Franck Foute, auteur de « Ce jour que je n’oublierai jamais », revient sur le déraillement du train survenu le 21 octobre 2016 et dans lequel plus de 75 personnes ont perdu la vie.
Franck Foute aurait pu mourir le 21 octobre 2016, dans le train 152, censé le conduire à Douala. Le voyage, déjà compliqué au départ, a tourné court, viré au drame et causé une détresse nationale indélébile.
Le déraillement survenu le 21 octobre 2016 à Eséka est sans doute l’une des catastrophes les plus meurtrières survenues au Cameroun ces cinq- dix dernières années. Le bilan officiel a annoncé 75 morts, des centaines de blessés et de nombreux disparus.
Franck Foute, en a fait un roman, dont la cérémonie de dédicace a eu lieu le 15 février dernier à Yaoundé. Le journaliste y raconte sa journée. Il évoque le souvenir douloureux et largement partagé de ce drame. Pourtant, sa journée s’annonçait ordinaire.
Dans une narration intime, l’auteur entraîne les lecteurs dans ses petites habitudes. Ainsi, l’on apprend que le vendredi 21 octobre 2016, Franck Foute quitte son domicile pour son lieu de travail au quartier Essos à Yaoundé. Mais, ce matin-là, il n’y a pas de connexion internet au bureau. Il lui est donc impossible de travailler.
Cependant, il reçoit un coup de fil qui l’oblige à se rendre sur Douala, pour une interview. Seulement, la forte pluie qui s’est abattue la veille a causé l’effondrement d’une buse sur l’axe Yaoundé-Douala. Celle-ci s’en retrouve coupée. Il n’y a aucun moyen de traverser en voiture. C’est ainsi que l’auteur se rabat sur le train. Mais, il n’est pas seul à y avoir pensé. A la gare, il y a un monde-fou. Usant de ruse, l’auteur obtient un ticket de voyage et se retrouve dans le train 152.
Vanessa
Dans ledit train, Franck Foute se permet un moment d’apaisement avec Vanessa, une jeune fille qui le captive depuis la gare. Ils ont à peine le temps de faire connaissance que le train commence à montrer des signes inquiétants d’instabilité.
« Trois minutes s’étaient écoulées depuis la sortie du deuxième virage. Le train klaxonna une nouvelle fois. Etait-ce l’entrée dans une gare ou alors un signe de détresse ?(…) C’était bel et bien une gare, celle d’Eséka. Mais le train devenu fou, ne comptait pas s’y arrêter. On entendit un cri strident, à la fois horrible et assourdissant (…) Le wagon tremblait tout en continuant sa course folle. Il y eut de fortes secousses qui indiquaient clairement que nous avions déraillé. (…) Tout était instable dans le wagon qui continuait sa destruction en s’inclinant vers la gauche » (P. 54).
Le train a déraillé. Certains wagons achèvent leur course dans un ravin. Le choc est violent. Franck se retrouve enseveli sous des sacs et en sort indemne. Dans les cris et les pleurs, certains réalisent à peine ce qui vient de se passer, tandis d’autres se pressent de sortir de l’engin qui menace de prendre feu.
Héro d’un jour
Face à l’horreur, l’auteur décrit : « Une femme gisait sur ce qui restait des rails. Un morceau de fer lui sortait du globe oculaire »… (P.57).
Malgré la violence du tableau, l’auteur s’aperçoit que Vanessa a disparu et décide de la retrouver. Celle-ci est restée coincée sous des débris du train. Mais elle sera sauvée grâce à la détermination de Franck Foute.
« Ce jour que je n’oublierai jamais » est une narration intime d’une actualité qui ne fait pas rire. Pourtant, dans son livre, Franck Foute ne peint pas seulement la douleur ou la laideur de la mort. Il parle aussi de cette catastrophe comme d’une formidable expérience humaine, qui a donné du sens aux notions de solidarité, d’entraide.
Il y a eu des héros après ce désastre. On ne se souviendra peut-être pas d’eux dans dix ans. Mais, on n’oubliera jamais ce jour. En lisant ce livre, on s’émeut, on crie, on pleure avec tous ceux qui ont partagé le destin tragique du train 152.