Le ministre de la justice a rappelé que leur pays n’est pas signataire du traité de Rome instituant la CPI et n’accepte pas la juridiction de la Cour
La Cour pénale internationale (CPI) a délivré un mandat d’arrêt pour crimes contre l’humanité contre le colonel Mouammar Kadhafi. Cette annonce, faite lundi 27 juin, a été saluée dans la joie à Benghazi, deuxième ville du pays et bastion de la rébellion libyenne, ainsi qu’à Misrata. La population s’est laissé aller à des scènes de liesse, tirant notamment en l’air des rafales d’armes à feu. Il y a des motifs raisonnables de croire que (…) Mouammar Kadhafi, en coordination avec son cercle rapproché, a conçu et orchestré un plan destiné à décourager la population qui était contre le régime, a souligné la juge Sanji Mmasenono Monageng, lors d’une audience publique à La Haye. Le régime libyen affirme de son côté qu’il s’agit d’une couverture pour l’Otan qui a essayé et tente encore d’assassiner Kadhafi. Le nouveau ministre de la Justice libyenne, Mohamed Al-Gamoudi, a rappelé ce lundi que son pays n’est pas signataire du traité de Rome instituant la CPI et n’accepte pas la juridiction de la Cour. Les juges ont lancé conjointement des mandats d’arrêt contre l’un des fils de Kadhafi, Seif Al-Islam, et contre son beau-frère Abdallah Al-Senoussi, chef des services de renseignements, comme l’avait demandé le procureur Luis Moreno-Ocampo dans une requête déposée le 16 mai. Les trois hommes sont accusés de meurtres et de persécutions constitutifs de crimes contre l’humanité commis par les forces de sécurité sur la population civile libyenne depuis le 15 février, notamment à Tripoli, Benghazi et Misrata.
Saisi par le Conseil de sécurité des Nations unies dès le 26 février, deux semaines seulement après le début de la révolte en Libye, le procureur de la CPI avait ouvert son enquête le 3 mars. Les trois hommes, estime-t-il, sont criminellement responsables des meurtres, arrestations, détentions, disparitions et mauvais traitement contre des manifestants non armés et des dissidents présumés commis par les forces de sécurité libyennes depuis le 15 février. L’annonce des mandats d’arrêt intervient alors que la campagne de bombardements de l’Otan pour aider les rebelles libyens dure depuis cent jours et que le conflit s’enlise, le colonel Kadhafi étant toujours au pouvoir. La révolte a fait des milliers de morts, selon le procureur de la CPI, et entraîné la fuite à l’étranger de près de 650 000 Libyens et le déplacement à l’intérieur du pays de 243 000 autres, selon l’ONU. Au nom de l’Afrique, le président sud-africain Jacob Zuma avait haussé le ton dimanche contre l’OTAN, soulignant que les forces occidentales n’avaient pas été mandatées par l’ONU pour conduire l’assassinat politique de Kadhafi.
Après l’émission du mandat d’arrêt de la CPI à l’encontre de Mouammar Kadhafi RTL révèle le matin du 28 juin que le dirigeant libyen fait aussi l’objet d’une plainte en France pour séquestration. Cette plainte a été déposée avec constitution de partie civile au tribunal de grande instance de Paris par la fille d’un mercenaire français disparu en Libye à la fin des années 70. Michel Winter avait été recruté par le régime libyen et avait ensuite découvert que son objectif était de détruire des avions français. Il avait alors refusé sa mission avant d’être arrêté puis emprisonné puis il avait disparu. Les dernières preuves de vie de cet ancien parachutiste remontent à la fin des années 1980. Les réactions ne se sont pas fait attendre après l’annonce du mandat d’arrêt contre Kadhafi. L’Union européenne soutient pleinement la Cour pénale internationale, qui joue un rôle clé dans la promotion de la justice internationale, souligne une déclaration publiée par la chef de la politique étrangère européenne, Catherine Ashton. L’Otan a pour sa part salué la décision de mise en accusation prise par la CPI. Cette décision souligne une fois de plus l’isolement croissant du régime de Kadhafi, a affirmé le secrétaire général de l’OTAN Anders Fogh Rasmussen, dans un communiqué. En attendant, Le Guide n’entend pas céder à la pression internationale, tout comme son homologue Omar el Béchir qui l’a précédé dans les mailles de la CPI.