OpinionsOpinions, Tribune




Protestations sur le traitement réservé aux détenus dans les prisons

La Commission indépendante contre la corruption et la discrimination adresse une lettre au Premier ministre Monsieur le Premier Ministre La…

La Commission indépendante contre la corruption et la discrimination adresse une lettre au Premier ministre

Monsieur le Premier Ministre

La Commission indépendante contre la corruption et la discrimination vous renouvèle ses respectueux compliments et a l’honneur de vous exprimer ses plus vives inquiétudes sur le traitement réservé aux détenus dans les prisons du pays. En effet les conditions du décès le jeudi 22 Avril 2010 de monsieur Germain NGOTA NGOTA, journaliste d’investigation et Directeur de publication de l’hebdomadaire « Cameroun Express », vient inévitablement jeter la lumière sur une situation déplorable qui selon diverses sources crédibles, entraînerait une bonne dizaine de décès quotidiennement dans l’ensemble des prisons du pays.

Dans le cas de ce journaliste, les informations pertinentes livrées tant par les proches que les amis au public, montrent bien que l’intéressé, déjà connu pour être un grand malade, est néanmoins mort de manque de soins. C’est pourquoi, sans préjuger de la solidité ou de la légèreté des éléments de l’accusation s’agissant des faits pour lesquels ce compatriote était détenu, la commission indépendante contre la corruption et la discrimination vous fait connaître ses protestations et exige que les conditions de détention soient humanisées dans les prisons du pays. Il y a lieu de rappeler ici que le Cameroun est signataire de plusieurs conventions internationales relatives aux droits de l’Homme et aux libertés fondamentales, y compris celle qui prône l’élimination de toutes les formes de torture. Or l’absence de soin, les mauvaises conditions d’hygiène, la surpopulation explicite, sont assimilables à la torture, elle-même induisant selon la classification du droit international positif, le crime contre l’humanité.

La Commission dénonce la discrimination qui sévit dans les prisons, où les riches détenus mènent une existence dorée, jouissent des permissions à souhait, se font soigner à l’extérieur dans des formations hospitalières de haut standing, pendant que les pauvres, les misérables de famille démunies, les orphelins, les enfants de la rue parfois incarcérés pour des broutilles depuis des années sans jugement, des gagne-petit à l’instar du journaliste NGOTA NGOTA, crèvent librement et publiquement ou en sortent estropiés, défaits, condamnés dans une condition pire que des carcasses de vieux véhicules. L’ampleur de la réprobation internationale qui a suivit le décès du Directeur de publication de « Cameroun Express », est un embarras pour chaque camerounais, une entorse grave inacceptable à notre image individuelle et collective. Personne n’a envie d’être montré du doigt dans les aéroports internationaux ou dans les rencontres diplomatiques, comme le citoyen d’un pays où les journalistes meurent en prison, où les soins élémentaires sont refusés aux détenus.

La commission rappelle par ailleurs, qu’en date du 05 mars, elle avait interpellé par écrit le ministre de la communication, porte parole du gouvernement, pour lui demander d’ouvrir une enquête sur les graves accusations de tortures dont avait été l’objet le journaliste NGOTTA ainsi que deux autres confrères, fait relatés, décrits, et dénoncés dans un communiqué par Henriette EKWE, Vice-présidente de l’Union des journalistes du Cameroun. Le Ministre n’a jamais répondu à cette requête.

La Commission indépendante contre la corruption et la discrimination tirant les conséquences de ce drame qui endeuille une profession mais également tout le pays, attend impatiemment un communiqué plus élaboré du gouvernement suivi des condoléances officielles à sa famille d’une part, et l’annonce d’un plan de modernisation et d’humanisation effectives des prisons du pays d’autre part. D’ores et déjà, il est important de signaler qu’un vaste de projet de construction de nouvelles prisons s’impose. Il faut à très brève échéance, fermer les prisons-mouroirs de Douala et de Yaoundé, et les remplacer par des unités plus adaptée, mieux équipées, et situées dans un environnement approprié en dehors des centres urbains.

Dans l’attente de la prompte réaction de votre Excellence, la Commission indépendante contre la corruption et la discrimination saisit l’occasion pour vous assurer de sa très haute considération./.

Shanda Tonme: Président de la Commission indépendante contre la corruption et la discrimination

Suivez l'information en direct sur notre chaîne