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Sida : Communiquer est le maitre mot

Des camerounais de divers bords donnent leurs avis sur « le mal du siècle ». Méfiance, peur et préjugés demeurent…

Des camerounais de divers bords donnent leurs avis sur « le mal du siècle ». Méfiance, peur et préjugés demeurent vivaces.

Patrick Mbo Nguéma, ingénieur agronome
Je suis au courant de la journée internationale de lutte contre le sida mais je considère cette maladie comme toutes les autres, bien qu’elle n’ait pas encore de traitement. D’ailleurs, on sait que le paludisme (malaria) fait plus de victime que le sida. D’une part, je la craints à cause de l’absence de traitement. D’autre part ça ne m’effraie pas parce qu’en suivant les conseils, l’on peut éviter l’infection et, si l’on est déjà infecté, une bonne prise en charge de la maladie attenue la psychose. Je n’ai pas d’ami malade, puisqu’il est difficile de voir quelqu’un avouer sa séropositivité. Nous qui travaillons dans l’arrière pays voyons les difficultés des populations. Dans ces zones, les gens dédaignent le préservatif. Ils disent ne pas avoir d’argent pour en acheter et quand bien même ils les reçoivent gratuitement, ils estiment que c’est un isolent qui atténue le plaisir. La sensibilisation doit être adaptée en fonction des zones rurales ou urbaines. Je pense que la contagion est plus accentuée dans des zones rurales et de migration.

Gaël Taya, élève
Je n’entretiens pas de relations sexuelles, je m’abstiens. J’avais un oncle qui souffrait du sida. J’ai moi-même découvert son statut en lisant les résultats de son test. Je n’utilisais plus les mêmes objets que lui tels les lames, couteaux, fourchettes. Je ne mangeais plus avec lui mais je ne lui montrais pas ça ouvertement. Je ne sais pas s’il avait compris ma méfiance. C’est vrai que je connais les modes de transmission mais quand on est à coté d’un malade, on a un peu peur.

Mme koul, travailleur social
Généralement, le dépistage est volontaire et anonyme mais certaines personnes sont contraintes de se faire dépister à découvert pour des raisons diverses (exigences lors d’une demande de visa, condition de recrutement de recrutement, examen prénatal). La réaction face aux résultats est fonction du caractère de chaque personne. Il y en a qui ne sont pas surpris des résultats compte tenu de leurs antécédents. Par exemple le partenaire d’un individu décédé de Sida. D’autres par contre sont très étonné des résultats d’un test parce que, d’après eux, rien dans leur comportement ne laissaient présager cela. Il en est par exemple des femmes mariées et fidèles à leur conjoint. Dans tous les cas, apprendre sa séropositivité fait toujours mal même si certains le cache bien. Je connais une femme qui s’est laissée mourir 2 mois après que son test est été révélé positif. Il faut dans être psychologiquement très fort.


Journal du Cameroun)/n

Achille Fouda, étudiant
Il y a encore une mystification autour du sida. Je pense que le problème a été mal posé au départ. La maladie a été présentée sans une préparation préalable de l’opinion. Mais, depuis l’amélioration de la communication, les gens comprennent mieux, prennent conscience et ont le courage d’aller se faire dépister.

Rigobert Tchaya, sans emploi
Le sida tue, j’ai peur de cette maladie. Je me protège toujours. J’ai déjà fait 3 fois le test de dépistage. Je ne suis pas au courant de l’existence d’un traitement appelé ARV (anti rétroviraux). J’ignore davantage qu’il est gratuit. Dans tous les cas, comme je ne peux m’abstenir, je me protège avec des condoms.

David Bugam, vendeur
Je souhaite qu’il y ait des dépistages obligatoires dans chaque entreprise. La transmission peut partir de la pression qu’un patron met sur son employé de sorte que la contagion commence au bureau et se poursuit dans les foyers. Il est difficile d’obliger les gens à se faire dépister. Je me suis fait dépister une fois au sein de l’entreprise qui m’employait. C’est vrai qu’on ne nous disait pas qu’il s’agit du test du Vih. On parlait plutôt du paludisme. Je souhaite qu’on accorde des privilèges aux entreprises pour les encourager à faire examiner leur personnel et à les prendre en charge en cas de maladie.

Hervé, footballeur
Le sida a freiné le vagabondage. Le préservatif n’est pas une garanti. Au contact d’un ami malade, je prenais des précautions sans toute fois le lui montrer pour qu’il n y ait aucune chance de contagion ; vaut mieux être au maximum prudent. Je considère qu’un malade du sida est un mort en sursis parce qu’il n’existe aucun traitement contre le mal. Le malade porte donc la mort en lui. Je ne blâme cependant pas les personnes atteintes.
Il y a encore un tabou, on parle de poison lent, de sorcellerie. Il faut laisser le folklore autour des campagnes de sensibilisation. Les danses, ventes de préservatifs que l’on gonfle et utilise comme des ballons de jeux banalisent le sida. Le sérieux doit toujours être présent.

Gertrude Ambani, élève
Je n’ai jamais vu un malade du sida mais je sais que ça existe. Parfois, on nous en parle à l’école. C’est vrai que je peux être atteinte sans m’en rendre compte, mais, je me protège toujours lorsque je vais avec mon copain. J’ai un seul partenaire et s’il refuse qu’on utilise un préservatif, je préfère qu’on laisse tomber et qu’on s’abstienne.