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Recettes forestières du Cameroun: les communautés riveraines encore exclues du partage

Une circulaire du Minfi indique que la suppression des 10% qui revenaient aux populations sur l'ensemble du territoire est maintenue…

Une circulaire du Minfi indique que la suppression des 10% qui revenaient aux populations sur l’ensemble du territoire est maintenue pour l’exercice 2016

Les communautés riveraines n’auront pas droit aux 10% des bénéfices issues de l’exploitation de leurs forêts pour la deuxième année consécutive. Dans une circulaire datée du 31 décembre 2015, le ministre camerounais des Finances (Minfi), Alamine Ousmane Mey, a confirmé la suppression des 10% représentant la quote-part des communautés riveraines des zones d’exploitation forestière, sur l’enveloppe de la Redevance forestière annuelle (RFA).

Cette RFA versée par les exploitants forestiers est désormais repartie ainsi qu’il suit : 50% pour l’Etat et 50% pour les communes dont 10% en guise d’appui au recouvrement à verser aux agents dédiés, 36% à verser au Feicom (banque des communes) et 4% à percevoir directement par les communes abritant les forêts exploitées, indique la circulaire.

Cette loi va impacter négativement la vie des communautés concernées, des populations locales et riveraines des zones d’exploitation qui, depuis un peu plus d’une décennie, ne se souciaient guère de ce détail. Au terme de la loi forestière de 1994, portant régime des forêts, de la faune et de la pêche, les revenus des redevances forestières annuelles étaient répartis entre l’Etat, les collectivités décentralisées et les populations riveraines des forêts ouvertes en exploitation à raison de 50 % pour l’Etat, 40 % pour les collectivités décentralisées et 10 % pour les populations.

Selon les chiffres de certaines ONG, cette répartition a permis que plus de 30 milliards de francs CFA soient distribués aux communes. Dans la foulée, certaines d’entre elles se retrouvaient avec plus d’un milliard de francs chaque année. Ceci sans compter la part qui revient directement aux populations des contrées riveraines des zones d’exploitation.

A travers les recettes fiscales directes (RFA, droits de sortie payés sur les produits exportés, taxes d’abattage, recettes des transactions forestières et des ventes aux enchères publiques) et indirectes, l’exploitation forestière et les autres activités autour étaient, de source proche des certaines communautés concernées, à l’exemple de celle de Mindourou dans le département de la Kadey dans la région de l’Est, d’importantes sources budgétaires pour la contrée.

Plaidoyer
La décision du Minfi n’a visiblement pas surpris grand monde puisque l’ONG Foder (Forets et Développement Rural) s’était déjà associée aux chefs traditionnels pour engager un plaidoyer auprès des autorités. A cet effet, les deux parties avaient regroupé les médias le 11 novembre 2015 pour dénoncer la loi N° 2014/026 du 23 décembre 2014, portant loi des finances de la République du Cameroun, supprimant les 10% de la RFA affectée aux communautés riveraines.

Face à la presse, les « Associés » avaient alors égrainé le chapelet important des bienfaits de la RFA sur le développement local. Le porte-parole de la communauté de Manga’a Ndokok dans l’arrondissement de Ngwei, région du Littoral, Luc Ndebe, faisait savoir que dans le domaine de l’éducation cette redevance a permis la construction de plusieurs salles de classe, la dotation de nombreux tables-bancs, la réhabilitation des bâtiments vétustes, le recrutement et le payement des enseignants vacataires. La même redevance a également permis la construction des puits d’eau et des forages. Grâce à cet argent, la localité a aussi pu se doter des foyers communautaires et des équipements pour les centres de santé, avait-il ajouté.

Ce bilan plutôt bénéfique pour les populations est certes flatteur, mais le plaidoyer n’a pas eu un écho favorable auprès du ministre des Finances qui a plutôt confirmé la loi N° 2014/026 du 23 décembre 2014.

Mauvaise gestion
Si les ONG sont montées au créneau pour dénoncer cette loi, elles étaient aussi les premières à reprocher la gestion opaque de la RFA dans certaines communautés. Une mauvaise gestion qui aurait, selon certains observateurs, poussé le gouvernement à retirer les 10% de la RFA aux communautés riveraines. A ce sujet, aucun agent du Minfi n’a voulu se prononcer. Mais si cela était le cas, les ONG pensent que cette raison est inappropriée puisque « le gouvernement n’a jamais commandé une expertise sur la gestion de la RFA par les communautés riveraines », affirment-elles.

Même si on peut considérer la mauvaise gestion de la RFA comme un mobile de la suppression, certains experts des ONG avancent que ce retrait est un subterfuge trouvé par agents du ministère des Finances pour encaisser de manière indue une partie (la moitié) de près de 450.000.000frs CFA, destinée aux communautés riveraines du fait de l’exploitation de leurs forêts.


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