L’ONG recommande à Paul Biya de ne pas se représenter à l’élection présidentielle de 2018 afin de maintenir la stabilité dans le pays
Certains le jugent «incendiaire», d’autres comme reflétant la réalité camerounaise sous cape. Le moins qu’on puisse dire, c’est que le dernier rapport de l’International Crisis Group sur le pays, publié le 4 septembre dernier sous le titre «Cameroun : Mieux vaut prévenir que guérir» ne suscite pas le consensus.
La proposition principale de ce rapport de 24 pages suggère la non-candidature de Paul Biya à la prochaine élection présidentielle qui aura lieu en 2018. Pour l’ONG, un cocktail explosif latent pourrait bien entrainer le Cameroun dans une crise si l’après Biya (32 ans déjà passés au pouvoir) n’est pas garantie. Selon l’ONG, il y a une «trop» grande fracture entre le régime et la société.
Le manque de crédibilité de la classe politique, celle de l’opposition y compris ; la faiblesse de la société civile peuvent provoquer «un mécontentement profond et non canalisé», s’inquiète l’ONG. Par ailleurs, l’impossible alternance par les urnes ; le chômage galopant des jeunes ; la pression sécuritaire à l’est (du fait de la crise en RCA) et au nord (du fait de la proximité avec le Nigéria) sont autant d’éléments qui constituent, pour l’International Crisis group, «un cocktail explosif en cas de transition imprévue».
Les mesures prises pour améliorer le cadre institutionnel au Cameroun, notamment l’adoption d’un code électoral en 2012 et la mise en place du Sénat en 2013 ne trouvent pas grâce auprès de l’ONG. Pour la première mesure, Transparency International considère qu’elle présente de nombreuses dispositions juridiques «floues»; tandis que pour la seconde, elle est, comme l’Assemblée nationale, majoritairement composée des hommes du parti au pouvoir.
Le jeu politique est «verrouillé» au Cameroun, juge International crisis group. L’ONG semble convaincue que l’opposition n’a aucune chance de remporter une quelconque élection présidentielle en l’état de l’organisation des scrutins au Cameroun. Pour elle, tout laisse par ailleurs penser que Paul Biya (âgé de 81 ans aujourd’hui), sera candidat à sa succession en 2018.
Résignation
«Bien que le pays soit sous tension, les Camerounais ne se révoltent pas pour au moins quatre raisons: ni l’opposition politique ni la société civile ne sont capables d’incarner et d’organiser le mécontentement ; certains estiment qu’il ne sert à rien de payer le prix du sang alors que le «vieux va bientôt mourir»; d’autres craignent que la chute de Biya amène au pouvoir quelqu’un de pire; d’autres encore disent se «positionner» pour 2018 ou 2025. Par ailleurs, les frustrations de la jeunesse sont atténuées par les soupapes de sécurité habituelles que sont l’émigration, la débrouillardise et l’accès à la fonction publique», semble savoir l’International Crisis Group.
Pour elle, afin d’éviter la situation imprévisible dans laquelle pourrait se retrouver le Cameroun si Paul Biya venait à partir de manière inattendue, il serait opportun que l’actuel chef d’Etat ne se représente pas en 2018.
Un «cadre de dialogue» entre le pouvoir, l’opposition et la société civile devrait être mis en place afin d’envisager la mise en place d’un certain nombre de réformes politiques. «Cette négociation porterait sur plusieurs réformes institutionnelles (révision constitutionnelle, réforme électorale, réforme de la lutte anti-corruption, etc.) en échange d’une absence de poursuites et du maintien des avoirs du président et de sa famille.», écrit International crisis group.
«Pour qu’il soit crédible, cet engagement doit être garanti par un acteur externe et impartial tel que l’Union africaine», propose l’ONG. L’interprétation de cette phrase provoque des discussions passionnées chez les hommes politiques camerounais, dont certains jugent que c’est une sorte de «mise sous tutelle» d’un «Etat souverain».
En cette période où on observe une sorte de dynamique des conflits sur le continent, le rapport de l’International Crisis Group peut également se lire comme une inquiétude formulée par un observateur extérieur sur les répercussions que pourrait provoquer un éventuel conflit au Cameroun. «Une crise politique interne aura des répercussions dommageables dans la sous-région Afrique centrale en créant un axe d’instabilité du Nord-Est du Nigéria au Soudan du Sud en passant par la République centrafricaine», relève l’ONG.
Lire l’intégralité du rapport de l’International Crisis Group de septembre 2014 sur le Cameroun

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