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Paul Biya: Le songo au service d’une ambition

Par Adrien Macaire Lemdja De nombreux observateurs, tous, plus ou moins avertis prétendent que certaines puissances souhaitent le départ, après…

Par Adrien Macaire Lemdja

De nombreux observateurs, tous, plus ou moins avertis prétendent que certaines puissances souhaitent le départ, après 29 ans de pouvoir, du Président de la République, Paul Biya. Chacun y va de son couplet. Les uns vont jusqu’à exhumer un défaut dans la rédaction de la dernière révision constitutionnelle qui fit sauter le verrou de la limitation du mandat présidentiel. D’autres évoquent les risques que feraient planer, une nouvelle candidature du Président, sur la stabilité de notre pays, à l’analyse des évènements en cours notamment dans le Maghreb et ailleurs. Toutes choses, disent-ils, qui devraient amener notre Chef d’Etat soit à renoncer à briguer un nouveau mandat soit à mettre en place un processus électoral permettant d’avoir des élections libres et indépendantes. Aux nombreuses et multiples critiques justifiées, il répond, par l’élargissement de la composition d’ELECAM de 12 à 18 avec un noyau dur de 12 membres qui lui était déjà acquis. Au passage, il réussit le tour de force d’avoir, à moindre frais, la caution de l’Eglise catholique et des représentants de la société civile, n’en déplaisent à ceux qui diront que ces personnalités ne représentent qu’elles-mêmes ou seront jugées au pied du mur ou à l’aune des résultats ? Mais de quels résultats dans cette configuration?

Quelque soit les positions ultérieures des membres de cette Eglise catholique, qui agissent, comme l’a si bien rappelé le nonce apostolique à Yaoundé, à titre de simple citoyen, il n’en demeure pas moins que l’amalgame avec toute cette communauté chrétienne, sera fait par les néophytes. C’est ainsi qu’au mieux, l’Eglise Catholique, qui a toujours préconisé un processus électoral fiable pour des élections libres et transparentes, apportera sa caution, même critique ou implosera, en raison des divergences qui pourraient survenir. Peut-elle se le permettre ? En nommant deux autres membres de cette Eglise respectivement Président du conseil national de la communication dont la mission est de veiller au pluralisme dans les médias et Président de la CONAC, en charge de la lutte contre la corruption, le Président n’est-il pas toujours dans sa stratégie de neutralisation de cette Eglise et au-delà de tous ses détracteurs?

Comment pourrait-on, demain, s’attaquer aux décisions d’Elecam, vidé préalablement de ses attributs, alors qu’une majorité de ses membres se serait exprimée? Ne diront-ils pas que c’est aussi la démocratie? De même, quand le Président de la République, Paul Biya, convoque, pour la première fois, le conseil national de sécurité, créé il y a deux ans et dont le secrétaire permanent fut nommé il y a un an, le 14 Juillet, n’est-ce pas un message sibyllin? Pendant l’intermède, de nombreux actes de piraterie, de prises d’otages, d’attaques à mains armées, de cambriolages d’édifices publics, ont pourtant émaillé la vie de la Nation, sans pour autant provoquer une telle promptitude dans la convocation dudit conseil. Faut-il croire que cette institution nécessitait une gestation de deux ans? Fait rarissime et très peu commenté fut la convocation à cette réunion de personnalités non membres.

Notre Président de la République et Président National du RDPC, avait-il besoin d’associer le Secrétaire national de sa formation à ce conclave, consacré aux dossiers liés à la sécurité nationale de notre pays? Si oui, pourquoi les dirigeants des autres partis représentés à l’Assemblée Nationale n’ont-ils pas été conviés? Bien que notre concept de défense ait évolué avec la professionnalisation des armées, notre sécurité repose toujours sur la participation de notre peuple. Qui mieux que ses représentants élus, peuvent en être les portes flambeaux? A défaut, pourquoi le Président de la République ne convoquerait-il pas les Présidents de ces partis, pour les entretenir des enjeux sans pour autant leur communiquer les secrets d’Etat, comme dans toutes les démocraties « apaisées »? Dans un autre registre, la visite du Président en Chine ne serait-elle pas une réponse du berger à la bergère. A défaut d’être reçu chez les principaux partenaires du Cameroun ou d’être l’hôte de son homologue français alors que ce dernier se rendra bientôt en RDC, selon le calendrier du Quai d’Orsay, 4 mois avant les élections, le Président, Paul Biya, s’envolera, sur invitation, bientôt pour la Chine où il signera, vraisemblablement, des accords historiques dans le cadre d’une relation que l’ambassadeur de Chine, au Cameroun, qualifie déjà de stratégique.

Là où ses détracteurs ou contempteurs l’attendent, ils refusent d’y aller. Il dédaigne le congrès annoncé de son parti alors que les préparatifs vont bon train, que les militants s’échinent, parfois s’étripent, fourbissent leurs armes en vue de mener un combat contre leurs camarades adversaires et leurs adversaires de l’extérieur. Intrépide, Il avance néanmoins par des contrepieds. Tel est le cas avec le droit de vote des Camerounais de l’étranger dont les modalités d’application ne permettront surement pas de voter en Octobre si l’échéance est maintenue.

N’aura-t-il pas respecté en partie sa promesse, faite, lors de sa visite officielle en France, en Juillet 2009, d’étudier les deux doléances de cette communauté (droit de vote et reconnaissance de la double nationalité)? Deux ans pour aboutir à une décision parcellaire, la veille de l’échéance, n’est-ce pas un timing normal pour un dossier dans une République normale diront ses contempteurs?

La ruse, l’esquive et l’espièglerie ne sont-ils pas les armes favorites de l’homme politique chevronné?
L’art consommé du Songo que pratiquerait régulièrement le Président de la République, ne lui donne t-il pas, en plus de la fonction qu’il occupe et des moyens dont il dispose, un avantage supplémentaire sur ses adversaires?

A coups politiques, réponses politiques pourrait-on s’attendre de la part de l’opposition mais malheureusement elles tardent à venir pour le plus grand bonheur, pour l’instant, de celui à qui certains répètent inlassablement « YOU MUST GO » ou « DEGAGE » sans mettre en place une stratégie efficace de conquête du pouvoir.

Les pressions extérieures sont certes nécessaires mais pas suffisantes. La mobilisation au service d’une stratégie conduite par des leaders respectés, respectables, rompus au jeu d’échecs comme l’est le Président de la République au songo, serait encore plus efficace.

Adrien Macaire Lemdja
Journalducameroun.com)/n

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