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La ratification de l’APE avec l’UE doit être perçue comme une approche stratégique

L'intégralité du point de presse accordé par le porte-parole du gouvernement le 15 juillet relatif à l'adoption du projet de…

L’intégralité du point de presse accordé par le porte-parole du gouvernement le 15 juillet relatif à l’adoption du projet de loi

Monsieur le Ministre de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire,
Monsieur le Secrétaire Général du Ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire,
Monsieur le Secrétaire Général du Ministère de la Communication,
Monsieur le Directeur Général de l’Économie et de la Programmation des Investissements,
Monsieur le Directeur Général de la Coopération et de l’Intégration Régionale,
Monsieur l’Inspecteur Général du Ministère de la Communication,
Messieurs les Directeurs et Experts du Ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire,
Messieurs les Conseillers Techniques,
Madame, Messieurs les Inspecteurs,
Madame, Messieurs les Directeurs et Chefs de Divisions,
Chers Collaboratrices, Chers Collaborateurs,
Mesdames, Messieurs les Journalistes,
Chers Invités,

C’est avec un plaisir renouvelé, que je vous accueille une fois de plus dans cette salle de conférences de mon Département ministériel, pour échanger en toute convivialité et en toute franchise, sur une question de dernière actualité, qui concerne la vie économique de notre Nation, et partant, le bien-être de nos populations. Il s’agit de l’adoption par le Parlement, au cours de sa dernière session ordinaire, de la loi autorisant le Président de la République à ratifier l’Accord d’Étape vers un Accord de Partenariat Économique, entre la Communauté Européenne et ses États membres d’une part, et la partie Afrique Centrale d’autre part ; Accord signé par le Cameroun depuis le 15 janvier 2009. Mais, permettez-moi tout d’abord, de saluer ici, la présence à mes côtés, de Son excellence Monsieur le ministre de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire, qui a bien voulu prendre de son temps que nous savons précieux, pour se joindre à nous à l’occasion de cet échange.

Monsieur le ministre, soyez donc le bienvenu ici au ministère de la Communication.
Je voudrais également vous souhaiter à vous, chers amis journalistes, une chaleureuse bienvenue dans cette salle, et vous exprimer, à chacune et à chacun, ma profonde gratitude pour votre prompte réaction à l’invitation que je vous ai adressée ce jour.

Mesdames, Messieurs les Journalistes,
Le Parlement de notre pays vient donc d’autoriser le président de la République, conformément à la Constitution, à ratifier l’Accord d’Étape devant mener vers un partenariat économique entre l’Union Européenne et l’ensemble de ses États-membres d’un côté, et de l’autre, les pays d’Afrique Centrale. Je voudrais tout d’abord dire un mot sur le contexte économique qui prévaut dans notre pays, au moment où cette loi vient d’être votée.

Le taux de croissance du Cameroun, qui constitue l’indicateur de premier plan de la vitalité économique d’un pays, est en progression constante. En 2013 en effet, notre économie a connu une croissance de 5,5% contre 4,6% en 2012 et 4,1% en 2011. Les projections pour 2014 nous situent au-delà du taux enregistré en 2013. Ceci signifie que le produit intérieur brut par habitant est passé au cours de la même période, de 631 francs CFA en 2011 à 663 francs CFA en 2012, puis à 696 francs CFA en 2013. Quant au Budget d’Investissement Public, qui alimente pour une part déterminante l’évolution du taux de croissance, il s’est situé à hauteur de 1 000 milliards de francs CFA en 2014, contre 957 milliards de francs CFA en 2013, soit une augmentation de 4,5% sur cette période. Ce budget a représenté en 2014 et à lui seul, plus de 30% de l’enveloppe budgétaire de l’État.

Mesdames, Messieurs les journalistes
Ce bref rappel permet de donner une indication claire sur la dynamique performante de notre économie, dans le sillage de laquelle il faut situer d’une part, la problématique actuelle de la recherche des débouchés pour notre production intérieure vers les marchés extérieurs, et d’autre part, celle de la compétitivité de notre tissu économique. Pour comprendre la logique d’évolution de notre pays vers un Accord de Partenariat Économique avec le grand ensemble stratégique que constitue l’Union Européenne, il faut donc intégrer une telle problématique, sans laquelle aucune perspective d’émergence n’est sérieusement envisageable à moyen ou à long terme.

