Le promoteur du premier studio de création de jeux vidéo en Afrique centrale mobilise les financements pour la pépite de Kiro’o Games
Depuis une dizaine d’années, vous concentrez vos efforts sur la création d’un studio africain de création de jeux vidéo, Kiro’o Games, et la sortie d’un premier jeu, Aurion. Pouvez résumer le concept ?
Merci de nous accorder cette interview. Bien évidemment, j’ai commencé à travailler sur le projet du jeu Aurion depuis 2003. L’historique du Studio disponible sur notre site web www.kiroogames.com peut illustrer mes propos. Plutôt que de faire plusieurs petits jeux, j’ai préféré conserver le premier pour le mûrir afin de lui donner une vraie âme. Aurion: L’Héritage des Kori-Odan est lié à l’histoire d’ENZO Kori-Odan. Il est basé sur le principe de définir son futur en utilisant les forces du passé. Et puisqu’en Afrique nous sommes très rattachés aux cultes ancestraux, j’ai voulu créer une énergie qui aurait pour source cette spécificité culturelle. Cette énergie est donc l’Aurion. Notre inspiration nous la tirons, en particulier, de la culture africaine, de notre histoire, de notre vécu quotidien, des drames divers que nous vivons (surtout en termes de réflexion, de défis et d’enjeux qu’ils soulèvent), sans toutefois se positionner comme des victimes. Elle (la culture africaine) nous a permis de créer un nouveau genre ludique, le Kiro’o Tales, qui est une sorte d’African Fantasy et qui nous sert de jalons pour produire le jeu. L’AFRICAN FANTASY est un genre que j’ai découvert paradoxalement dans un livre de l’auteur français Jean-Christophe Chaumette, intitulé La quête du neuvième cercle. J’ai récemment découvert des auteurs africains très doués sur le sujet comme Momi M’Buze qui a écrit les Chroniques de l’empire Ntu. Le principe de l’African Fantasy est assez simple. Vous prenez un élément d’une culture ou mythe africain, et vous imaginez une version « extrapolée » dudit élément, un peu comme en science-fiction où l’on imagine un futur où l’artisanat est 1000 fois plus avancée que maintenant.
Qu’est-ce qui vous a motivé ?
Je préfère dire ce qui nous motive (rires). Parce que «nous a motivés» signifie aussi que la motivation n’est plus à 100% comme au tout début. Tout au contraire, elle frôle les 200% (rires). Bien, ce qui nous motive ou nous inspire le plus dans l’industrie africaine/camerounaise du jeu vidéo est le fait que nous pouvons apporter, au travers de notre culture, de nos traditions, du nouveau genre ludique qu’est le Kiro’o Tales, de notre Gameplay, une source nouvelle d’inspiration dans le secteur du jeu vidéo à l’échelle internationale. Donc, c’est cette envie de proposer quelque chose de neuf à la Communauté Internationale qui nous inspire et nous motive le plus. Outre ceci, une autre source de motivation est le fait que nous soyons des pionniers sur le Continent. A cet effet, nous avons tout à prouver et ne devons en aucun cas échouer, vu que tous les regards sont posés sur nous. Notre devoir est d’assurer une viabilité pour tous les futurs GameDesigners.
Lors de la conférence de presse de lancement du jeu Aurion, en mai 2013, il avait été indiqué qu’il serait disponible au deuxième trimestre 2014. Où en êtes-vous aujourd’hui ?
Nous sommes en pleines réalisation du jeu, et nous avons pu montrer les premières images et vidéo au grand public à la fin du mois de Mai 2014. Une fois installé en Décembre 2013, nous avions revu à la hausse nos ambitions ce qui fait que nous mettrons un peu plus de temps que originellement prévu. Il faut aussi dire que le studio aurait du être installé en Aout 2013 et non Décembre 2013 quand nous avons eu les investissements. c’est ce retard que nous avons absorbé, mais la qualité du jeu est capitale. Avoir repoussé cette sortie au quatrième trimestre de 2014 est une option marketing. Selon nos études, la période (Septembre-Octobre) sera à notre avantage car, il n y a pas beaucoup de sorties prévues, comme c’était le cas en Avril ou en Juin. En somme, je dirai que les travaux vont bon train. Récemment (début Juin 2014) nous avons publié les premières captures d’écran du jeu, ainsi qu’une petite vidéo. Ceci signifie que la fin n’est plus loin. Mais pour éviter des fausses promesses, nous disons à tous nos fans que le jeu sortira avant la fin de cette année 2014. C’est une certitude.
Est-ce un jeu pour console et/ou PC et à quel prix sera-t-il vendu?
Aurion: L’Héritage des Kori-Odan est un Action-RPG (Role Playing Games) qui sera disponible sur PC et la console à portage simplifié XBOX360. Il est prévu pour être vendu à un prix très concurrentiel, principalement par téléchargement. Pour le public local, nous prévoyons produire des supports physiques (DVD) ; le e-commerce n’étant pas très encré dans nos habitudes. Ces DVD ne coûteront pas plus de 10.000FCFA. Lorsque nous communiquerons la date de sortie officielle du jeu, tous ces éléments vous seront fournis (site de téléchargement, lieu où acheter le DVD, prix, etc.).

