Le ministère en charge du dossier veut lancer une étude en vue de formuler des propositions de textes devant concourir à la réforme foncière
Le ministère en charge des domaines a lancé lundi 13 août dernier, un avis à manifestation restreint pour la réalisation d’une étude technique relative à la préparation de la réforme foncière. « L’objectif global de l’étude est d’animer les groupes de travail mis en place au sein du ministère en vue de la réalisation d’un audit sommaire de la gestion domaniale, foncière et cadastrale du Cameroun », peut-on lire dans le dossier d’appel d’offres. A la fin des travaux d’animation, il est attendu qu’avec les groupes de travail on puisse déboucher sur des propositions de texte qui vont servir de base au projet de réforme foncière. L’expertise commandée devra aussi organiser un atelier national de validation de propositions élaborées par ces groupes de travail. Aux yeux du ministère en charge du domaine, quatre axes devant conduire à la réforme sont prioritaires. La réalisation d’un audit de la gestion domaniale et foncière au Cameroun, la description du marché de l’immobilier et de ses difficultés, la proposition d’une réforme profonde du régime foncier domanial et cadastral avec à l’appui des projets de texte, et organiser le séminaire national de validation. Quatre cabinets ont été retenus pour la manifestation restreinte, dont deux de notoriété publique, Cam Engineering et SGDS Cameroon, et deux plus discrètes, Competing Sarl et Lebes Sarl. Les prestataires auront un délai de 2 mois pour mener leur mission. Il reste difficile de savoir dans quelles circonstances l’appel d’offre a été bâti, mais à l’analyse de la littérature sur la question foncière au Cameroun, il y a des risques que l’étude manque d’efficience. La plupart des candidats retenus dans le cadre de cet appel d’offre restreint ont de solides compétences dans le domaine du cadastre de construction, mais pas dans les problématiques profondes de propriété foncière, or le véritablement problème foncier au Cameroun n’est pas celui de la délimitation, mais celui de l’appropriation.
D’un autre côté, l’administration choisit une fois encore une démarche unilatérale, où la société civile pourtant très active sur le terrain n’est pas conviée. « Je l’apprends de toi je n’étais pas au courant que le gouvernement avait lancé un appel d’offres en vue de parvenir à la proposition des textes pour la réforme foncière », a indiqué Mireille Fouda, la responsable pour la communication au Centre pour l’environnement et le développement (CED). La question foncière est pourtant un des principaux axes d’intervention de cette organisation à la réputation solide. Elle a plusieurs fois organisé des événements de restitution, en invitant à chaque fois des représentants de l’Etat. De même, l’appel d’offres suppose l’organisation d’un seul atelier, insuffisant selon plusieurs experts de la question foncière au Cameroun. « Le droit foncier camerounais consacre la propriété par l’immatriculation (obtention d’un titre foncier), y compris pour les populations vivant en zone rurale. Ces populations ne sont pas toujours habituées à ces formalités, dont le coût est parfois prohibitif pour elles. De plus, de nombreuses communautés rurales sont de facto exclues de la propriété foncière légale, du fait des incompatibilités entre leurs cultures/modes de vie et les exigences de mise en valeur de la procédure d’immatriculation. Ainsi par exemple les peuples nomades (éleveurs ou nomades « pygmées » de forêts) ont un mode de vie présentant la particularité de ne pas marquer de manière indélébile le milieu. Il en résulte qu’ils ne peuvent pas établir leur présence ni, à fortiori, une éventuelle mise en valeur, préalable à l’immatriculation », fait savoir la responsable du CED. Dans ces circonstances on comprend mal quel audit réalisera les cabinets retenus. Leurs propositions sont très attendues.