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L’implication du secteur privé dans une lutte contre le paludisme est essentielle pour accélérer les progrès en Afrique

Par Hervé Verhoosel, Responsable des relations extérieures du partenariat Roll Back Malaria 25 avril: Journée mondiale de lutte contre le…

Par Hervé Verhoosel, Responsable des relations extérieures du partenariat Roll Back Malaria

25 avril: Journée mondiale de lutte contre le paludisme

L’implication du secteur privé dans une lutte contre le paludisme est essentielle pour accélérer les progrès en Afrique.

Nous sommes arrivés à l’échéance des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) de 2015 et la lutte contre le paludisme se trouve dans une situation paradoxale. La maladie recule dans de nombreuses régions comme l’indique le dernier rapport mondial de l’Organisation Mondiale de la santé sur le paludisme (décembre 2014), 3,3 millions de vies ont été sauvées entre 2001 et 2012. Cependant ces gains pourraient se trouver brutalement menacés par un possible recul des financements dans les années à venir. Partout où l’on a pu observer une rupture des financements, on a assisté à une recrudescence des cas de paludisme de façon systématique et mécanique.

C’est pour cette raison que la mobilisation doit redoubler tant au niveau des pays donateurs que des pays endémiques. Les investissements dans le domaine du paludisme ont un effet immédiat sur la vie de centaines de milliers de personnes. En un peu plus de dix années les financements ont été multipliés par dix, ce qui a permis de sauver des millions de vies en Afrique, et d’épargner chaque année plusieurs centaines de milliers de dollars en dépenses de santé et en productivité perdue due à l’absentéisme scolaire ou professionnel. Les bénéfices dépassent de loin les faibles investissements engagés : quelques dollars permettent d’acheter des moustiquaires pour une famille entière ; et pour un peu plus d’un dollar ou moins on peut acquérir un traitement efficace dans de très nombreux pays du continent. Et pourtant chaque minute qui passe emporte une vie, un enfant de moins de cinq ans en Afrique.

La lutte contre le paludisme représente un levier pour le développement économique de tout un continent et le secteur privé a un rôle éminemment important à jouer dans ce combat. Au-delà de l’impératif moral d’agir, les investissements du secteur privé dans la santé des employés sont évidemment essentiels pour la protection du personnel. J’ai souvent pu constater que ces services s’étendent au-delà des employés de l’entreprises pour couvrir une population beaucoup plus large. L’impact de l’engagement du secteur privé représente donc un vrai bénéfice pour la communauté toute entière.

Des résultats spectaculaires ont été obtenus dans de nombreux pays grâce à des approches innovantes. Entre autres exemples : l’implication du plus grand pétrolier et producteur de gaz de Papouasie-Nouvelle-Guinée, Oil Search Limited, qui est devenu un partenaire de premier plan dans la lutte nationale contre le paludisme. En développant un programme de lutte antipaludique destinée à protéger son personnel, les efforts de cette grande entreprise ont permis d’atteindre une impressionnante diminution de la prévalence du paludisme dans les communautés visées. Au Ghana, AngloGold, une société d’exploitation de l’or a participé aux côtés des ONG à la mise en uvre des programmes de pulvérisations intradomiciliaires. L’industrie du cuivre et du sucre s’est fortement mobilisé ces dernières années en Zambie avec un investissement très important sur la prévention et le traitement, entraînant ainsi une baisse substantielle des cas de paludisme parmi les employés et leur famille. Il en est de même avec Marathon Oil en Guinée Équatoriale pour toute l’île de Bioko. La gestion de stocks de médicaments antipaludiques ainsi que la transmission des données et informations sanitaires ont également été améliorée dans de nombreux pays grâce au soutien de sociétés de téléphone mobiles.

L’investissement du secteur privé ne doit cependant pas se limiter à la seule zone d’intervention des entreprises. Il doit s’intégrer autant que possible dans le cadre d’une approche multisectorielle au niveau national. L’approche collaborative et coordonnée de tous les acteurs de la lutte contre le paludisme est en effet une condition indispensable pour une lutte efficace et durable. A l’initiative de Santé en Entreprise et du partenariat Roll Back Malaria des missions au Bénin et au Cameroun vont permettre début mai de réunir des partenaires publics et privés afin d’harmoniser les efforts de lutte et multiplier ce type de partenariats dans de nombreux pays d’Afrique francophone.

Un monde sans paludisme est possible même si cela se fera sur le long terme avec l’arsenal actuel de lutte . Mais la recherche progresse, recherche pour de nouveaux médicaments, insecticides, vaccins et tests de diagnostics. Cependant au jour d’aujourd’hui chaque décès du au paludisme doit être considéré comme un échec du système car nous avons les moyens d’y mettre un terme : c’est l’objectif réalisable que s’est fixé la communauté internationale et les partenaires de Roll Back Malaria.

Chacun a un rôle à jouer. Le partenariat Roll Back Malaria s’efforce au quotidien de rassembler tous les acteurs susceptibles de participer à cet effort sans relâche, qu’ils soient du secteur public ou privé, de pays donateurs ou de pays impaludés, des communautes elles-mêmes, des ONG, des institutions de recherche et de formation. Partout, nous organisons des espaces de dialogue avec tous les partenaires pour coordonner les efforts de lutte et innover sans cesse. Les progrès enregistrés nous obligent tous à poursuivre et à amplifier nos efforts, chacun peut contribuer efficacement et le secteur privé a pleinement son rôle à jouer dans cette bataille décisive pour la santé et le développement du continent tout entier.

Hervé Verhoosel, Responsable des relations extérieures du partenariat Roll Back Malaria
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