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La révolte des paysans Burkinabé

Par Michel Lobé Etamé, journaliste A l'heure où la lutte des classes refait surface en Europe, les paysans africains sont…

Par Michel Lobé Etamé, journaliste

A l’heure où la lutte des classes refait surface en Europe, les paysans africains sont confrontés à d’autres luttes qui conditionnent l’avenir du continent et l’espoir d’une auto- suffisance alimentaire. Il faut reconnaître que les guerres en cours en Orient capitalisent plus d’intérêt en Occident. La peur de l’immigré est devenue un sujet qui ébranle les pouvoirs politiques et qui renforce l’implantation des partis extrémistes.

Les laboratoires de biotechnologies agricoles ont saisi l’extrême fragilité des dirigeants africains confrontés à la mauvaise gestion de leurs ressources et à la famine pour leur proposer des investissements spéculatifs. Les projets renforcés avec l’appui de la Banque Mondiale et du FMI ont ouvert la voie à la production des OGM (Organisme Génétiquement Modifié) pour mettre fin aux émeutes de la faim sur le continent.

La révolution verte était un espoir après les indépendances pour la liberté et la souveraineté alimentaire. Les multinationales agricoles, toujours promptes à secourir les pays pauvres en ont profité pour planifier des programmes de production des cultures vivrières et d’exportation. Le Burkina Faso a ainsi été le laboratoire de la culture du coton industriel depuis 2008. Face à la naïveté impardonnable des dirigeants sans garde-fou, ce « plan révolutionnaire » marquait une nouvelle étape dans la production intensive du coton.

Le piège des OGM
Le projet de la firme américaine Monsanto offrait de nouveaux moyens aux paysans :
-Des semences,
-Les pesticides contre les maladies du coton,
-Du matériel agricole, etc.

Le pouvoir politique s’est empressé, dans une campagne prise en charge par Monsanto, d’expliquer aux paysans les avantages de la production intensive pour un produit dont le prix allait continuellement grimper.

Dans cette configuration, personne n’a songé à la dépendance où s’enfonçait le pays. Le paysan ne pouvait plus utiliser sa semence. Il ignorait tout des effets nocifs des pesticides sur l’environnement, sur la santé, de l’appauvrissement et de la pollution des sols sans oublier la dépendance à l’égard de la firme. A court terme, tous les frais étaient supportés par Monsanto qui faisait du Burkina Faso son laboratoire modèle pour une nouvelle Afrique riche et généreuse.

Le credo des laboratoires étrangers ne varie point : baisse des coûts de production, récolte abondante, faible perte causée par les maladies, etc. Rien n’est mentionné sur la santé et l’environnement.

Ces promesses sont aujourd’hui remises en cause au Burkina Faso, au Sénégal et au Mali. Les paysans burkinabé se sont révoltés contre la firme américaine. Cette colère a retenti en Argentine considérée comme le grenier du monde et au Brésil. En Inde, la firme américaine vient d’avouer l’échec de son coton Bt.

Il serait temps de réfléchir à de nouveaux modèles de production mieux adaptés à l’Afrique. Des modèles cycliques en adéquation avec nos goûts alimentaires et une production qui fait appel aux pesticides biologiques qui préservent notre environnement et nos abeilles.

La production du coton à haut rendement va se poursuivre. Mais, elle doit se faire en préservant la santé et l’environnement. L’Afrique doit aussi limiter sa dépendance en créant sa propre banque de semences naturelles.

La papaye Solo
Les papayes de ma jeunesse n’étaient pas calibrées. Elles étaient colorées et savoureuses. Elles poussaient partout et offraient aux gamins que nous étions des goûter que rien ne pouvaient remplacer. Elles étaient naturelles.

Sur le marché camerounais, nos papayes ont été remplacées par de nouvelles papayes OGM baptisées d’un nom poétique: papaye Solo. Sans être un détracteur de la nouveauté, le consommateur ignore que la papaye Solo ne se reproduit pas. Il ignore que ce produit nouveau peut avoir des conséquences malheureuses à long terme sur la santé.

La papaye Solo risque de faire disparaître la papaye traditionnelle de nos villages. Il en est de même des nouvelles mangues calibrées, du manioc OGM, du maïs, du cacao ou du café.

Les cultures OGM polluent les sols. Elles maintiennent notre dépendance à l’égard des laboratoires étrangers qui multiplient des brevets à partir de nos propres produits. Ces nouvelles espèces transgéniques verront à long terme leur rendement baisser. Les conséquences seront fâcheuses.

Michel Lobé Etamé, journaliste
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