Dans le jeu, on retrouve de nombreux symboles rappelant des cadres de vie africains : les tentes, les campagnes, les noms des personnages, ainsi que celui du jeu. Et vous dites même vouloir promouvoir les traditions africaines. Ne restreignez-vous pas par-là les joueurs potentiels en créant un jeu destiné au continent alors qu’on sait que de nombreux amateurs se retrouvent aussi bien en Asie, en Amérique qu’en Europe ?
Non, pas du tout. Certes, nous réalisons un jeu qui met en évidence la culture et les traditions africaines au travers de divers éléments. Cependant, si vous observez certains de nos carnets de développement, vous verrez que nous essayons de mixer les éléments que nous avons avec ceux qui nous sont étrangers. Par exemple, ce carnet sur des tenues d’habitants vous en dira un peu plus. Le jeu vise avant tout à faire une valorisation de notre culture, pas une imposition de notre culture aux autres. Ce n’est donc pas un jeu renfermé sur l’Afrique, mais ouvert sur le monde.
L’ambition c’est de devenir le premier studio professionnel de production de jeux vidéo d’Afrique centrale. Qu’est-ce que ça nécessite en termes d’investissements financiers pour y parvenir ?
Il faut en moyenne 4 ou 5 millions de dollars pour faire un bon jeu moyen pour un studio déjà installé aux USA/Europe. Mais Kiro’o Games nécessite moins de 1 million de dollars (ceci grâce au rapport du franc CFA sur le marché international). soit le quart pour travailler dans des conditions locales optimales. Pour le moment pour ce premier jeu, nous levons une « petite somme » de 120 millions de FCFA (environ 180 000€) sur lesquels nous avons déjà obtenu 85 000€.
Vous avez eu à le présenter au Groupement inter-patronal camerounais (Gicam). Y a-t-il eu des retombées concrètes après cette sensibilisation des patrons ?
Nous n’avons aucun actionnaire membre du GICAM à ce jour, le secteur leur demandant d’être trop visionnaire apparemment. Nous avons donc trouvé nos capitaux à l’étranger avec des investisseurs individuels mais aussi des entreprises canadiennes et françaises. Toutefois l’objectif du GICAM était surtout de démontrer notre professionnalisme, ce qui a été fait.
Comment comptez-vous financer ce projet ?
Pour financer le projet nous avons mis en place une technique de financement connue sous le nom d’équity crowdfunding. Cette méthode de financement consiste à ouvrir son capital à des investisseurs privés; En d’autre mots, elle offre la possibilité à des particuliers et entreprises d’acheter des parts de capital et par conséquent de devenir actionnaire de la société en question. La liste d’investisseur privés n’étant pas exhaustive, englobe des personnes physiques de toute nature (professionnels, étudiants, commerçants etc.) désirant donner du sens à leur épargne ; et des personnes morales (SA, SARL etc.) désirant faire des placements rentables et ainsi associé leur entreprise à un projet qui a le potentiel pour devenir l’une des plus grandes entreprises d’Afrique. Une page de notre site web explique concrètement la procédure: http://kiroogames.com/fr/kiro-o-business/devenez-actionnaires.html

Vous êtres très optimistes sur la rentabilité des actions de Kiro’o Games pour les personnes intéressées. Sur quoi se fondent vos projections ?
En se basant sur la veille sectorielle que nous avons faite sur l’industrie du jeu vidéo, il existe un segment de plus de 10 millions de joueurs pour des jeux comme AURION pour lesquels nous ne ciblons que 40 000 joueurs pour atteindre notre seuil de rentabilité et 140 000 joueurs pour obtenir un premier retour sur investissement de l’ordre de 200% à la sortie du jeu et de l’ordre de 400% d’ici fin 2017 ceci sans réinvestir (les fonds viendront d’emprunts ou des bénéfices du premier jeu vendu). Les marges offertes comme retour sur investissement sont par conséquent basées sur des simulations pragmatiques. Je vous laisse donc imaginer ce que pourraient être les marges bénéficiaires d’un actionnaire kiro’o games si cette barre de 140 000 ventes (généralement dépassée par les jeux aussi bien réalisés) est également dépassées par Aurion l’héritage des kori-odan. Ce qui est envisageable étant donné l’effet buzz du projet.
Retrouve-t-on, dans un contexte comme celui du Cameroun, une ressource humaine bien formée et pouvant, avec des moyens conséquents, créer des jeux à l’exemple d’un célèbre « Grand Theft Auto » ?
Le Cameroun est un pays immensément riche avec beaucoup de jeunes talentueux. La Team Kiro’o qui livrera bientôt le jeu Aurion est la preuve que nous avons tout ici pour nous développer, et produire des jeux à la hauteur de ce célèbre «Grand Theft Auto». Il suffit juste d’avoir de la volonté, d’être optimiste et d’oser. Certes, il n’existe aucune formation liée aux jeux vidéo au Cameroun. Mais ne dit-on pas qu’il y a un début à toute chose ? C’est aussi l’un de nos objectifs, lancer l’industrie du jeu vidéo au Cameroun. Ceci impliquera automatiquement une insertion de cette filière dans nos formations académiques et professionnelles. A présent, souhaitons juste bonne route au projet qui sera à l’origine de nombreux débouchés, profitables au développement de nos sociétés.
La Démo du jeu