Il faut aussi comprendre que cette problématique n’est pas nouvelle, puisque c’est au lendemain des indépendances africaines, précisément le 02 juillet 1963, que fut signée la première Convention, dite Convention de Yaoundé I, qui prévoyait une aide financière et commerciale des pays de la Communauté Économique Européenne (CEE), aux dix-huit (18) anciennes colonies européennes d’Afrique. Une seconde Convention, dite Convention de Yaoundé II, allait être signée le 29 juillet 1969, laquelle portait sur le financement des projets d’envergure dans ces pays, avec une prépondérance pour l’Afrique noire.

Par la suite, la crise pétrolière des années 70, la hausse des cours des matières premières, ainsi que l’intensification du dialogue Nord – Sud, allaient entraîner la signature des Conventions de Lomé I à Lomé IV, dont les principales caractéristiques portaient sur l’égalité des différents partenaires, la nature contractuelle des relations entre eux et une combinaison d’aides et de dispositions commerciales, dans l’optique d’une vision à long terme.

Le dernier Accord de cette série, dit Convention de Lomé IV, conclu en 1989, était prévu pour dix (10) ans. Il a été révisé à mi-parcours en 1995. Tandis que la Convention de Lomé I et celle de Lomé II, conclues pour la période allant de 1975 à 1985, donnaient la priorité au développement industriel et rural, en créant notamment le STABEX (Fonds de stabilisation des recettes d’exportations sur les produits agricoles) et le SYSMIN (Fonds de stabilisation des recettes d’exportations des produits minéraux), ceci afin de compenser les fluctuations des recettes d’exportations des produits primaires, la Convention de Lomé III mettait l’accent sur la sécurité alimentaire et l’environnement. Quant à la Convention de Lomé IV, conclue pour la période allant de 1989 à 2000, elle introduisait pour la première fois, un lien explicite entre la promotion des droits de l’Homme et le développement. C’est en date du 23 juin 2000, qu’un cadre nouveau de coopération plus élargie entre les pays d’Afrique, Caraïbes et Pacifique (les ACP) et l’Union Européenne, allait voir le jour, avec cette fois-ci, une optique explicite pour la mise en place d’une zone de libre-échange entre eux.

L’Accord de Cotonou représentait donc une nouvelle phase de coopération entre les pays ACP et l’Union Européenne, en abandonnant le système des préférences commerciales qui prévalait jusque-là, pour les Accords de Partenariat Économiques, dont l’un des principaux objectifs était d’appuyer les initiatives d’intégration régionale entre les pays ACP. Cet Accord reposait sur la remise en cause du modèle des relations Nord – Sud, sur lequel étaient basées les Conventions de Lomé, et prenait en compte l’évolution du contexte économique dominé par la mondialisation des échanges, ainsi que les préoccupations des pays membres de l’Union Européenne.

Dans le cadre de l’Accord de Cotonou, qui je vous le rappelle, fut signé en 2000, le Cameroun, au même titre que l’ensemble des pays ACP, était déjà partie prenante à la négociation, en vue de la conclusion des Accords de Partenariat Économiques entre les blocs régionaux africains (Afrique Centrale et Afrique de l’Ouest) et les pays membres de l’Union Européenne. Les négociations en vue d’une évolution directe vers les Accords de Partenariat Économique avec les ensembles régionaux africains ayant butté sur les intérêts divergents des différents États, l’Union Européenne allait opter pour la saisine individuelle de chaque État, en vue de la conclusion d’Accords bilatéraux, tout au moins à titre intérimaire, en lieu et place des Accords régionaux initialement prévus.

Entre-temps, l’Accord de Cotonou arrivant à son terme, le Cameroun, ainsi d’ailleurs que de nombreux autres pays ACP, allait pour sa part, parapher le 17 décembre 2007, puis signer le 15 janvier 2009 un Accord d’Étape, afin de préserver un accès préférentiel de ses exportations vers le marché de l’Union Européenne, évitant ainsi une perturbation de ses exportations vers cette zone économique, prioritaire pour son commerce extérieur. L’Accord de Partenariat d’Étape signé par le Cameroun et l’Union Européenne, et dont le Parlement vient d’autoriser la ratification par le Chef de l’État, couvre essentiellement le commerce des marchandises.

Il a déjà permis au Cameroun, bien avant sa ratification, de garder un accès préférentiel vers l’Union Européenne, et ceci, depuis 2008.
Au terme de cet Accord, le Cameroun accepte en contrepartie de l’accès préférentiel réservé à ses produits vers l’Union Européenne, d’ouvrir son marché intérieur, à concurrence de 80% des importations en provenance de l’Union Européenne. La libéralisation des échanges qui sous-tend la structure de l’Accord de Partenariat d’Étape, s’étalera sur quinze (15) ans, avec une période moratoire de deux (02) ans, et se fera par groupes de produits.

