Le groupe Etat islamique reprend-il le pouvoir sur Boko Haram?

La question reste entière après les rebondissements de ces derniers jours où Abubakar Shekau a été évincé à la tête du mouvement djihadiste africain au profit de Abou Mosab Al Barnaoui

Cette semaine a été mouvementée à la tête de Boko Haram. Le groupe Etat islamique aurait nommé un nouveau chef à la tête du mouvement djihadiste nigérian de plus en plus fragilisé par ses dissensions internes.

Qui tient les rênes de Boko Haram ? La question reste entière après les rebondissements de ces derniers jours où le groupe Etat islamique a clairement décidé de reprendre en main la secte islamiste nigériane.

Son chef, Abubakar Shekau, a été évincé à la tête de ce mouvement djihadiste africain. Il avait pris ses fonctions après la mort de son chef historique Mohammed Yusuf en 2009.

Aucune annonce officielle mais une tribune publiée mardi 2 août dans le dernier numéro du journal du groupe Etat islamique Al Nabaa dans laquelle le cheikh Abou Mosab Al Barnaoui est présenté comme le « Wali (chef) sur l’Afrique de l’Ouest » sans que jamais le nom d’Abubakar Shekau ne soit cité.

Abou Mosab Al Barnaoui est considéré par certains spécialistes comme le porte-parole de Boko Haram parce qu’il est apparu plusieurs fois dans des vidéos relatant les attaques du groupe nigérian. Un rôle de porte-parole qu’Abubakar Shekau avait nié jusqu’à présent.

Mais la publication signifie-t-elle réellement l’éviction de Shekau à la tête de Boko Haram ? Le groupe avait prêté allégeance au groupe EI en 2015 pour devenir Jama’at Ahl al-Sunnah Lil Dawa Wal Jihad (la Province ouest africaine de l’Organisation de l’Etat islamique).

Le retour d’Abubakar Shekau
Après la publication dans cette revue, nouveau rebondissement. Jeudi 4 août, Abubakar Shekau fait son grand retour sur la scène internationale avant de réitérer sa volonté de se battre à la tête de Boko Haram dans une vidéo, le 8 août 2016. « Moi, Abubakar Ash-Shakawy, leader de Jama’atu Ahlissunnah Lidda’awati Wal Jihad (nom de Boko Haram depuis l’allégeance à Daesh, ndlr) fais du combat contre le Nigeria et contre le monde entier une responsabilité personnelle », affirme-t-il dans cette vidéo.

Certains le pensaient mort. Dans sa dernière vidéo datant de mars 2016, il apparaissait affaibli et disait : « Pour moi la fin est venue ». Le voilà qui brise plusieurs mois de silence. Il prend la parole dans un message audio posté sur Internet et repéré par le site américain de lutte antiterrorisme « SITE Intelligence Group ».

Abubakar Shekau veut prouver qu’il est « toujours présent », et qu’il est bien le chef vivant de Boko Haram. Il confie avoir été « trompé » par certains de ses combattants. Il menace aussi ouvertement le groupe EI de ne plus le « suivre aveuglément ». Enfin, il affirme ne plus accepter un seul de ses émissaires « sauf ceux vraiment engagés dans la cause d’Allah ».

Pourquoi ce limogeage ?
Regain de tension donc avec le groupe Etat islamique, et séparation annoncée ? Certains de ses membres désapprouvent depuis longtemps les pratiques de ce chef, un personnage « fantasque et un peu délirant », décrit Romain Caillet, chercheur à l’Institut français du Proche-Orient.

Ses actes de violences répétées à l’encontre des Nigérians à majorité musulmans et les attaques de mosquées ont déplu à Raqqa. Depuis l’insurrection menée par Boko Haram, les chiffres sont affolants. Le groupe djihadiste a fait plus de 20 000 morts, kidnappé des centaines de personnes comme les lycéennes de Kibok et déplacés 2,6 millions d’habitants dans le Nord-Est du pays ainsi que dans les pays limitrophes.

« Shekau ne fait pas l’unanimité, souligne Romain Caillet. Mais régulièrement l’EI publiait des communiqués pour rappeler que Shekau restait (le chef) du groupe nigérian, malgré les rumeurs sur sa disparition. » Jusqu’à cette semaine.

