Par Narcis Bangmo
Les consommateurs européens (français, anglais, Nerlandais.) sont dans l’émoi total depuis quelques jours, pour avoir mangé de la viande de cheval au lieu de b uf, à la suite d’une tromperie à l’étiquetage. En tant qu’Africain, on se sent plus que surpris, quand on a souffert le martyr d’être arrosé des poulets surgelés à la dioxine et de tous ces produits alimentaires de seconde zone qui inondent nos marchés, tuant dans l’ uf tout initiative locale. La lasagne, en débat en Europe, est un plat d’origine italienne qui vient de la « lasagna », trépied de cuisine qui servait de contenant au dit plat. Dans la base de la lasagne, on trouve un « aliment blanc », les pâtes ou « pasta », de la ricotta, de la tomate et du haché de b uf. En remplaçant la viande de b uf par celle de cheval, deux problèmes fondamentaux se posent. Il y a un viol inconscient des habitudes alimentaires non voulues par les consommateurs et une filouterie morale et matérielle par le changement frauduleux des étiquettes sur les cartons d’aliments précuits de lasagne. Les logiques ultralibéralistes de l’économie et ses corollaires peuvent être dangereux pour la santé des consommateurs occidentaux pour lesquels les exigences en matière de normes sont plus accentuées, a fortiori quand il s’agira, avec l’ouverture de nos frontières, d’exporter les produits de l’Union Européenne en Afrique et notamment au Cameroun. C’est dire combien les efforts inédits et sans précédant de l’association pour la défense des intérêts collectifs (ACDIC) peuvent s’avérer vains au demeurant. L’agriculture paysanne camerounaise se meurt, non plus seulement à cause des difficultés économiques inhérentes aux programmes d’austérités successifs que le Cameroun a connus, mais surtout par des accords de partenariat économique que nos dirigeants continuent de signer, parfois dans des conditions pas très claires, qui ressemblent plus à un chantage à l’aide qu’à une véritable « coopération à la chinoise ». L’actualité autour de la confusion voulue et malhonnête de la viande de cheval à celle du b uf dans les aliments précuits, donne une occasion de relancer le débat autour du nouveau partenariat économique entre l’Union Européenne et les ex-ACP (pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique). Ces accords qui rentreront en application dès 2021, si les ratifications sont effectives, présagent des lendemains très difficiles pour notre pays dont les politiques agricoles sont quasi inexistantes. L’Union Européenne peut-elle garantir d’une meilleure qualité des produits qui entreront sur nos marchés, alors que ce n’est toujours pas le cas aujourd’hui ? Que peut le petit paysan camerounais face aux produits subventionnés ? De ces interrogations, on peut comprendre en cette réflexion qu’il s’agit d’autopsier les rapports actuels et futurs entre les deux pôles, et de proposer un plaidoyer pour une agriculture camerounaise durable.
Victoire autour du poulet surgelé: un grand succès dans le désespoir?