Trois (03) groupes de produits ont été identifiés à cet effet, étant entendu que 20% des produits demeurent totalement exclus de la libéralisation, principalement afin de protéger certaines industries, ainsi que les marchés agricoles sensibles, et de minimiser par ailleurs les pertes en recettes fiscales.
Le premier groupe de produits, dit « Groupe à libéralisation rapide », pour le bien-être des populations, comprend :
.Des produits destinés à la consommation des ménages, à hauteur de 30% du total du groupe, qui sont des produits de première nécessité contribuant à la lutte contre la pauvreté ;
.Des matières premières (19% du groupe) et certains biens d’équipements (27% du groupe), pour permettre aux entreprises locales d’accéder aux intrants nécessaires à leur processus de fabrication à moindres coûts. Il s’agit dans ce groupe : des médicaments, des livres, des semences ou encore de reproducteurs d’animaux. La libéralisation des produits de ce groupe était prévue pour se faire en quatre (04) ans, à partir de la première année de libéralisation en 2010 ;

.Le deuxième groupe, dit « Groupe à libéralisation lente », pour l’encouragement de la production locale, comprend des machines et autres biens d’équipements (35%), des produits semi-finis (39%) et autres matières premières destinées à soutenir l’industrie locale. La libéralisation de ce groupe constitue un soutien à l’investissement, permettant aux entreprises locales de mettre à niveau leurs équipements et d’améliorer leur compétitivité. Dans ce groupe, se trouvent des machines et des équipements mécaniques (véhicules neufs, machines agricoles), des machines et des équipements électriques ou encore des pneumatiques neufs. Les produits composant ce groupe sont destinés à être libéralisés sur une période de sept (07) ans, à partir de la deuxième année de libéralisation, c’est-à-dire 2011.

.Le troisième groupe, dit « Groupe à libéralisation très lente », pour protection de la production locale et la non- incidence sur les recettes fiscales, comprend des produits à tarifs élevés. Ce sont en général des produits semi-finis (12%), des produits finis qui ne sont pas produits localement et pour lesquels une offre potentielle existe. Ce groupe comprend également des matières premières et autres biens d’équipements (34%), qui contribuent fortement aux recettes douanières. La libéralisation particulièrement lente de ce groupe de produits, vise à permettre l’émergence d’un tissu industriel local dans les secteurs concernés. Figurent dans ce groupe, les matériaux de construction, le clinker à base duquel le ciment est fabriqué, le blé dur, les matières en caoutchouc, les produits dérivés du bois ou encore les articles de ménage. La libéralisation de ce dernier groupe de produits est prévue pour se faire sur une période dix (10) ans, à partir de la cinquième année de libéralisation, c’est-à-dire 2014.
Sont exclus de toute libéralisation douanière et tarifaire, certains produits qui présentent un potentiel de développement considérable, ceci en dépit d’une production actuelle limitée. C’est le cas notamment des produits bruts animaux et végétaux. Cette clause vise à promouvoir la diversification de notre économie, tout en protégeant l’offre locale.

Je voudrais m’appesantir à présent sur les clauses relatives aux taxes à l’exportation, qui sont également abordées dans cet Accord.
Il est en effet stipulé que les parties à l’Accord ne pourront plus créer de nouvelles taxes ou augmenter le taux de celles existantes, sauf en cas de difficulté notoire observée dans l’équilibre des finances publiques, ou pour les besoins de protection de l’environnement. Cette disposition étant applicable à chacune des deux parties, il est à observer qu’un équilibre parfait sera requis dans la politique fiscale des pays membres de l’Union Européenne vis-à-vis du Cameroun, et vice-versa.

Il est à noter qu’au titre du Règlement 1528/2007 adopté par le Parlement et le Conseil Européens, les pays qui n’auront pas ratifié d’Accords d’Étape, seront automatiquement reversés dans le système de préférences généralisées. Ce système, particulièrement désavantageux, est de nature à entraîner l’alourdissement des charges d’exportation et à renchérir nos produits, c’est-à-dire les rendre moins compétitifs ; avec comme conséquences directes, une réduction tendancielle des emplois, le ralentissement, voire l’arrêt des investissements privés, et donc un impact négatif sur la dynamique de croissance de l’ensemble de l’économie.