Boko Haram divisé et affaibli
Ces derniers revirements mettent au jour les divisions qui règnent dans les rangs de Boko Haram. « On voyait déjà d’un point de vue stratégique que le groupe était fortement divisé », explique Yan Saint-Pierre. « Maintenant la division est publique et le linge sale n’est plus lavé en famille. »

Boko Haram se trouve ainsi partagé entre plusieurs groupes : le groupe EI, Ansaru et le groupe Al-Qaida au Maghreb Islamique (Aqmi).

Le groupe doit aussi faire face aux offensives de la coalition Tchad-Cameroun-Nigeria-Niger contre ses fiefs du Nord-Est du pays. Depuis l’élection de Muhamadu Buhari à la tête du Nigeria, la lutte contre Boko Haram s’est intensifiée. La coalition régionale a repris la semaine dernière la ville stratégique de Damasak à la frontière avec le Niger. Là-même où les djihadistes avaient tué plus de 200 personnes et kidnappé des centaines d’enfants.


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Boko Haram: Abubakar Shekau conteste son « limogeage »

L’organisation Etat Islamique a pourtant annoncé mercredi la nomination d’Abou Moussab al-Barnawi, comme le nouveau leader des insurgés qui opèrent au Nigeria et dans le lac Tchad

Dans un message audio d’environ dix minutes, Abubakar Shekau qui s’est exprimé en langues arabe et haoussa, a accusé Barnawi et ses disciples, d’avoir essayé de monter un coup contre lui en envoyant des informations erronées aux dirigeants de l’EI au Moyen-Orient.

« On m’a demandé d’envoyer mon idéologie par écrit au Calife, mais il a été manipulé par certaines personnes afin d’atteindre leurs propres intérêts égoïstes » a déclaré Shekau dans son message.

« Peu importe la situation, nous allons nous battre jusqu’à ce que nous établissons un état islamique, » a-t-il dit en arabe.

Le leader de Boko Haram absent des réseaux sociaux ces derniers mois, s’est déclaré « surpris » par son remplacement.

Selon lui, les huit lettres envoyées aux leaders de l’EI et dans lesquelles il réitérait son allégeance à l’organisation djihadiste, seraient toutes restées sans suite jusqu’à son éviction de la tête du groupe dont il a pris la direction après la mort de son fondateur et chef spirituel en 2009.

Pour Shekau, Abou Moussab al-Barnawi, et ses partisans sont des polythéistes.

Les nouveaux responsables de Boko Haram accusent Shekau de violer les idées fondatrices de la secte, mais aussi, d’avoir chassé les conseillers militaires de l’EI et récupérer d’importantes quantités de vivres et munitions.

Des accusations rejetées par Abubakar Shekau.


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Boko Haram: les révélations du nouveau patron d’Africom

A en croire le lieutenant-général Thomas Waldhauser, nommé par Barack Obama en avril dernier, Abubakar Shekau n’est pas mort comme annoncé par des sources haut placées au Nigéria et au Tchad

Le lieutenant – général Thomas Waldhauser, nommé par Barack Obama en avril dernier pour prendre le commandement de Africom, en remplacement du général Rodriguez appelé faire valoir des droits à la retraite, était devant le Sénat le 21 juin dernier. A l’en croire, Abubakar Shekau, le patron de Boko Haram, n’est pas mort comme annoncé par des sources haut placées au Nigéria et au Tchad.

Poursuivant dans les révélations, Thomas Waldhauser a dit que Boko Haram se trouve actuellement éclaté en deux factions : l’une fidèle à Al Qaeda et l’autre à l’Etat Islamique. Ce schisme est dû au non-respect – par Aboubakar Shekau – des consignes de l’Etat Islamique qui interdit d’utiliser les enfants pour des attaques kamikazes.

Avant cette sortie de Thomas Waldhauser, les Américains clamaient que l’Etat Islamique n’avait jamais donné de suite favorable à la demande officielle d’alliance de Boko Haram. D’aucuns invoquaient le racisme des arabes à l’endroit des noirs pour expliquer l’impossible rapprochement des deux organisations terroristes.

En cas de confirmation de sa nomination par la Sénat, le lieutenant – général Thomas Waldhauser promet de mettre le paquet pour en finir avec la branche de Boko Haram proche de l’Etat Islamiste, qui tente de faire de la Libye son fief depuis que ses affaires tournent mal en Syrie et en Irak. Selon le nouveau patron d’Africom, les Boko Haram pro Etat Islamiste sont plus nombreux et actuellement les plus dangereux. Ils mènent une guerre trans – étatique visant les intérêts occidentaux partout en Afrique. Waldhauser ne doute même pas que ces derniers prennent l’Europe pour cible dans les prochains jours.