L’exemple des poulets surgelés illustre bien comment fonctionne la dynamique d’appauvrissement des populations locales par des importations massives de produits alimentaires dans un pays africain et en quoi cette pratique va à l’encontre d’un développement durable. Cette affaire et sa résolution montrent également qu’il est indispensable de lutter pour faire échouer des pratiques commerciales néfastes et qu’il est possible d’obtenir gain de cause. Les premières grandes importations de poulet surgelé sont arrivées au Cameroun en 1994, à la suite de la ratification des accords de l’Organisation Mondiale du Commerce, qui marquaient la libéralisation des échanges. Le pays passe de 60 tonnes de poulet importé en 1996 à 22.000 tonnes en 2003 (Bopda, 2003), une augmentation colossale en 9 ans seulement. Il faut savoir que l’élevage et même parfois l’abattage de ces poulets produits en Europe, bénéficiaient des subventions des Etats de l’Union Européenne et parvenaient sur les marchés camerounais à des prix défiant toute concurrence. En 1994, un poulet de chair élevé sur place au Cameroun était devenu un aliment de luxe et coûtait entre 5,4 et 9 euros le kg. Tandis que le poulet surgelé, vendu par morceaux, coûtait 1,5 euros le kilo pour des cuisses, voire même moins d’un euro pour des parties comme les ailes ou le gésier. C’est ainsi que l’aviculture locale se trouvait fragilisée et asphyxiée. De nombreux éleveurs et leurs familles n’arrivaient plus à se nourrir ni à envoyer leurs enfants à l’école car ils devaient faire face non seulement aux poulets importés, mais aussi au déficit de céréales qui devenaient de plus en plus rares sur le marché pour l’alimentation de leurs poulets. Dans tous les discours tant au Nord qu’au Sud, les intellectuels, les altermondialistes, les politiques et autres leadeurs d’opinion s’accordent à reconnaître que l’environnement n’a pas de frontière, qu’il est mondialisé et nécessite donc d’être préservé par des initiatives conjointes pour le bien de tous. La problématique autour du poulet surgelé illustre à souhait l’importance d’une solidarité entre des militants du Nord et ceux du Sud, afin de parvenir à contrer une dynamique destructrice du développement local. Avec le soutien des altermondialistes français, notamment José Bové, l’ACDIC va attirer l’attention de la communauté nationale et internationale sur les risques sanitaires liés à la consommation de ces poulets en publiant les résultats des tests réalisés par le centre Pasteur. Il en est ressorti que 85,3 % de ces échantillons étaient impropres à la consommation et contenaient de la dioxine. Suite à un décret présidentiel du 18 décembre 2004, décision courageuse, l’importation du poulet surgelé au Cameroun sera interdite. Les pouvoirs publics ne se sont pas limités à interdire les importations, mais ont conjointement accordé à la filière avicole une subvention de l’ordre de plus deux millions d’euros, ceci dans le but de combler le déficit laissé par l’arrêt des importations. La vigilance de l’ACDIC et le contrôle des agents du ministère du commerce réduisent les risques de la présence du poulet surgelé importé clandestinement sur les marchés après l’interdiction. La culture du poulet surgelé a été stratégiquement maintenue par les vendeurs et tenanciers de poissonneries qui achètent les poulets de chair, les plument, les conservent au frais avant de les revendre. Cette stratégie a un double objectif : éviter aux entreprises la faillite et surtout accompagner les consommateurs dans le changement des habitudes alimentaires auquel ils doivent de nouveau faire face. Il est important de souligner que la production locale était déjà une production durable, au vu de l’origine même de l’alimentation des poulets. C’est en effet une alimentation soutenue par une production céréalière généralement biologique. Ces pratiques sont bien antérieures aux discours sur le développement durable qui n’arrivent qu’en 1987 avec le rapport Brundtland sur l’état de la planète. Malheureusement, elles risquent de disparaître par l’imposition de pratiques commerciales agro-alimentaires basées sur la seule optique du profit maximum. Les dangers autour de cette filière du poulet surgelé importé en Afrique se retrouvent à plusieurs niveaux : au niveau sanitaire et écologique, au niveau économique et au niveau socio-anthropologique. Nous avons déjà évoqué l’impact au niveau économique. Au niveau sanitaire, la présence de dioxine est un des dangers, mais également le contrôle de la chaîne de froid qui n’est pas toujours facile à assurer. Entre les déchargements au niveau des ports, dans les chambres froides des grossistes et même sur les étals des revendeurs, il y a régulièrement rupture de la chaîne de froid, laquelle est susceptible de dégrader la qualité du poulet à consommer et de rendre la viande toxique. Enfin, une dépense d’énergie considérable est utilisée pour la congélation et le transport de ces poulets, ce qui constitue un gaspillage et une source de pollution supplémentaire. Au niveau socio-anthropologique, rappelons que pour de nombreuses tribus au Cameroun, la consommation du poulet de chair est une tradition et surtout un facteur de renforcement des réseaux sociaux. Egorger un poulet et le plumer dans une famille n’est pas un acte banal mais un symbole. Les repas concoctés avec du poulet sont des moments de communion fraternelle et de maintien du pouvoir des ainés, à qui certaines parties comme le gésier sont consacrées. Parfois les risques de voir le chef de famille refuser de manger un plat de poulet quand son gésier n’y est pas sont très élevés. Certains rites ancestraux de purification se font exclusivement avec du poulet de chair. C’est dire ici combien la disparition de l’aviculture locale face à la rude concurrence des importations de poulets aurait été dommageable pour la cohésion sociale au Cameroun.
