Avocat à la CPI, président de Avocat sans frontière Cameroun, il présente les textes de lois qui obligent les représentations diplomatiques à venir en aide à leurs ressortissants
Est-ce que les consulats et ambassades ont l’obligation d’assister leurs citoyens résidents en prison ?
C’est une obligation pour tout Etat, d’assurer à ses citoyens résidents à l’étranger une protection diplomatique. C’est un principe de droit international consacré, il n’y a pas de distinction à faire. Il y a seulement des aménagements en fonction de la situation dans laquelle se trouve chacun de ces citoyens. Les ressortissants qui exercent des activités commerciales doivent bénéficier de l’assistance du consulat. Ceux qui pourraient se trouver en détention dans les maisons d’arrêts doivent également faire l’objet d’une attention particulière de la part de leur autorité consulaire. Les autorités carcérales, c’est à dire les régisseurs de prison, ont également l’obligation de tenir informé les autorités consulaires de l’état des citoyens étrangers qu’ils détiennent dans leur maison d’arrêt. Par ailleurs, le traitement de ces citoyens étrangers en détention ne devrait pas être discriminatoire par rapport à tous les autres détenus qui se trouvent là. Donc, ils doivent bénéficier de toutes les mesures d’hygiène, d’entretien, d’éducation, de rééducation que prévoit la maison d’arrêt sur la base des principes de règles minima en matière de traitement des personnes en détention. Il n’y a pas de traitement discriminatoire, et une obligation d’informer les autorités consulaires de l’état des détenus étrangers. Et les autorités consulaires ont l’obligation de venir au moins voir dans quel état se trouve leur compatriote et de prendre des mesures appropriés pour leur assurer l’assistance requise pour que leur état de détention ne devienne pas un calvaire, c’est un devoir.
Quelles sont les lois qui obligent ces autorités diplomatiques à venir en aide à leurs compatriotes ?
Les conventions de Vienne sur les relations diplomatiques et consulaires, ainsi que les grands principes et pratiques en matière diplomatique. Lorsque je vous parle par exemple de la protection diplomatique, c’est à la fois une règle de coutume internationale consacrée par les conventions de Vienne et toutes les autres conventions annexes qui régissent les relations consulaires et diplomatiques entre les Etats. Voilà la principale base. Maintenant, s’agissant du traitement des personnes détenues, y compris les personnes étrangères, il faut se référer aux règles minima de détention établies par les Nations unies sur le traitement des personnes en détention. Lesquelles règles minima ont été reprises par les Etats africains à travers les déclarations d’Arusha et de Kampala, et lesquels Etats ont l’obligation de les intégrer dans leurs textes législatifs. Il faut dire qu’au Cameroun, nous avons un texte obsolète bien que le Cameroun dans la pratique essaie de s’adapter. Notre texte date de 1992, mais prévoit néanmoins un minimum de règles impératives de traitement des personnes détenues. Voilà en gros l’ensemble des références textuelles.
Que peuvent faire les détenus étrangers oubliés en prison, comme c’est le cas avec les centrafricains en ce moment ?
C’est une situation malheureuse, mais qui ne concerne pas seulement les détenus centrafricains, comme vous le savez. En ce qui les concerne, je dois avouer que je peux comprendre que leurs autorités consulaires ne réagissent pas, puisque la Centrafrique est en état de trouble, comme vous le savez depuis de nombreuses années. Mais, ils doivent insister auprès des autorités consulaires. Les Ong comme Avocat sans frontière, ainsi que tous les autres Ong opérant dans le domaine de l’assistance sociale, devraient être alertées soit par eux – mêmes, soit par le biais des journalistes tels que vous, pour pouvoir suppléer à ce manque d’assistance, dont ils sont victimes de la part de leurs autorités consulaires. Nous allons leur rendre une visite en urgence pour voir ce que nous pouvons apporter, afin d’améliorer leur état en ce moment
Que doivent faire les détenus étrangers ?
Les détenus étrangers ont des droits. Ils doivent solliciter des régisseurs de prison où ils se trouvent, afin que ceux-ci informent dûment les autorités consulaires de leurs pays de leurs présences dans ces maisons d’arrêts. Si les autorités ne peuvent pas le faire, il faut qu’elles passent par l’intermédiaire des assistants sociaux qui, en général, visitent les prisons assez souvent. Les détenus étrangers ne doivent pas attendre ; ils doivent prendre l’initiative de faire savoir aux autorités consulaires qu’ils sont dans les maisons de détention.
Existe-t-il des sanctions pour les consulats qui refusent de venir en aide à leurs citoyens ?
Les autorités consulaires représentent leurs Etats. Il n’y a pas de sanction à l’égard d’un Etat. Ce sont des règles de droit international que l’on accepte volontairement d’appliquer. Ca peut donner lieu à une interpellation du Haut commissariat des Nations unies pour les droits de l’homme, une interpellation de l’Etat sur la manière dont il traite ses étrangers. Mais ceci se fait beaucoup plus lorsqu’on observe des traitements défavorables sur le territoire même de l’Etat, et non pas à l’égard des citoyens qui résident à l’étranger. Pour vous répondre plus clairement il n’y a pas de sanction formelle.