Mis à part Boko Haram et l’Etat Islamique, Thomas Waldhauser promet de faire la guerre aux islamistes somaliens Al-Shabab et à l’Armée de Résistance du Seigneur active en Ouganda et au Sud Soudan. A aucun moment, le lieutenant-général n’a demandé au Senat le renforcement de troupes d’Africom. Sa stratégie est de renforcer le partenariat entre Africom et les Etats africains afin de les amener à se défendre valablement de toute pénétration terroriste. Mais l’action du probable nouveau patron d’Africom ne va pas seulement contre les terroristes. Les dirigeants coupables de mauvaise gouvernance pourraient compter parmi ses victimes.


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Boko Haram: de la secte religieuse au groupe terroriste

Dans son documentaire «Boko Haram, les origines du mal», Xavier Muntz établit les raisons pour lesquelles cette secte réligieuse est devenue un groupe terroriste qui a déjà fait près de 32 000 morts

La haine est souvent à l’origine du mal. Mais d’où vient la haine ? Dans son documentaire «Boko Haram, les origines du mal», le réalisateur Xavier Muntz cherche à comprendre comment cette secte religieuse, dont le nom se traduit par «l’éducation occidentale est un péché», est devenue un groupe terroriste qui a déjà fait 32 000 morts, plus de 2 millions de personnes déplacées et qui sévit actuellement au Nigeria, au Cameroun, et aussi au Niger et au Tchad.

Le reportage, qui montre des images d’une rare violence, tient sa promesse. Il ne pouvait le faire sans remonter à la source, à Maiduguri, capitale de l’Etat de Borno et berceau du groupe djihadiste né dans les années 2000. Rythmé par l’intervention d’acteurs locaux (professeurs, directeur de programme.), de spécialistes du continent et d’images d’archives, le documentaire raconte la genèse du mouvement.

Un groupe terroriste ne peut se développer sans un chef charismatique, un gourou. Mohamed Yusuf, fondateur du mouvement qui s’appelle à ses débuts «Yusufiyya» soit «l’idéologie de Yusuf», est un excellent orateur.

«Tordre l’esprit des gens»
L’une des forces du documentaire est de donner la parole à Fulan Nasrullah, présenté comme un proche des milieux djihadistes nigérians et qui raconte avoir rencontré plusieurs fois le leader.

«Yusuf était un type bien. Il avait ce don pour parler en public, cette capacité de tordre l’esprit des gens, raconte Fulan Nasrullah, filmé à contre-jour. Il dénonçait les dirigeants politiques, leur hypocrisie et le fait qu’ils manipulaient le peuple pour mieux le tromper et arriver au pouvoir.»

Mais s’inspirer du wahhabisme et du salafisme ne suffit pas pour manipuler les masses. Pour que le mouvement s’enracine, il lui faut un terreau. Boko Haram va le trouver dans l’extrême pauvreté de la région du Borno.

Si le Nigeria est la première puissance économique du continent africain, plus de la moitié de sa population vit sous le seuil de pauvreté.

Dans le nord-est du pays, le taux de scolarisation ne dépasse pas 5 %. Les habitants, et en majorité les jeunes, vont donc adhérer au discours populiste, parce qu’ils pensent que Mohamed Yusuf va enfin les défendre.

Il le fait déjà en s’occupant des orphelins et des gamins des rues. « On vend un Etat islamique rêvé où, grâce à la charia, les riches ne pourront plus détourner l’argent public », explique Marc-Antoine Pérouse de Montclos, chercheur à l’Institut de recherche pour le développement.

Accueilli en héros à Maiduguri
Dans la mosquée de Mohamed Yusuf, située près de la gare de Maiduguri, on se presse pour écouter ses prêches enflammés à la fin des années 2000. Les hommes politiques n’y sont pas insensibles. Ali Modu Sheriff, riche gouverneur de l’Etat du Borno, propose à Mohamed Yusuf d’étendre la charia, en échange d’un éventuel soutien.