Les accords APE et leurs impacts futurs sur le développement de la filière avicole
Nous abordons les accords de partenariat économique entre l’Union Européenne et les pays ex-ACP afin de démontrer un peu la fragilité des politiques locales dont l’implémentation dépend intimement des grands discours internationaux. Or, ces discours, malgré parfois leur profondeur s’éloignent très souvent des logiques locales donnant l’impression d’être conçus à dessein pour maintenir les pays du Sud dans la spirale d’une « pauvreté durable ». C’est dans ce contexte déjà précaire qu’interviennent les Accords de Partenariat Economique (APE), en négociation depuis 2002 entre les pays APC (Afrique-Caraïbes-Pacifique) et l’Union Européenne, et dont l’application risque de fragiliser davantage les pays du Sud. Faisant suite aux accords de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) qui garantissent la libre commercialisation des produits entre les pays membres, les APE marquent la fin du régime d’accès préférentiel accordé aux pays ACP depuis 1975 à travers les différents accords de Lomé et le dernier accord de Cotonou de 2000. Le régime préférentiel de ces accords était lié aux avantages tarifaires donnant accès au marché européen ainsi qu’à des fonds spéciaux destinés à garantir la stabilité des prix à l’achat pour les produits agricoles et miniers. En quoi les APE sont-ils dangereux pour le développement durable dans des pays Afrique Caraïbes Pacifique ? Les accords APE prévoient la suppression immédiate des droits de douane sur les produits originaires des pays signataires qui entrent dans l’Union Européenne et la suppression progressive des droits de douane sur les produits originaires de l’Union Européenne lors de leur entrée dans les pays signataires. Ceci veut dire que tous les produits agricoles issus de l’Union Européenne entreraient au Cameroun sans restriction aucune au niveau des frontières. Or il est clair que ce n’est pas l’absence des frais de douane qui rendront les produits ACP compétitifs. Rarement les produits rentrent dans l’Union européenne, ils ne respectent pas la norme européenne en la matière. Parlant de normes justement, combien de pays du Sud réussissent-ils à respecter ces normes ? Pour le cas du Cameroun par exemple, les recettes douanières constituent un peu plus de 25 % du budget de l’Etat (représentant un montant de plus d’un milliard de dollars). Leur suppression entraînerait un gros déficit pour ce pays, que l’aide au développement déjà très critiquée dans la forme actuelle, comblerait difficilement. Pour les pays de la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale (la CEMAC), la suppression complète des droits de douane est prévue à l’horizon de 2021. Tous les pays des Caraïbes ainsi que six pays africains ont déjà signé les accords intérimaires en 2009. Ainsi, en 2021, les pays concernés par ces accords verraient tous les produits, y compris les biens agro-alimentaires, pénétrer leurs frontières sans restrictions aucune. A la question de savoir si l’agriculture des pays du Sud pourra faire concurrence avec celle du Nord dans dix ans, on a envie de répondre par la négative en regard de ce qu’on observe au niveau du commerce international. Dans les pays du Nord, les agriculteurs sont subventionnés et pratiquent une production de masse, alors que les agriculteurs du Sud sont interdits de subvention. En effet, les programmes d’ajustement structurel ont obligé les Etats qui les appliquaient à se désengager de tous les secteurs de production, y compris l’agriculture, en les confiant aux opérateurs privés. Les accords APE prévoient également un volet d’aide au développement par le déblocage de financement dans les domaines suivants : infrastructures, secteur agroalimentaire, industrie et juridique. Des structures régionales ad-hoc devraient être créées pour recueillir ces financements. Comme on peut bien l’imaginer, des pressions sont exercées sur les pays ACP par l’Union Européenne pour les contraindre à signer ces accords au risque de voir l’aide qu’on leur accorde actuellement diminuer, voire même disparaître. Soulignons que de nombreuses associations et ONG tant du Nord que du Sud, – les altermondialistes européens, l’association des industriels africains, l’ACDIC – sont radicalement opposés à ces accords qui constituent un désastre pour les pays africains en particulier. En effet, les économies africaines dépendent à 70 % au moins de l’agriculture. A partir de 2021, date de clôture d’application des accords, on