A contrario, le maintien du Cameroun dans le cadre préparé par l’Accord de Partenariat d’Étape, impacte directement et positivement son commerce extérieur, la compétitivité de son économie et la sérénité de ses finances publiques. Pour accompagner la mise en uvre de cet Accord, un plan d’adaptation de l’économie camerounaise a été arrêté, dont les principaux axes sont :
.le renforcement des capacités de l’offre ;
.le développement des capacités d’exportation ;
.les réformes institutionnelles et fiscales.

Par ailleurs, un Bureau de Mise à Niveau des Entreprises déjà opérationnel, prépare le tissu économique camerounais à l’amélioration de la qualité et de la normalisation, ainsi qu’à un accroissement de l’offre, à travers la modernisation de l’outil de production et l’optimisation du leadership et du management des entreprises. L’Union Européenne appuie cette démarche, à travers le Programme d’amélioration de la compétitivité de l’économie, pour un montant de 10 millions d’euros, soit environ 6,5 milliards de francs CFA. La phase pilote de ce Programme a déjà permis de mettre à niveau quinze (15) entreprises dans divers domaines, tels que la sidérurgie, la métallurgie, le textile, l’agro-alimentaire, le tourisme, le BTP, l’électronique, la mécanique, le cuir et la chaussure, etc.

Mesdames, Messieurs les Journalistes,
L’option prise par le Cameroun pour la ratification de l’Accord de Partenariat d’Étape avec l’Union Européenne, ne contredit en rien son engagement, au plan régional et notamment dans le cadre de la Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale – la CEMAC.
C’est ainsi que le Cameroun a impulsé la reprise des négociations entre d’une part, la Région Afrique Centrale comprenant la CEMAC, la République Démocratique du Congo et Sao Tomé et Principe, et d’autre part, l’Union Européenne, pour l’évolution vers les APE définitifs.
Cette configuration négociante s’est récemment retrouvée à Kinshasa, puis à Douala et à Libreville.

Il n’est pas superflu de préciser ici que la réunion de concertation régionale qui s’est tenue à Douala à ce sujet a été entièrement financée par l’État du Cameroun. À l’heure qu’il est, le Comité de négociation régionale du Cameroun s’apprête à prendre part dans les tout prochains jours à une quatrième configuration négociante qui va se tenir à Malabo, capitale de la Guinée Équatoriale.

Quant à la ratification par le Cameroun de l’Accord d’Étape, elle doit être perçue comme une approche stratégique traduisant l’ambition de notre pays, de conquérir des parts de marché sur la scène internationale, et surtout, de tirer profit de la diversification de son économie, pour la moderniser et exploiter à son maximum l’accès préférentiel de ses produits d’exportation sur le marché européen.
En nous conduisant vers la signature de cet Accord – je voudrais parler de l’Accord d’Étape – le Chef de l’État, Son Excellence Paul BIYA, s’inscrit une fois de plus dans une optique d’anticipation et de prise en compte des enjeux majeurs, tels qu’ils se structurent à l’échelle économique mondiale. Le seul souci qui habite le Chef de l’État à cet instant, c’est celui de la prospérité de notre pays, et partant, celui du bien-être de l’ensemble de ses concitoyens. Les risques inhérents à l’application de l’Accord de Partenariat Économique avec l’Union Européenne, sont donc parfaitement connus et absolument maîtrisés.

L’impact attendu sur la réduction de la pauvreté, le renforcement du tissu économique local et le redressement de notre balance commerciale, est de nature à être fondamentalement positif. De plus, il est établi que l’Accord de Partenariat Économique va créer un climat plus favorable pour la gouvernance économique, le commerce extérieur et les investissements. Il ouvrira de nouvelles perspectives de croissance et de développement pour notre économie, sans qu’aucune menace soit portée aux acquis de l’intégration régionale, à laquelle le Cameroun demeure solidaire, dans le cadre des négociations en cours au sein de l’Afrique Centrale.
Je voudrais d’ailleurs indiquer à ce sujet et à titre d’illustration, que notre pays prend actuellement seul en charge les études relatives à l’impact fiscal net des APE sur les économies de la sous-région Afrique Centrale.

Le Cameroun se situe donc dans une logique de combinaison et d’équilibre, entre une démarche bilatérale à titre intérimaire, qui préserve ses intérêts économiques, et une perspective multilatérale à terme, dans le cadre de l’ensemble sous-régional que constitue l’Afrique Centrale.

Je vous remercie de votre aimable attention.

Issa Tchiroma Bakary, le ministre de la Communication du Cameroun
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