Mais, une fois élu, le politique ne tient pas ses engagements. [i «Ils [les politiques] parlent de paix, ils font des promesses, dénonce Mohamed Yusuf dans un sermon. Mais en fait, ils n’ont pas de pitié une fois qu’ils ont pris le pouvoir»]. La colère monte chez les sympathisants, le leader est emprisonné à Abuja, la capitale.

A son retour à Maiduguri, il est accueilli en héros. Mais le pouvoir qu’il prend inquiète les autorités qui multiplient les incidents avec ses fidèles. Une fusillade éclate en juillet 2009 et provoque un bain de sang : près de 1 000 personnes, en majorité des civils, perdent la vie. Mohamed Yusuf est capturé par la police et tué en pleine rue, menottes aux poignets.

Il n’en fallait pas plus pour embraser le mouvement et pour que l’aile dure, incarnée par Abubakar Shekau, ne prenne le pouvoir. Aujourd’hui contesté au sein du groupe, c’est lui qui, en mars 2015, fera allégeance à l’organisation Etat islamique (EI). C’est aussi lui qui revendiquera le rapt des 276 lycéennes de Chibok, en avril 2014 : «J’ai enlevé vos filles. Je vais les vendre au marché pour qu’elles soient traitées en esclaves et mariées de force.»

Situation sanitaire «catastrophique»
Le soutien militaire des Etats voisins (Niger, Cameroun, Tchad) et l’élection de Muhammadu Buhari à la présidence, fin mars 2015, ont amélioré la sécurité à Maiduguri, mais la situation sanitaire dans la région est «catastrophique», selon Médecins sans frontières.

Les djihadistes, estimés à 7 000 d’après la CIA, se sont notamment déplacés à Diffa, une ville au sud-est du Niger. «On ne peut pas comprendre la violence de Boko Haram si on méconnaît celle que l’armée a exercée pour le combattre dans l’Etat de Borno. Les militaires représentent autant une cause du problème qu’une solution. On leur attribue près de la moitié des 32 000 morts de civils recensées depuis le début du conflit», assure Xavier Muntz, dont le documentaire ne donne pas la parole aux membres de la secte, qu’ils soient d’anciens combattants en détention ou des repentis.

Il faut dire que les conditions de tournage ont été rudes. «Il y a toujours du danger à travailler dans la région, assure Xavier Muntz. L’armée a constamment cherché à entraver mon travail. J’ai attendu mon visa de journaliste pendant neuf mois.»



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Pour le Cameroun, «les déclarations d’Abubakar Shekau n’engagent que lui»

Le ministre de la Défense estime que l’armée camerounaise ne va pas se «laisser divertir» par la vidéo relayée jeudi dernier dans laquelle le chef de Boko Haram dit son mouvement vaincu

Diversion. C’est le terme employé par le ministre délégué à la présidence chargé de la Défense, Joseph Beti Assomo, ce lundi, pour qualifier le contenu d’une vidéo relayée jeudi dernier par de nombreux médias, et attribuée au chef de BokoHaram. Dans cette vidéo, la personne présentée comme étant Abubakar Shekau demande à ses combattants de déposer les armes et de dire au revoir à leur Etat islamique illusoire.

«Nous n’y accordons aucune espèce d’importance. Nous n’allons pas nous laisser divertir par des déclarations non authentifiées de M. Shekau Abubakar. Dans tous les cas, même si l’authenticité de cette vidéo était établie, en ce qui nous concerne, nous ne pouvons pas nous laisser endormir par une telle déclaration. Donc les opérations militaires sont en cours; nos forces de défense sont déterminées à mener ces combats jusqu’à leur terme. Et d’ailleurs, aujourd’hui, le mouvement est qualifié de nébuleuse, quelle est sa tête? Y’en a-t-il une seule ou plusieurs? Vous et moi, nous ne pouvons répondre à cette question. Les déclarations d’Abubakar Shekau n’engagent que lui. La guerre se poursuit», a déclaré le ministre camerounais de la Défense ce 28 mars, au cours du journal de la mi-journée sur la radio publique nationale.

La récente vidéo attribuée au chef de Boko Haram apparaît dans un contexte où les armées du Nigéria et du Cameroun disent enregistrer des résultats concrets sur le terrain dans la lutte contre le groupe terroriste.

Vigilance à Yaoundé
Boko Haram procède cependant à des attentats kamikazes. Au Cameroun, seule la région de l’Extrême-Nord, qui partage des frontières avec le nord-est du Nigéria, a déjà été victime de ces actes.

