Par Georges Njamkepo, expert consultant International
Cinquante années d’Afrique indépendante. et plusieurs millénaires de violence, on aurait pu croire que la colonisation à marche forcée, l’esclavage et les autres calamités qui se sont abattues sur le continent, avaient à tout le moins permis, après des régimes et des royaumes guerriers et son histoire sanglante, l’ouverture de notre Afrique à la civilisation de l’universel, une civilisation de paix, de concorde et de négociation pour l’avenir. Que nenni, les Africains pratiquent le culte de la mort et se complaisent dans les cortèges sinistres, lugubres et funéraires, ils n’ont jamais rien compris, ils n’ont du respect et ne se tiennent droit que face à la violence, ils ne comprennent que le message de la peur pour assumer la verticalité de leur humanité. Cinquante années d’indépendance, pour continuer à conquérir le pouvoir par le glaive et le sabre, le AK4 et la grenade à fragmentations, cinq décennies d’une violence à nulle autre pareil. Et avec ça, nous accusons les occidentaux de piller l’Afrique et de la vider de sa substance, oubliant qu’une part importante de l’essence même de l’universalité de l’humanité disparaît chaque fois qu’un africain est frappé par le fleuret de son congénère. A la place des occidentaux, j’aurai fait exactement la même chose et même mieux, vous encourager à vous entretuer en vous vendant des armes (en vous les offrant même, cadeau.), créer les conditions d’une violence extrême au milieu de laquelle, pince sans rire, je mets en place des couloirs humanitaires auxquels je participe avec enthousiasme, pour enfin piller tranquillement le continent à l’abri des autorités corrompues pendant que chacun essaie de couper le bras de son voisin. pourquoi pas ??!
Cinquante années d’obscurantisme conquérant et d’obscurité au service de la barbarie des hommes et de leur absence d’humanité et d’humanisme. Comment être encore fier d’être un africain, quand on sait que ceux qui nous dirigent et ceux qui les combattent, n’ont comme seul recours que la violence pour s’exprimer et le meurtre pour convaincre ? Comment être fier d’être africain quand on assiste à cet incessant voyage vers la mort, un ballet de corbillards où s’entasse nos infanticides, nos génocides et notre refus de la vie, des convois où viennent se mourir les espoirs de l’avenir et qui engendrent tous les jours encore plus de violence, de vendetta et de vengeance. Comment accepter de ne plus s’indigner alors que depuis plusieurs décennies, toute la population de l’Afrique a déjà eu le temps de disparaître quatre ou cinq fois en quelques années, comme si le paludisme ne suffisait pas, comme si le SIDA n’avait pas fait assez de mal, comme si la pauvreté ambiante et la malnutrition ne plombaient pas individuellement l’avenir d’un continent qui a déjà de la peine à se tenir sur ses pieds. Comment envisager de développer un pays, un continent, alors que tous les jours, au petit matin, chacun se réveille avec la peur, après avoir pleuré toute la nuit, à l’affût du moindre bruit des violeurs et des voleurs, à l’écoute du silence de la forêt, de ce qu’elle ne dit pas et de ce qu’elle a de plus mystérieux. comment, comment ??! Comment donc aller travailler quand on n’a pas dormi la nuit ??!
Comment alors envisager d’être debout et fier, si les gouvernants n’ont pour seul discours que la menace et le chantage, l’arme au poing et seront bientôt remplacés par leurs opposants avec les mêmes arguments ??! Ne sommes-nous finalement que des sauvages, des premiers et des primitifs sans avenir, sommes-nous finalement le maillon faible de l’humanité qui a refusé de sortir de son chaudron de pourriture, sommes-nous le gage des incertitudes sur l’avenir de l’humanité, avons-nous finalement peur de l’autre au point à rejeter tout ce qu’il peut nous apporter de nouveau, de modernité et de développement ?