se demande bien par quel miracle l’agriculture africaine pourrait concurrencer celle de l’Union Européenne, non seulement subventionnée, mais aussi parfois dangereuse pour la santé, si ensemble nous ne nous réapproprions pas le modèle de production agricole biologique. Le lien qu’on peut faire ici entre ces accords et le développement durable dans les pays du Sud, c’est que justement ces pays sont dans une posture où ils ne décident plus des grandes orientations à prendre en matière de préservation de la biodiversité, de lutte contre la pollution. Si force est de reconnaître la pertinence du discours sur le développement durable, il n’en demeure pas moins qu’aucun développement ne peut s’avérer efficace lorsqu’il est pensé ailleurs, quand il n’est pas l’émanation de la base elle-même. Tout part de la volonté de l’ordre dominant d’asseoir son hégémonie et de transmettre ses valeurs aux peuples du monde. Cet ordre est porté par les pays occidentaux et aujourd’hui la Chine. Ils agissent particulière par l’entremise des institutions de Bretton Woods (banque mondiale, Fonds monétaire international et Organisation mondiale du commerce) où ils contribuent massivement à fixer les règles du jeu généralement peu favorable aux pays en développement (pauvres et très endettés). Ces institutions internationales instaurent des relations généralement très asymétriques entre elles et mettent de fortes pressions sur les élites locales et même de la société civile que sont les mandataires des peuples. Les différents exemples des privatisations sauvages dans les pays en développement sous ajustement structurel sont assez évocateurs car les conditionnalités de rachats d’une société en cours de privatisation n’ont jamais été favorables aux investisseurs nationaux, même dans les secteurs les plus sensibles de la vie d’un Etat comme l’eau et l’électricité. Justement, pour le cas du Cameroun, on ne pouvait céder une entreprise qu’à ceux qui ont une expérience d’au moins 12 ans. Difficile donc d’avoir un privé national qui a une telle expérience. Les pays riches dans leur quête de contrôle des ressources à travers le monde agissent également et surtout par l’intermédiaire des multinationales à qui ils apportent des garanties de sécurité au cas où les choses venaient à mal se passer dans les pays qui reçoivent l’investissement. Ils agissent enfin par l’entremise des élites qui sont les plus grands responsables des menaces qui pèsent sur la disparation des ressources non renouvelables.
Plaidoyer pour une agriculture durable au Cameroun
Contexte environnemental et sociopolitique
L’idée d’un projet autour des bonnes pratiques environnementales, nous est venue au cours d’une soirée d’échange au Centre Placet (foyer international proche de l’Université Catholique de Louvain-la-Neuve). Soirée qui nous a permis de passer en revue tous les tenants et aboutissants des paradigmes de développement durable et de l’agriculture biologique. Les conclusions de ces échanges stipulent clairement qu’une agriculture locale protectrice des sols et susceptible de préserver la santé des individus est possible. Ainsi, nous avons pensé mettre cette initiative ô combien louable au profit du Cameroun qui, situé dans le bassin du Congo, regorge d’une biodiversité parmi les plus enviables et de sols fertiles, aujourd’hui à la merci des semences améliorées des pesticides des engrais chimiques, produites par les multinationales (PIEC_BOPAB). La cible principale de ce projet est la jeunesse scolarisée, grand relais de communication auprès des parents et autres adultes. Les Accords de Partenariat Economique (APE) restent un enjeu énorme pour les pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique). En négociation depuis 2002, ces accords prévoient, entre autre, une suppression immédiate des produits ACP vers les pays de l’union européenne et une suppression progressive des droits de douane, sur les produits originaires de l’Union Européenne lors de leur entrée dans les pays signataires, mal préparés à faire face aux produits agricoles plus compétitifs. De tous les produits à échanger, ceux issus de l’agriculture constituent la principale pomme de discorde. Depuis les indépendances, les pays africains en particulier, ont des économies structurellement déficitaires, qui dépendent à près de 80 % de l’agriculture. Malgré le faible décollage des structures de production et de transformation, on est resté globalement attaché à une agriculture locale biologique et saine, avec une empreinte écologique