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L’Afrique sub-saharienne et l’Alternance politique

Par Yvon-Serge Badila, Ingénieur territorial en charge des Nouvelles Technologies et des Télécommunications en île de France

L’élection présidentielle Française de 2012 a été suivie et commentée pour diverses raisons, dans nombreux pays du monde, notamment dans la plupart des capitales d’Afrique sub-saharienne. Dans cette partie du monde, l’élection de François Hollande à la présidentielle du 6 mai dernier en France, a suscité en général, pour la société civile, un espoir au changement des régimes quasi-monarchiques, et pour l’élite au pouvoir, une crainte au principe de l’alternance politique. Aussi, cette peur de l’alternance me parait subjective, au regard des réalités politiques, socio-culturelles, et économiques dans la plupart des ex-colonies françaises d’Afrique.

L’Afrique, la société civile et l’élite
La société civile : Décrite comme un cercle en dehors de la famille, de l’État et du marché, la société civile est le lieu où les gens s’associent pour défendre des intérêts communs. Force est de constater que, partout dans le monde, la société civile est de plus en plus visible et gagne en influence dans certains domaines (Paix et prévention des conflits). Pour autant, la situation est moins brillante au sud du Sahara. En effet, cette société peut être présente et imperceptible, parfois partisane et inexistante. Dans cette région d’Afrique, cette société brille quelquefois, par un manque de prise d’initiatives, et par son absence dans les discussions. De ce fait, elle ne favorise pas, l’éducation des sociétés, l’émergence de discussions sur le développement, la bonne gouvernance, l’alternance en politique, et surtout la notion d’intérêt général.

L’élite : Dans la plupart des pays francophone du continent Africain, certains dirigeants sont aux affaires depuis plusieurs décennies ; un quart de siècle pour les uns, et plus pour les autres. Cette élite au pouvoir règne sans partage dans leurs états respectifs, confisquant les principes fondamentaux de la démocratie, d’alternance politique, et de renouvellement générationnel. En tout état de cause, elle hypothèque les chances de développement dans ces pays. Notons, qu’à chaque élection présidentielle française, cette même élite continue de penser que son salut viendra du président nouvellement élu. Certains d’entre eux tiennent souvent des discours d’un autre âge, voire d’un autre temps, le tout parfois teinté d’une mendicité affligeante, pour des pays souvent riches en matières premières. Ce positionnement intellectuel est consternant, de la part de cette élite dirigeante, issue pour la plupart de la génération postcoloniale. Souvent qualifié d’avenir, le continent Africain est l’endroit où pourra se jouer le futur de ce siècle, à la condition que, l’élite intègre dans son mode de fonctionnement, les notions suivantes, que je qualifie ici de RARE :
– La République. Elle doit être le socle commun de tous républicains, où seul l’intérêt public gouverne, où « le » politique exerce pleinement ses missions au service du peuple.
– L’Alternance politique. Elle est la réponse au renouvellement de l’élite gouvernante, au renouvellement générationnel. Son absence est considérée comme la véritable cause de l’instabilité politique dans cette région d’Afrique.
– La Responsabilité. L’élite doit être irréprochable dans sa gestion des deniers publics.
– L’Efficacité. Couplée au dynamisme, l’efficacité devra être au c ur de l’action des gouvernants pour améliorer les conditions de vie des citoyens.
De plus, l’élite devra faire plus de place à la société civile, et s’interroger sur le rôle de celle-ci dans une république.

Aussi grand que soit un homme politique, on ne peut expliquer, voire accepter, qu’au 21ème siècle, dans cette partie du monde, un dirigeant puisse passer la moitié de sa vie aux commandes d’un état. De même, les résultats obtenus en termes de réalisations au prorata du nombre d’années passées à gouverner, sont d’une médiocrité déplorable. Par ailleurs, après avoir fêté en grande pompe, pour la plupart de ces pays, leurs cinquante ans d’indépendance en 2010, la classe dirigeante des pays concernés, continue à surprendre. En effet, après la victoire de François Hollande à la présidentielle de mai 2012, j’ai été étonné d’entendre un chef d’état d’africain, actuellement président en exercice de l’Union Africaine (l’équivalent de l’Union Européenne) déclarer je cite : « le Président Hollande doit être le Porte-parole des Africains dans les sphères onusiennes », je me suis demandé, si l’élite de certains pays francophones, vivait le siècle présent ! Se pose-elle la question de savoir, qu’est ce que leurs concitoyens en générale, et la France en particulier attendent d’eux ?
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L’Afrique francophone et l’Alternance politique
Depuis la dernière élection présidentielle en France, dans la plupart des capitales des pays d’Afrique francophone, tout le monde s’accorde à dire qu’en démocratie, l’alternance contribue au renouvellement des idées et de la classe politique, a salué par la même occasion l’élection du candidat socialiste à la tête de la France. Cependant, dans ces anciennes colonies, l’élite gouvernante et la société civile se disputent le mot «ALTERNANCE». En effet, chacune des parties qualifie différemment ce principe en politique :
– La première, l’alternance est un vain mot, pas adapté dans certains pays (les leurs), et entend défendre ses privilèges, aux dépends du bien être de leurs concitoyens.
– La seconde, pense au contraire que dans l’intérêt général, ce principe est essentiel en démocratie, pour le renouvellement des dirigeants.

Dans ce contexte, rendre une légitimité aux dirigeants par le biais du jeu démocratique est vital pour améliorer les conditions de vie dans ces pays. Avec une population généralement jeune, qualifiée de moteur de la prospérité économique des années à venir, à condition qu’elle soit bien formée. De plus, compte tenu du vieillissement de la classe dirigeante dans la plupart de ces pays, il me parait urgent que l’Afrique réfléchisse, à la limitation d’âge pour toute fonction élective, pour se moderniser. Ce continent ne doit pas perdre de vue, qu’en cette période de crise et d’incertitudes pour tous, valoriser sa jeunesse favorise le renouvellement générationnel au sein de la classe politique, et apporte une véritable bouffée d’oxygène à la démocratie. Faire de la jeunesse une priorité est un enjeu important pour les défis futurs. Enfin, il est toujours bon de rappeler à l’élite dirigeante en d’Afrique sub-saharienne, qu’ « aucun pays ne peut en développer un autre. La responsabilité est l’un des facteurs du développement, et l’Alternance politique favorise le développement ». Aux enfants d’Afrique, je citerai Nelson Mandela « Aucun de nous, en agissant seul, ne peut atteindre le succès ». Comme l’a dit François Hollande, le 6 mai 2012 à Tulle, « Le premier devoir du président de la République, c’est de rassembler et d’associer chaque citoyen à l’action commune pour relever les défis qui nous attendent ».

Yvon-Serge Badila
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