez-vous pitié de votre pays, de tout ce qui se dit de lui dehors?
12 – La Commission rappelle que la CONAC n’a pas une mission de police ni de justice ni d’inquisition et d’intrigues. La mission de la CONAC c’est la prévention, par la formation, l’information et la sensibilisation de l’opinion ? Le reste relève d’une boulimie qui a conduit le pays au bord de l’anarchie caractérisée par la liberté pour chaque bénéficiaire d’un décret du chef de l’Etat, de s’octroyer des pouvoirs exorbitants au plan administratif et budgétaire, de se faire suivre par un gendarme ou un policier qui porte son sac, arrange son fauteuil, gère les rendez-vous avec ses maîtresses, va chercher son billet de première classe à Air France, et intimide ses visiteurs, amis et membres de famille. On retrouve tout cela à la CONAC, institution où les citoyens espéraient voir régner l’humilité.
13 – La Commission indépendante contre la corruption et la discrimination s’élève contre les man uvres de diversion en cours, sous l’impulsion de certains réseaux de presse bien payés, qui voudraient tromper l’opinion en parlant tantôt de guerre entre des organismes, tantôt de dénigrement commandée, tantôt de jalousie, le tout en associant des noms de personnalités.
14 – La Commission élève une protestation énergique contre la gestion scandaleuse de la CONAC, ainsi que de tous les autres organismes crées précipitamment, dans le cadre de la lutte contre les fléaux de la corruption, du blanchiment d’argent et des violations des droits de l’homme. Ces choses ont aggravé les maux et contribué à enrichir des individus sans foi ni loi. Il est urgent de les dissoudre.
15 – La Commission estime que le président de la CONAC, homme d’église se trouve dans une situation bien plus inconfortable, laquelle non seulement lui enlève toute crédibilité pour continuer dans ses fonctions, mais également lui impose de demander pardon aux Camerounais et de présenter sa démission au chef de l’Etat.
16 – Il faut que la honte commence à tuer chez nous. Il n’y avait pas lieu de donner une conférence de presse face à des fautes aussi graves, et face à une dérive morale et éthique aussi cruelle. Hélas, parce que chacun sous nos cieux, y compris les ministres du culte, ne réfèrent plus à la morale, à la peur de la sanction et au risque de l’opprobre, il a osé, exactement comme un ministre en fonction accusé de détournement et inculpé, qui s’apprête à apposer sa signature teintée de souillures, sur les diplômes d’innocents gamins.
17 – La Commission indépendante contre la corruption et la discrimination estime qu’elle a pris ses responsabilités, ses justes et légitimes responsabilités, en cessant toute collaboration avec la CONAC, en appelant au chef de l’Etat pour procéder à la dissolution de cet organisme et la traduction de ses dirigeants devant le Tribunal Criminel Spécial.
18 – La Commission rappelle que c’est aux citoyens et citoyennes et à eux seuls, qu’il revient de faire changer le destin de leur pays, de le préparer positivement, en dénonçant vigoureusement les actes de mauvaise gouvernance à l’instar de ceux de la CONAC, qui s’assimilent à de la haute trahison.
19 – Dans cette logique, le courage, l’honnêteté, la lucidité, la détermination et l’engagement débarrassé de tout calcul opportuniste et de tout subjectivisme, sont nécessaires. Il est temps que les Camerounais aient pitié de leur pays, parce que nous n’avons qu’un seul pays, et parce que nous ne pouvons pas continuer ainsi, à le détruire chaque jour qui passe.
20 – Si on doit nommer un président de la CONAC pour qu’il se fixe lui-même un salaire mensuel de plusieurs millions de Francs CFA pendant que nous quémandons aux Japonais pour construire des salles de classe, nous préférons qu’il n’existe pas de CONAC du tout. Nous préférons nous en remettre à Dieu, qui saura comment sauver le Cameroun et les Camerounais quand il aura déjà suffisamment eu pitié de notre délabrement, de notre perdition, et de nos souffrances./.
Fait à Yaoundé, le 28 Juin 2014
Le Président de la Commission, Shanda Tonme, Médiateur universel