supportable pour l’équilibre de la planète. La crise économique mondiale des années 80, la crise de l’endettement et les programmes d’ajustement structurel ont contribué à appauvrir les pays africains, notamment les populations en milieu rural par la suppression des subventions aux secteurs productifs. La fragilisation des économies et la pauvreté quasi généralisée ont tracé la voie, dans ces pays, aux appétits de l’industrie des semences et des pesticides dits améliorés, et les importations de biens et des produits alimentaires pour pallier les manquements locaux. Avec un pouvoir d’achat de plus en plus faible, il devient difficile d’affronter les effets secondaires tant sur la qualité des sols que sur la santé des populations. Les accords de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) de 1994 qui stipulaient la libéralisation des échanges entre les pays membres, sont le point de départ des premières grandes importations de produits agricoles en Afrique. Les économies se sont davantage fragilisées avec la production locale qui ne pouvait plus faire face aux produits importés plus concurrentiels. La crise économique aidant, le prix est devenu un critère directeur pour beaucoup de citoyens qui n’avaient plus le choix entre les produits locaux, fussent-ils de bonne qualité et les produits importés. Les programmes d’urgence ont été mis sur pied par le Cameroun pour résoudre les problèmes de pauvreté. Parmi ces mesures, ont peut citer le renforcement des structures de production en milieu rural, principal vivier de production. Les documents stratégiques de réduction de la pauvreté sont des illustrations de ces mesures puisqu’ils y prévoient des éléments de solutions mais restent cependant insuffisants et limités sur le plan de l’assistance. En effet, la production locale s’enlise davantage avec le silence des pouvoirs publics qui curieusement ne jouent plus pleinement leur rôle. Force est de constater que globalement, un appui à la paysannerie s’impose de façon plus concrète si l’on veut véritablement aider les pays à affronter la suppression prochaine des barrières douanières. Mais cet appui passera sans nul doute par l’information sur les bonnes pratiques environnementales, la formation, l’éducation et la communication auprès des masses que nous voulons, dans le cadre de ce projet, situer principalement au niveau des plus jeunes scolarisés. Le potentiel agricole reste tout entier au Cameroun. L’environnement écologique est riche, les sols sont à beaucoup d’endroit fertiles et enrichis par de la matière organique naturelle qui n’a nécessairement pas besoin d’intrant chimique pour produire en quantité suffisante.
Le contexte économique
Ce projet pourrait s’inscrire dans le cadre de la mise en uvre des options stratégiques de réduction de la pauvreté au Cameroun dont les points d’orgue sont les différents documents stratégiques de réduction de la pauvreté (DSRPC 1 et 2) et le document stratégique pour la croissance et l’emploi (DSRE). En effet, parmi les options de sortie de crise économique, les DSRP et DSRE prévoyaient au Cameroun: la diversification de l’économie, la dynamisation du secteur privé, le renforcement des ressources humaines et l’insertion des groupes défavorisés dans le circuit économique; la Stratégie de développement du secteur rural (modernisation de l’appareil de production, débouchés pour les produits agricoles, promotion de l’emploi et du rôle des femmes et des jeunes ruraux) ; (DSRPC2, 2003). On peut ajouter à cette liste l’atteinte des objectifs du millénaire fixée pour 2015. Le Cameroun a déjà déclaré ne pas être capable d’atteindre ces objectifs d’ici 2015 en demandant une rallonge de 5 ans. Parmi les raisons, on trouve l’abandon du principal secteur de production qu’est l’agriculture par l’Etat, et un taux de mortalité infantile et maternelle resté très élevé, de l’ordre de 82 pour mille (World population prospect, 2012). Ces insuffisances sont aussi liées à la qualité de l’alimentation. Le projet a été conçu dans le cadre du Plan d’urgence de l’amélioration de la quantité par l’amélioration de la qualité de la production agricole en général et vivrière en particulier pour faire face à la hausse des prix des denrées agricoles. Au cours de cette réflexion, un accent a été placé sur la prise en compte des éléments de gouvernance au niveau des communautés, de l’appropriation du processus de développement ainsi que des intérêts des petits exploitants pauvres et d’une approche inclusive des groupes vulnérables.