Au cours de l’interview diffusée sur la CRTV ce lundi, il a été demandé au Mindef si Yaoundé, la capitale politique, vivait sous une menace terroriste, au vu du relèvement du niveau de vigilance dans la ville à travers l’intensification, ces dernières semaines, des contrôles des forces de sécurité. La mesure a été présentée par certains médias comme une alerte aux attentats dans la capitale.

Il s’agissait de «mesures internes de vigilance que nous avions prescrites à nos collaborateurs», a expliqué Joseph Beti Assomo. «Malheureusement, l’un de nos collaborateurs, déjà identifié d’ailleurs, et ayant déjà été frappé des sanctions les plus lourdes, s’est permis de se livrer à cette fuite d’informations en toute irresponsabilité. Cet officier, capitaine de son état, a été formellement identifié le jour même où cette malheureuse fuite a eu lieu. Dans la période actuelle, il est normal que les hautes autorités de la République puissent prendre des mesures préventives et c’est ce que nous avons fait.»

«Je rassure ici les populations de la capitale, toutes les forces vices, nos partenaires, amis, corps diplomatiques et autres en leur disant qu’il n’y a pas matière à psychose ou à panique. L’Etat doit prendre toutes les mesures qui s’imposent par rapport au contexte sécuritaire actuel. C’est de cela qu’il s’agit. Vous comprenez donc qu’on ne peut dormir actuellement que sur une oreille et être particulièrement vigilant», a relevé le Mindef.

Joseph Beti Assomo, ministre camerounais de la Défense
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Abubakar Shekau menace de nouveau les pays de la sous région

Le chef de Boko Haram a promis, dans une nouvelle vidéo publiée lundi, la défaite de la force militaire régionale en formation. Boko Haram revendique aussi des liens avec l’Etat Islamique

Le chef de Boko Haram, Abubakar Shekau, a promis, dans une nouvelle vidéo publiée lundi, la défaite de la force militaire régionale qui combat le groupe islamiste dans le nord-est du Nigeria, au Niger et au Cameroun.

Votre alliance ne mènera à rien. Rassemblez toutes vos armes et affrontez-nous. Vous êtes les bienvenus, a-t-il déclaré dans une vidéo de 28 minutes publiée avec deux autres vidéos sur le site Youtube.

Des troupes tchadiennes, camerounaises et nigériennes prêtent main-forte à l’armée nigériane depuis plusieurs jours contre le groupe islamiste, dont l’insurrection menace d’embraser les pays voisins.

Une des autres vidéos montre des images du chef de l’organisation Etat Islamique (EI), Abou Baqr al-Baghdadi, ainsi que des images d’archives avec une voix off qui fait référence au puissant califat de Sokoto, établi au XIXe siècle dans une région couvrant le nord de l’actuel Nigeria et démantelé en 1903 par le colonisateur britannique.

Nous allons combattre le monde entier en appliquant le principe: quiconque désobéit à Allah et au Prophète doit soit se soumettre, soit mourir ou être réduit en esclavage, proclame Shekau.

Shekau avait déjà mentionné al-Baghdadi par le passé, mais cette fois-ci, il semble vouloir inscrire Boko Haram dans un contexte jihadiste plus global.

Boko Haram, qui a attaqué de nombreuses fois le nord du Cameroun, a également mené depuis vendredi trois opérations d’envergure dans des villes du sud-est du Niger.

Dans son discours de 28 minutes, dans lequel il parle tour à tour en arabe puis en haoussa (la langue la plus parlée dans le nord du Nigeria), Shekau se moque de la force de 8.700 soldats du Nigeria, du Niger, du Tchad, du Cameroun et du Bénin qui doit être envoyée dans le nord-est du Nigeria pour combattre Boko Haram.

Vous envoyez 7.000 soldats « Pourquoi vous n’en envoyez pas 70 millions » Ce n’est pas beaucoup. Seulement 7.000? Par Allah, c’est peu. Nous allons les capturer un à un, raille-t-il en arabe.

Il s’en prend aussi directement à Idriss Deby Itno, le président tchadien, dont les soldats mènent actuellement une vaste offensive contre les positions islamistes en territoire nigérian.

