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La survie des réfugiées centrafricaines au Cameroun

Elles nourrissent leur progéniture à la sueur de leur front Dans son vieux pagne délavé, ses sandales dépareillées et usées,…

Elles nourrissent leur progéniture à la sueur de leur front

Dans son vieux pagne délavé, ses sandales dépareillées et usées, Halima Hammadou marche, tête baissée. A 35 ans, cette réfugiée centrafricaine ayant fui la guerre à Bangui en août 2014 est arrivée dans la ville de Meiganga, dans la région de l’Adamaoua au Cameroun, accompagnée de ses quatre enfants, mais sans son mari.

« Ils ont découpé mon mari et 30 autres hommes avec des machettes alors qu’ils priaient dans la mosquée du quartier, à quelques pas de la maison. Lorsque j’ai appris la nouvelle, je me suis enfuie avec mes enfants. Nous avons passé trois jours en pleine forêt, sans manger, ni boire. Nous avons par la suite marché à pied jusqu’à la ville camerounaise de Garoua-Boulaï et j’ai pris une voiture pour Meiganga », raconte-t-elle, la voix entrecoupée de sanglots et les yeux larmoyants.

A Meiganga, Halima vit dans une petite chambre au sol non crépi, à la fenêtre couverte par un vieux drap et dont la cuisine est en plein air. La marmite, elle, est toute noircie par la fumée. Il est bientôt 10 h et Halima vient de rentrer de la forêt. Mine fatiguée, elle s’apprête à aller vendre au marché de la ville, les morceaux de bois qu’elle y a trouvés.

Pour payer son loyer de 1000 F. Cfa (environ 2 USD) le mois, les fournitures scolaires de deux de ses enfants scolarisés, ainsi que leur nutrition, elle a décidé de « se débrouiller ».

« Je vais en forêt dès les premières heures de la matinée, avec ma machette pour couper du bois. Dès que je reviens, je vais les vendre au marché. Je gagne parfois 100 F et des fois 2 00 F », confie-t-elle d’une toute petite voix.

Selon les statistiques prévisionnelles du Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés « HCR » à la date du mois de décembre 2015, 233 890 Centrafricains se trouvent au Cameroun. Et comme Halima, des milliers de veuves ayant perdu leurs maris durant la crise en République centrafricaine « RCA », se sont réfugiées dans les villes situées tout au long de la frontière avec le Cameroun : Garoua-Boulaï, Meiganga, Gham.

« Elles ont peut-être tout laissé en RCA, mais ici au Cameroun, elles se reconstruisent. Elles n’entendent plus les bruits de canons et de machettes. Elles font n’importe quoi pour nourrir leurs enfants. Elles font du petit commerce, travaillent dans des champs comme cultivatrices et sont des ménagères », explique avec tristesse Mohamadou Badjika, président de la communauté des réfugiés centrafricains de Meiganga.

Au camp des réfugiés de Gado-Badzere, située dans la ville frontalière de Garouaa-Boulaï à l’Est du Cameroun, de nombreuses femmes figurent parmi les 23 000 réfugiés. Mariemou, 41 ans et mère de sept enfants, a perdu son mari, son père et son beau-frère dans ce qu’elle appelle : « la plus grosse bêtise de l’histoire des hommes centrafricains ».

Au Camp, elle vit dans une tente. Pour survivre, Mariemou vend des beignets faits à base de farine. Son chiffre d’affaires ? Elle éclate de rire, noue et dénoue son pagne aux couleurs vives et lance : « au départ, un gentil frère m’a donné un capital de 3 000 F.cfa (5 USD). Parfois je dépense tout pour acheter de la nourriture pour mes enfants car, ce qu’on nous donne n’est jamais suffisant. Et je veux que mes enfants soient bien nourris. Je ne veux pas qu’ils soient comme les barbares de Bangui ».

« Le HCR prend en charge l’éducation des enfants centrafricains, distribue régulièrement des denrées alimentaires, selon la taille des familles. Nous essayons d’aider autant que possible tous les réfugiés », explique Jose Katunga, chef bureau du HCR à Meiganga.

Si la vie est « difficile » pour les réfugiés, elle l’est encore plus pour les veuves qui se battent toutes seules pour s’occuper de leurs familles. « Je me lève chaque jour à 5 h, je vais au champ avec ma patronne et nous cultivons du manioc. Elle me paie 1000 F.cfa (1,67 USD) la journée. Lorsque la saison de culture passe, je travaille comme ménagère dans des familles », détaille Fatoumatou, rencontrée par Anadolu à Madjou, localité située dans la ville de Bertoua (Est).

Cette habitante du quartier PK8 à Bangui, a perdu son mari un mardi du mois de septembre 2014, alors qu’il rentrait d’une visite chez ses parents. Ayant appris la nouvelle, Fatoumatou, dernier-né de huit mois sous le dos; et ses deux frères se sont enfuis nuitamment, arrivant à Madjou « après des jours de marche ».

A 28 ans, Fatoumatou rêve d’un grand avenir pour l’aîné de ses enfants âgé aujourd’hui de neuf ans. « Je veux qu’il devienne docteur, rêve la jeune femme. Je vais travailler dur pour qu’il aille à l’école et soit l’un des plus grands docteurs de la RCA ».


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