Les lycées et collèges au c ur de la relance de la production agropastorale
Cette réflexion vise principalement la facilitation de l’atteinte des objectifs du millénaire dont l’un des points saillants est de réduire de moitié la pauvreté en milieu rural à travers une production durable et quantitative. Il sera question, plus amplement, de promouvoir à travers des mécanismes d’information, d’éducation, de communication et de susciter dans la conscience collective (des jeunes scolarisés et à travers eux, les adultes) l’avènement possible d’un monde nouveau, débarrassé de l’utopie d’un développement durable sans amélioration de la qualité de la vie. Ce projet aura donc pour mission de montrer aux différentes cibles l’urgence de maintenir (pour ceux qui y croient encore) ou de retourner (pour les sceptiques) à une production agricole et à une consommation biologique, pour réduire leurs « doses de poison quotidiennes ». Il n’est donc pas question de remettre en question l’agriculture de seconde ou même de troisième génération donc parlait le chef de l’Etat dans son traditionnel discours à la nation, mais de rester lucide et de sauver l’agriculture paysanne à travers la formation de la jeunesse des lycées et collèges. Le constat qu’on peut faire cependant est que la plupart des produits agricoles issus des grandes plantations ne sont pas vendus au Cameroun. L’ACDIC, à travers son président, vient d’attirer l’attention des pouvoir publics sur les conséquences néfastes de la production du riz dans la haute Sanaga. L’entreprise chinoise qui s’est accaparée des terres des populations avec la complicité des élites politiques de la région, ne vend pas le meilleur de sa production au Cameroun mais l’exporte dans la Chine continentale. Cette initiative contrairement aux autres qui ont existé, a l’avantage d’être moins budgétivore, éducatrice et donc protectrice de l’environnement, vu quelle s’appuiera sur la collecte des ordures ménagères biodégradables (au sein des établissements et ailleurs), pour engraisser les champs d’expérimentation dans des établissements scolaires que nous appelons des jardins scolaires. Elle pourrait également constituer dans l’avenir, une alternative sérieuse à la crise alimentaire au Cameroun, ayant déclenché les évènements de février 2008 que personne n’est encore prêt à oublier, au point où le spectre de ceux-ci ne s’en est pas totalement éloigné. Ceci n’exclut pas cela et nous tenons à le préciser, qu’il se développe partout ailleurs sur l’étendue du territoire, d’autres formes d’agriculture dites intensives. Le temps consacré au «travail manuel» à l’école serait une occasion de mettre à profit de façon durable des initiatives comme celles-ci, car en transmettant la connaissance au plus jeunes, on éternise le savoir qui peut, et nous le souhaitons, passer des plus jeunes aux adultes. Voila à notre avis comment il est possible de se prémunir des retombées malheureuses de la vigilance des organismes de contrôle en Europe au lendemain du « scandale du cheval », car l’histoire nous enseigne à travers le fameux poulet à la dioxine et bien d’autres aliments, que tout ce qui n’est pas bon en Occident est bon pour nous. L’écart en Europe ne sera plus une norme en Afrique et au Cameroun, que lorsqu’on aura mis sur pied une véritable politique agricole inclusive pour faire face aux nouveaux partenariats économiques à venir entre l’Union Européenne et les ex-ACP. Ainsi, le principe directeur qui guidera nos habitudes alimentaires ne sera plus uniquement le prix, mais plutôt le tri, afin que nous ne pensions plus seulement à manger, là où les autres mangent en pensant.

N. B. )/n