Est-ce que nous croyons en nous, comme un frange déterminante de l’histoire du monde, comme un volet important de l’humanité, croyons-nous qu’il est possible à l’Afrique de se lever un jour, fière d’avoir été le berceau de l’humanité ??! C’est que, les africains dans la posture du pouvoir, aussi instable que soit cette position et ténue que soit ce pouvoir, les africains sont tous les mêmes, les mêmes causes dans les mêmes conditions produisant les mêmes effets, ils se déplacent allégrement avec droit de cuissage, lettre de cachet, violences verbales et physiques, menaces (de mort ou de licenciement), chantage, harcèlement psychologique… ils sont tous pareil, aucun pour rattraper l’autre, rares sont ceux qui décident d’être positifs et de poser des actes qui feraient avancer les autres.
Il en est ainsi dans les entreprises, les associations, les regroupements d’individus quel qu’ils soient, dès qu’un nègre (le mot est lâché) tient le pouvoir, observez bien ce qu’il en fait. « J’ai le pouvoir, alors j’ai le droit de cuissage et de servage sur toutes les femmes de ma chefferie, droit de vie et de mort sur chaque individu qui participe de la pyramide qui est au-dessous de moi. et j’en use, j’en abuse autant que ce pouvoir me sera abandonné ». Il y a encore quelques mois, c’est en grandes pompes que l’Afrique fêtait ses cinquante années d’indépendance et certains dans de grandes envolées lyriques se surprenaient à envisager, à rêver de rester au pouvoir, le tenir sans le lâcher et y finir leurs jours, en expliquant bien que cette indépendance acquise de haute lutte, ils en étaient jaloux. Ne voilà-t-il pas qu’au premier détour du chemin, au premier carrefour, certains appellent la France, les USA, la Communauté internationale pour les sauver du bourbier dans lequel eux-mêmes ont plongé leur pays ??! Que n’a-t-on pas entendu de clameurs en provenance du triangle de Tombouctou, Goma et Bangui ??! J’ai mal à ma Centrafrique chérie et pour notre Mali des mille et une merveilles, j’écrase une larme, j’ai de la peine pour les scarifications imposées de notre presque continent Zaïre. Mais, que n’a-t-on pas entendu en provenance des palais présidentiels, en appeler à la population, à l’union sacré du peuple, après la déroute de l’armée, à la mobilisation populaire avec machettes et coupecoupes (face à des chars et lance roquettes) pour sauver la patrie en danger. ??! Que n’a-t-on pas vu comme scène d’hystérie collective au centre de la ville, pour conjurer le mauvais sort et supplier la MICOPAX ou la FOMAC, le Conseil de Sécurité des Nations Unies et la MONUSCO ou les autres excroissances de l’ONU pour intervenir et sauver des pouvoir vacillants. Et après, fièrement, on se retournera contre les populations pour les mater grâce en cas de besoin, à cette armée qui n’a pu lever le doigt contre cette « rébellion ». Quel talent ??!… on appelle ça des dirigeants, bande de petits rigolos. que dis-je, des tocards !!! L’histoire s’écrit, c’est nous-mêmes qui tenons la plume et cette histoire a de ces revers tristes mais révélateurs, nous ne sommes plus à l’abri de la prochaine surprise que chacun dans son coin aura facilement devinée.
Oui, je me pose des questions sur la suite, je me demande dans quelle mesure il ne serait pas plus sage d’appeler ces occidentaux et les inviter à une recolonisation désormais officielle et publique, avouer notre incapacité parce que désormais inaptes à faire nous-mêmes le travail qui nous est confié par le peuple, afin de lever les illusions d’indépendance que l’on a voulu nous faire avaler durant ces cinquante dernières années.
Au moins, conscient de ce qui nous arrive, des enjeux et des forces en présence, sans plus aucun espoir et très bien informés des moyens limités dont ils disposent, les africains pourront mourir en paix, de faim et de pauvreté, de maladie et de désespoir en sachant au moins pourquoi ils meurent, qui les tue et ce qu’ils paient comme prix pour n’avoir pas été indépendants. Au lieu d’être martyrisés par des dirigeants africains d’opérette, des marionnettes qui prétendent diriger alors qu’ils n’ont aucun pouvoir sur leur propre destinée.
Oui je l’avoue, j’ai honte, j’ai profondément honte d’assister à ce massacre, mais je sais aussi que je ne suis rien, je ne compte que pour du beurre, il faut néanmoins que je le dise et que je vous souhaite.
Bonne année 2013.
