Par François Zoomevele Effa
J’ai vraiment, Mesdames, le plaisir de vous adresser cette lettre exceptionnelle, car vous êtes exceptionnelles. Vous n’êtes que trois à exercer cette fonction dans un continent où les femmes, comme ailleurs, sont majoritaires. J’ai la certitude que vous tiendrez compte de ce que je vous dis, car, vous êtes l’avenir de notre continent, le vrai avenir. Je vous prie de bien vouloir organiser un sommet de femmes dirigeantes, sommet qui sera présidé par vous trois: Ellen Johnson-Sirleaf, du Liberia, Joyce Benda du Malawi, et Catherine Samba Panza de Centrafrique. N’omettez pas d’inviter vos camarades ayant déjà exercé en intérim ou par transition cette fonction de chef d’état au Burundi, au Gabon, en Guinée Bissau, au Liberia ,et à Maurice. Il sera judicieux, Mesdames, d’inviter à se joindre à vous des femmes africaines exerçant des responsabilités au plus haut niveau: à l’Union Africaine, les dames chefs de gouvernement, mais, le faisant, n’invitez surtout pas des femmes ministres ayant eu une promotion canapé et, de grâce, pas de Première Dame poupée de luxe et écervelée. Cette vie que vous nous avez donnée en nous portant et nous mettant au monde vous donne plus de sensibilité qu’aux mâles. C’est pourquoi, je vous propose certains points incontournables à l’ordre du jour de ce sommet, virtuel certes en ce moment, mais qui bientôt, sera une réalité. A l’instar de l’artiste, du poète, Pierre C. Akendengue, voici des suggestions:
A propos de la liberté: Que vous vous y penchiez, car ce concept est vraiment maltraité et bafoué dans le continent. Quand on pense qu’un certain célèbre saxophoniste africain chauve avait chanté dans les années soixante, en saluant les indépendances «à présent que nous sommes libres, libres de choisir notre loi… réveillons-nous. Effaçons l’esprit de tribalisme, effaçons la haine entre nous, que les mots union et fraternité prennent place dans nos c urs.» Proclamez, je vous prie, la liberté dont nous sommes privés depuis fort longtemps à cause des traites négrières et des invasions missionnaires coloniales et néo-coloniales actuelles.
A propos de la santé: Nous allons à la dérive, c’est une hécatombe. La grande majorité, la très grande majorité de la population est laissée à elle-même. Les hôpitaux sont devenus des mouroirs : si l’on a pas d’argent, ou de relations, on n’est pas soigné. C’est le règne de la corruption. Du temps de nos ancêtres, on maîtrisait nos médecines, et les soins étaient donnés à tous.
A propos de nos frontières: Voilà une notion qui sème la zizanie depuis qu’en 1884 à Berlin, une bande de voyous et de voleurs aux cols blancs se sont partagés le Continent. Ils le pillent depuis lors, divisant pour mieux régner, incitant des guerres tribales dans les régions les plus riches comme les Congos, le Nigeria, l’Afrique du sud, le Mali, la Côte d’Ivoire, la Lybie, le Soudan, et maintenant la Centrafrique. C’est le prétexte pour vendre des armes à des imbéciles qui s’entretuent. Ils suppriment les frontières chez eux, et nous incitent à nous bagarrer pour un concept qui nous est étranger.
A propos de nos valeurs: La fraternité, la famille élargie, l’entraide, l’hospitalité, toutes ces choses qui faisaient notre spécificité sont en train de partir en fumée. Notre rêve est d’avoir des dirigeants qui ont pour base ces femmes noires, ces femmes africaines qui nous ont portés sur le dos, qui nous ont ouvert les yeux aux prodiges de la terre, et dont les douces, tendres et nostalgiques pensées nous accompagnent tout au long de notre vie. Recevez, Mesdames les Présidentes qui ne vous affublez pas des surnoms d’Excellence ou de Majesté, recevez, au-delà de ce rêve que je fais éveillé, le sentiment profond de l’espoir que l’Afrique porte en vous. Si vous n’étiez pas présidentes des républiques, j’oserais vous dire: je vous embrasse tendrement.