« L’an passé, cela va sans dire, j’étais petit. Mais à présent que je sais lire, écrire, c’est bien certain que je suis grand »
Voici la « récitation » qu’annonçaient les moyennants, les élèves des cours moyens, première et deuxième année- quand toute l’Afrique coloniale française lisait ce manuel de lecture : Mamadou et Bineta sont devenus grands. C’est la proposition du texte de v ux que j’ai faite à Monsieur Jacques Toubon, cet ancien ministre chiraquien auquel Sarko a confié l’organisation des festivités 2010, année de l’Afrique. C’est comme ça que, pendant tout le mois de janvier, je vais faire un certain nombre d’intrusions dans les cerveaux de certains dirigeants responsables du monde, afin, chers lecteurs, de vous rendre compte des vrais v ux qu’ils adressent ou qu’ils auraient voulu adresser à leur contemporain.
Puisque l’occasion m’est ainsi donnée, moi, Faka Bilumba, l’être intemporel qui, du sommet de l’intelligibilité, vous rapporte de façon sensible les vraies choses que les vivants, les ayant-vécu et les « pas encore en vie » disent, pensent, ourdissent et analysent. Je vous dis Bonne Année. J’ai surpris un complot des élèves qui veulent dépasser leur maître. Il y avait entre autre Madame Fadela Amara dite Karcher II, et Besson l’Exotique.
– « J’ai longtemps cherché comment démontrer que j’ai vraiment tourné ma veste, que je suis devenue tout-à-fait le contraire de ce que je confessais dans l’association que je présidais, « Ni Putes, ni Soumises »; j’emploie les termes de mon maître auquel je suis entièrement soumise ; donc, il me faut aussi des karchers pour nettoyer ces banlieues que je n’habiterai plus jamais. »
– « C’est vrai, répondit Besson. J’étais dans la confidence quand « l’Auvergnat » parlait de te dégotter un pied-à-terre à Neuilly, car on pourrait te confondre, vu ton teint basané et ton faciès, avec la « caillera »* lors du nettoyage des banlieues avec tes propres karchers. J’ai d’ailleurs mis à l’abri toute la famille de ma dulcinée. J’ai explosé ma feuille de mission. Plus de trente mille expulsions d’étrangers, non seulement j’ai expulsé plus qu’on me le demandait, mais aussi et surtout, j’ai explosé les accords qui nous empêchaient de renvoyer les demandeurs d’asile dans leur pays en guerre. C’est Kouchner qui m’a appris à ne pas avoir d’états d’âme, c’est ça le « droit d’ingérence solidaire en Afghanistan ». »
– « Est-ce que vous vous êtes entendus parler ? » s’offusqua Eric Zémour. Quand je pense que je prône et vante les qualités de l’école de la République, que mes interventions dans les journaux, les radios et la télé ont pour but principal d’anéantir toute culture de banlieue comme le rap, de cultiver l’élitisme républicain, de parler de « nous » les Français en prenant soin d’exclure subtilement certains basanés, même de grands basanés comme ces ultra-marins qui votent pour rester avec « nous ». Je confirme ce que je disais dans ma chronique sur R.T.L. il y a quelques jours ! Je ne comprends pas, est-ce que « nous » ne sommes plus colonialistes ?… »
« Du calme, mon petit Zemour ! lui lança Calixte Beyala. Du calme, sinon on s’explique à ma façon, et je te fais passer mon quart d’heure de folie ! Je sais que tu fais partie de cette bande « d’intouchables » qui ont tous les droits de dire mais de qui il ne faut rien dire ! Il y a ces réalités-là ! Je veux peut-être bien que vous bannissiez Dieudonné ! Mais moi alors ! Quand je pense qu’il y a des humoristes qui se sont enrichis en cultivant des blagues racistes comme « Ce ne sont pas mes lunettes de soleil, ce sont mes narines », de Michel Lebb. Et cet animateur de télé, aujourd’hui décédé, qui écrivait et disait impunément qu’il fallait couper le zizi des Africains qui faisaient trop d’enfants ! Et ma consoeur, Marie Ndiaye, comment l’a-t-on traitée après son prix Goncourt ! Comme moi après mon prix de l’Académie Française, et par ton cousin sur R.T.L. aussi ! ».
– « Madame Beyala, laissez tomber ! On vous traite d’excessive alors que vous dites des vérités. N’a-t-il pas fallu que vous tiriez la sonnette d’alarme en dénonçant le paysage audiovisuel français où il n’y avait aucun Noir comme journaliste à l’écran. Je suis comédien, et j’ai eu des rôles dans le feuilleton français « Plus belle la vie ! » -parole d’Abessolo Mbo- je croyais que nous allions sortir du ghetto des comédiens de couleur, où, en France, on n’écrit pour nous que des rôles dévalorisants pour Nègres et Arabes de service ! Moi, dans la série, j’étais un ancien dealer, voyou repenti et devenu curé, il y a longtemps qu’on ne me voit plus. Puis il y a eu cet avocat arabe, qui est parti. Ensuite un amoureux noir et son fils revanchard… partis. Et maintenant un avocat noir pas très clair vu son passé et son frère fumeur de joints. C’est peut-être à travers des séries comme celle-là que la France définit sa vision de l’identité nationale ! »
– « Encore ! Vous n’avez pas fini avec cette identité nationale ? Moi, Mitterrand, je regarde en me tordant de rire comment vous vous empêtrez dans des contradictions pas possibles. Ce n’est pas sérieux de faire semblant d’ironiser, de s’étonner à propos du mariage du président sud-africain Mbeki avec sa troisième épouse, l’épouse numéro trois, car il est polygame. Si l’identité française se définit, entre autres, par la monogamie, le mariage homosexuel et l’adoption d’enfants par des couples d’homosexuels, la tolérance des clubs nudistes et l’interdiction des burkas ou autres voiles intégraux, sachez, mon cher Sarko, qu’il y a des pays souverains où la polygamie est une culture -elle y est légale- et des pays où l’homosexualité est un délit. Mais tu joues à Zorro en allant chercher des prisonniers délinquants, enleveurs d’enfants au Tchad et dealers en Amérique Latine, et tu demandes aux autorités sénégalaises de sortir de prison les homosexuels, alors qu’il n’y a pas longtemps, tu les injuriais chez elles, à Dakar, dans ton fameux discours. »
– « Et moi, Faka Bilumba, je vous demande, chers lecteurs, si l’idée d’inviter quelques réfugiés sismiques, économiques et cycloniques de cette terrible Haïti à venir vivre en Afrique n’est pas un des plus beaux cadeaux qu’on pourrait leur faire en ces temps où nous avons des pensées pour eux! ».

Journalducameroun.com)/n