Par Evarist Mohbeu
Participer aux J.O est une bonne chose,encore qu’il va falloir assumer, c’est-à-dire, ne pas rentrer bredouille. La promotion des sports au Cameroun est à l’image du pays. Dommage que ce pays voisin du Tchad que l’on ne sache pas renoncer à participer à un événement sportif planétaire quand on ne dispose pas des athlètes bien encadrés pour la circonstance. En 16 jours calendrier, la planète toute entière a vibré au rythme des jeux olympiques de Londres 2012. C’était l’occasion donnée au monde de suivre la prestation de la crème des disciplines olympiques. L’essentiel n’était pas de gagner, mais de participer, disent souvent certains observateurs. Mais, faut-il encore que les prestations soient de qualité et fassent honneur au haut niveau. En ce qui concerne le Cameroun, la délégation envoyée aux jeux Olympiques comportait 33 athlètes de neuf disciplines (athlétisme, football féminin, boxe, natation, aviron, haltérophilie, tennis de table, judo, lutte). Au regard des mauvaises nouvelles qui nous venaient de chaque jour de Londres, il y avait de quoi s’inquiéter et s’interroger si nos athlètes n’étaient pas allés à Londres simplement pour faire du tourisme et de la figuration. Que ce soit les footballeuses,les haltérophiles Fréderic Fokedjou et Madias Nzeusso,les nageurs Joyce Guedia et Paul Edingue,les sprinteurs Idrissa Adam et Delphine Atangana , le boxeur Thomas Essomba et ses coéquipiers,l’avironiste Paul Etia,la joueuse de tennis de table Sarah Hanffou,le judoka Dieudonné Dolassem,les camerounais ont tous mordu la poussière. Pendant que ces derniers mordaient la poussière de façon humiliante, les athlètes d’autres petits et grands pays en développement arrivaient à gagner ou à perdre, mais avec honneur. Il n’est pas interdit de perdre, mais faut-il encore défendre ses couleurs ou son drapeau. Ce qui n’est pas vraiment le cas pour nos athlètes battus à plate couture.
Ces humiliations subies à Londres doivent interpeller le mouvement sportif camerounais et surtout les autorités locales. C’est le moment de nous rendre compte du faible niveau de nos méthodes de préparation des compétitions internationales. Pour certains analystes, ces revers cuisants étaient prévisibles. Ils sont logiques et mérités. D’autant plus qu’il n’y a pas eu véritablement des préparations dignes de ce nom pour ces épreuves prévues de très longue date. Comme aussi, il n’y a pas eu des moyens conséquents mis à la disposition des fédérations pour se préparer à cette échéance capitale du sport mondial… C’est l’inverse qui aurait étonné. Des succès de nos athlètes à Londres, c’était du domaine des illusions. Car à ce niveau là les victoires sportives se préparent et se construisent par le biais des investissements et de la préparation rigoureuse. Du reste, nos échecs à Londres ne choquent pas car ils s’inscrivent dans la logique de notre démarche. Pour réussir au niveau des Jeux Olympiques, il faut avoir des ambitions et s’en donner les moyens. Et cela le Cameroun ne l’a pas fait. Les défaites subies par nos athlètes sont à mettre dans le compte de nos travers et nos improvisations habituelles. Les médias camerounais annonçaient récemment l’élimination des nageur dès l’entame des J.O. Tous oublient que la natation par exemple n’est pas un sport populaire au Cameroun, les pratiquants sont contraints de s’entraîner dans la piscine des hôtels de nos grande villes. La capitale camerounaise, à l’image du pays, n’est pas dotée d’une piscine olympique ni d’aucune autre structure de natation.
Il est vrai qu’au Cameroun, la vraie priorité concernant l’eau n’est pas la performance des nageurs, mais bien celle de l’eau potable. Comment peut-on de manière crédible expliquer qu’en 30 ans de pouvoir, le pouvoir actuel n’ait jamais pu construire un seul stade de football ou mieux un minimum d’un complexe sportif par région ? Les sbires du parti pouvoir ( RDPC) mus par leurs instincts d’égoïstes calculateurs vont très vite nous brandir des raisons conjoncturelles , mais il est simplement ridicule qu’avec tous les trophées remportés à l’extérieur du territoire national , que les jeunes camerounais n’aient pas de structure , ni dans la région du centre , ni celle du littoral qui sont les régions habitant les villes phares du pays. Si le Cameroun n’avait pas organisé de coupe d’Afrique des nations de football en 1972, où en serons-nous ce jour avec nos stades existants et vieillissants ? Il est d’un non sens évident que les compétitions comme la coupe d’Afrique des nations de football ne puisse pas voir le Cameroun parmi les candidats à leur organisation.
Il est normal que n’ayant pas d’infrastructures, que nous ne puissions pas nous présenter à de telles épreuves .Mais pourquoi n’a-t-on pas d’infrastructures sportives fiables au Cameroun ? Le basket-ball, le volley-ball, les sports nautiques, les sports de combats et bien d’autres disciplines sportives, ne disposent pas d’infrastructures permettant leurs pratiques. Les compétitions des dites disciplines se déroulent dans les établissements scolaires ou universitaires, dans les enceintes des entreprises et dans des espaces privés, généralement moyennant un paiement. « Le Cameroun a longtemps triché avec de vielles infrastructures et aujourd’hui la réalité nous rattrape. Le problème d’infrastructures se pose avec acuité chez nous alors qu’un petit pays comme le Bénin a plusieurs pistes modernes pour la pratique de l’athlétisme »,déclarait récemment Jacques Sébastien Mbous, le président de la Fédération camerounaise d’athlétisme, après la piètre prestation de l’équipe camerounaise d’athlétisme aux derniers jeux africains
En définitive, pour les années à venir, il va falloir revoir nos méthodes de préparation. Plusieurs de nos athlètes sont de haut niveau capables de défendre valablement les couleurs nationales mais, le Cameroun les utilisent mal. Ce pays est classé parmi les pays pauvres très endettés et ce à cause en partie d’une mauvaise gestion des devises nationales, des richesses naturelles et d’un énorme potentiel humain. Depuis près d’une trentaine d’année , on assiste à un ensemble de scènes qui tout en étant récurrentes finissent par être ridicules. Aux autorités camerounaises, nous réitérons que participer aux J.O pour faire de la figuration, n’est pas une bonne chose pour la promotion des sports au Cameroun. Si l’on veut changer cette donne, il va falloir renoncer à participer quand on ne dispose pas des athlètes capables de faire rêver un peuple déjà meurtri par des maux divers.
Paul Biya organise très souvent des cérémonies chaque fois que des médailles ou trophées rentrent au pays, ce pour montrer un signe fort de soutien à cette vaillante jeunesse sportive. Que va-t-il organiser cette année quand ces derniers sont rentrés bredouilles et que certains d’entre eux ont préféré ne même plus fouler le sol camerounais, le temps pour eux d’être à l’aise comme leur président actuellement en séjour à Genève ? Comme quoi le ridicule ne tue pas chez nous , surtout lorsqu’il est organisé par les décideurs.