Le mouvement de l’ancienne rébellion du Nord-Kivu de Laurent Nkunda, le CNDP, a rejoint le pouvoir
L’acte d’adhésion a été signé ce weekend par le pasteur Jean-Marie Runiga
Une nouvelle recrue pour la majorité présidentielle en République démocratique du Congo: Le CNDP (Congrès national pour la défense du peuple) a rejoint, ce week-end à Kinshasa, la majorité présidentielle. C’est le pasteur Jean-Marie Runiga, chargé des relations extérieures de l’ancienne rébellion du Nord-Kivu, qui a signé l’acte d’adhésion à l’AMP, expliquant que le CNDP a décidé de cheminer avec le président Joseph Kabila. S’agit-il d’un mariage contre nature? Jean-Marie Runiga, chargé des relations extérieures du CNDP et coordonateur du bureau de liaison de ce parti à Kinshasa est allé au siège de l’AMP (Majorité présidentielle) pour signer l’acte d’adhésion. Il explique les raisons de cette union: Hier nous étions des belligérants, on se battait, se lacérait. C’est donc un signe de réconciliation mais aussi un message fort pour montrer aux congolais qu’il n’y a pas un agenda caché et que nous voulons cheminer ensemble pour consolider la paix et rebâtir le pays. Le CNDP affirmait également que le pouvoir de Kinshasa allait bientôt reconnaître les grades des membres de son ancienne branche armée qui ont intégré les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC). Plusieurs autres partis politiques ont rejoint l’AMP ces derniers jours, en l’occurrence l’Alliance des forces démocratiques du Congo, un parti récemment créé par le député Modeste Bahati Lukwebo, ancien président de la société civile. Hier, mouvement insurrectionnel, le Congrès national pour la défense du peuple, le CNDP, est devenu aujourd’hui un parti politique. Ses dirigeants ont décidé de faire alliance avec les Kabilistes. Les deux ennemis d’il y a seulement quelques mois ont scellé leur mariage ce week-end.
La longue histoire des FARDC et du CNDP
Les Nations Unies avaient auparavant publié un rapport selon lequel des réseaux criminels au sein des Forces armées de la RDC (FARDC) constituaient une importante cause de conflits dans le pays. Selon ce document, certains soldats se joignaient aux groupes armés pour exploiter les importantes ressources minières de la RDC. Les enquêteurs onusiens ont cité de nombreux exemples d’individus armés se livrant à l’exploitation minière, s’arrogeant des terres, violant les femmes et recrutant des enfants-soldat. Ces hommes armés se livraient aussi au braconnage en abattant des espèces menacées. Les Nations Unies avaient alors renouvelé l’embargo sur les armes contre les groupes et les personnes n’étant pas associés au gouvernement. L’ONU avait aussi prorogé ses sanctions et interdictions de voyage visant les individus liés à de tels groupes. Le Conseil de sécurité avait aussi, par ailleurs, demandé aux importateurs de minéraux en provenance de la RDC de s’assurer que l’argent ne finisse pas entre les mains des groupes armés. Or, depuis janvier 2009, le CNDP avait intégré les FARDC mais on se demande à terme: Qui a finalement intégré qui? Une partie du CNDP n’a jamais été intégrée et l’autre partie est passée par une intégration ultra light et superficielle qui a laissé aussi sa chaîne de commandement intacte. Par la nomination de ses officiers comme commandants locaux des FARDC, le CNDP a étendu sa présence militaire à des endroits qu’il ne contrôlait pas auparavant y compris dans des zones minières. Il y a un an, les effectifs du CNDP étaient estimés à environ 5.000 miliciens. Aujourd’hui, les statistiques parlent de 9.000 nouveaux soldats ex-CNDP intégrés. Personne ne doute qu’il y a des rwandais qui ont été intégrés dans l’armée congolaise même s’il est difficile de donner des preuves irréfutables ou même leur nombre exact. Même si on refuse de réduire les problèmes du Congo au rôle du Rwanda et si on évite les analyses qui prennent la grande conspiration comme point de départ, on comprend les gens sur le terrain qui disent avec amertume que, grâce à Umoja Wetu et Kimya II, le sigle FARDC est devenu Forces Armées du Rwanda Déployées au Congo. On se souvient que le CNDP avait connu un changement de leadership radical. Le leader historique, Laurent Nkunda, avait manifestement outrepassé son rôle, d’où son remplacement sur initiative du Rwanda par Bosco Ntaganda, qui avait un autre background géographique (Masisi au lieu de Rutshuru) et clanique (Gogwe au lieu de Jomba). Bosco n’est ni un intellectuel, ni charismatique. Il a rejoint le CNDP relativement tard et est en plus recherché par la Cour Pénale Internationale (CPI). Ce changement de leadership a dévoilé des clivages importants au sein du CNDP, qui, au courant de l’année 2009, s’était dispersé davantage dans des factions qui étaient à plusieurs reprises sur le point de s’affronter à main armée.