Elle nous a ouvert son univers de rêve un après midi. Découverte
Dans le XVIIIe arrondissement de Paris, entre la porte de St Denis et celle de Clignancourt, Marie Sabal Lecco tient un univers qui lui est propre. Un atelier logement que la mairie de Paris lui a octroyé afin qu’elle puisse travailler en toute sérénité et exposer ainsi aux visiteurs une partie de ses uvres. Une reconnaissance palpable du travail de celle qui dans le début des années 90 faisait carrière dans le secteur juridique et bancaire. En ces années là, elle est loin d’imaginer que sa vie prendra une autre rive, suivant le cours des difficultés d’intégrations professionnelles des noirs en France. Là où d’autres auraient dit Je me suis mise à la peinture par passion, elle, nous dit je me suis mis à la peinture par raison, je n’avais que ça pour rebondir, après un passage à vide effroyable. Une amie qui faisait de la peinture acrylique m’y a encouragée, je me suis initiée et j’ai bossé dur. Depuis 1992, elle peint, peint et peint. Elle peint à l’acrylique sur toile, mais également sur porcelaine, verre, bijoux, bois et tissu.
Elle a son univers pictural, sa touche de génie: Le premier style, fait de répétitions de mouvements, de multiples corps les uns près des autres, enchaînés, dénonce l’esclavage, la violence, le racisme. Mais aussi, ces corps représentés les uns proches des autres symbolisent l’humanité et le bonheur d’être ensemble. J’ai aussi le style
arrondi, tout en couleurs pastel et tout en courbes qui renvoie à la notion de la féminité. Les femmes toutes en rondeur rendent hommage à la beauté. Une beauté telle que dans l’imaginaire de l’artiste : Rondeurs et couleurs ne choquent personne. Le temps est passé, Marie Sabal Lecco a réussi à se faire un nom. Et à collectionner les prix. En 2000 elle participe à une exposition itinérante en Israël, réunissant 125 peintres ayant travaillé avec des enfants sur le thème de la tolérance. Le prix de la Tolérance est attribué aux enfants français. Elle expose la même année en Israël en tant que lauréate du Prix Femina de peinture pour la France (reçu en Israël). En 1998 elle peint une rame du métro parisien pour la participation du Cameroun à la Coupe du Monde de Football. En 1999 elle expose à la Mairie du 18ème arrondissement, lors de la Commémoration des 150 ans de l’abolition de l’esclavage.

Et le Cameroun dans tout ça ?
J’ai travaillé avec le Ministère de la culture du Cameroun lors de la visite de M Paul Biya en 2007 à l’Unesco, j’ai donc exposé avec quelques peintres camerounais à l’Unesco, malheureusement il n’y a pas eu de suivi avec le Ministère de la culture et je peux dire que j’ai été quand même assez déçue par l’attitude des uns et des autres. Les tableaux que j’ai exposés à l’Unesco étaient parmi les plus beaux car mon président venait et je voulais lui présenter mon travail. Deux m’ont été rendu lacérés et sans aucune forme de recours pour moi sachant que je suis artiste et je gagne ma vie en tant que peintre, et c’est mon outil de travail qui a été détérioré. J’ai écris une lettre à Mme MUNA (ministre de la culture, Ndlr) pour lui raconter ce qui m’était arrivé et je n’ai pas eu de retour et je ne sais même pas si elle l’a bien reçue. En somme, un triste souvenir. Ce qui ne l’empêche pas de se sentir camerounaise, d’être fière de l’être même si, rien n’est fait pour valoriser la culture camerounaise à l’étranger et les talents des artistes camerounais, pourtant reconnus ailleurs.

La France lui a offert la reconnaissance et elle le lui rend bien. je m’occupe des enfants de mon quartier en les éveillant grâce à la peinture. Elle s’occupe des enfants à qui elle apprend son métier et qui en retour lui offrent de beaux dessins qu’elle collectionne sur ses portes. En 2001, les enfants de ses ateliers ont réalisé une fresque au 28-32 rue de la Goutte d’Or, dans le 18ème arrondissement de Paris. Vernissage, rencontre, expositions. Voilà le quotidien de cette artiste qui s’inspire de son environnement de vie pour raconter la vie dans ses toiles. Elle est issue d’ une famille connue au Cameroun. Son père Félix Sabal Lecco, acteur de premier plan dans la vie politique camerounaise a embrassé les carrières de haut commandement, gouvernement et diplomatie. Aujourd’hui encore, il fait partie de la vie publique camerounaise puisqu’il est président du conseil national de la communication. Ses frères sont des musiciens de renommée: Plus connu comme batteur, Félix Sabal Lecco a été bassiste au sein du groupe de son frère Roger avant de prendre son envol grâce à Rhythms of the Saints de Paul Simon. Ce sera le début d’une carrière internationale pour les deux frères, Félix comme batteur et Armand comme bassiste.
Marie Sabal Lecco est loin de son pays mais ce que j’aime manger et ce que je sais faire du Cameroun c’est le n’dolé. J’ai la chance d’habiter dans le 18e, on trouve les ingrédients au marché. Sinon j’aime beaucoup la sauce gombo avec le foufou, mais je ne suis pas tellement experte. A part ça j’aime aussi la sauce d’arachide. Une façon de conclure en disant, je suis camerounaise et fière de l’être. Comme au début de la rencontre.