Selon Washington, Boko Haram compterait 4.000 à 6.000 hommes, mais le groupe est très bien équipé, après plusieurs attaques contre des bases militaires nigérianes.

Abubakar Shekau dans l’une de ses vidéos
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La déclaration de guerre de Boko Haram au Cameroun serait lié au décès de proches de Shekau

« Il semblerait que beaucoup de ses proches sont morts dans les tirs d’obus le 31 décembre », suppose une source militaire

La déclaration de guerre au Cameroun du leader de la secte islamiste nigériane Boko Haram, Abubakar Shekau, dans une vidéo récemment diffusée sur Internet, serait due à la mort de plusieurs de ses proches dans une opération de l’armée camerounaise après l’attaque contre Achigachia, localité du nord du Cameroun, fin décembre 2014, a déclaré samedi à Xinhua une source militaire.

« D’après nos informations, il semblerait que beaucoup de ses proches sont morts dans les tirs d’obus le 31 décembre », a affirmé cette source dans une allusion à une opération des forces de défense et de sécurité camerounaises comportant des raids de l’ aviation après l’occupation de la localité d’Achigashia, frontalière du Nigeria, par Boko Haram suite à une attaque violente le 28 décembre.

Dans son message diffusé à travers une vidéo postée sur YouTube le 5 janvier, Abubakar Shekau, de mère originaire de Maroua, la principale ville de la région de l’Extrême-Nord au Cameroun, elle- même principale cible des attaques de son organisation terroriste sur le sol camerounais, a promis de s’en prendre par ses actes d’une rare violence au Cameroun,après le Nigeria.

Depuis que le Cameroun fait face à l’insécurité dans sa partie septentrionale avec une série de prises d’otages en 2013 et répétées en 2014, des actes attribués à Boko Haram, c’est la première sortie médiatique officielle de son leader en direction de ce pays voisin du Nigeria. En 2014, l’armée camerounaise a été obligée plusieurs fois à repousser les assauts de son groupe armé.

Les autorités camerounaises, qui prennent cette menace au sérieux, ont décidé d’accroître le niveau d’alerte sécuritaire et de renforcer le dispositif opérationnel mis en place pour la sécurisation des zones touchées par les violences, surtout après l’ attaque d’un camp militaire dans le nord-est du Nigeria, où Boko Haram s’est emparée d’engins de combat,d’après la source militaire contactée par Xinhua.

En plus de l’envoi de nouveaux renforts, ce dispositif, a ajouté cette source, a reçu samedi un nouvel armement lourd pour son offensive contre les combattants islamistes.

Dans son message de voeux de Nouvel An au peuple camerounais le 31 décembre, le président Paul Biya avait déjà appelé ces jihadistes à « prendre la mesure des lourdes pertes » infligées par l’armée camerounaise.

Le chef de Boko Haram, Abubakar Shekau
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Le chef de Boko Haram adresse des menaces directes au Cameroun

Dans une vidéo publiée sur Internet, Abubakar Shekau demande à Paul Biya de mettre fin à la répression de ses hommes sous le risque de faire subir au Cameroun le même sort que le Nigéria

La menace Boko-Haram monte d’un cran. Dans une vidéo postée sur Youtube le 05 janvier 2015, le chef de la secte, Abubakar Shekau, plusieurs fois annoncé mort mais toujours actif, menace de mener des attaques au Cameroun de même ampleur que ceux menés au Nigéria si ses hommes continuent d’être harcelés.

«Paul Biya, si tu ne mets pas fin à ton plan maléfique, tu vas avoir droit au même sort que le Nigeria (…) Tes soldats ne peuvent rien contre nous », a déclaré Abubakar Shekau en langue arabe dans une vidéo d’environ 17 minutes, traduite en français par l’AFP et également consultée par Journalducameroun.com

C’est la première fois que la secte qui contrôle une partie du Nord-Est du Nigéria, frontalier avec la région de l’Extrême-Nord du Cameroun, adresse des menaces aussi directes envers le Cameroun.

Le groupe terroriste contrôle une vingtaine de localités au nord-est du Nigéria et a déjà causé la mort d’au moins 13.000 personnes en cinq ans.

La guerre
L’engagement du Cameroun pour éradiquer les actions de Boko-Haram sur son territoire, a porté un coup dur à la secte notamment en ce qui concerne son ravitaillement. Les forces de défense et de sécurité ont déjà démantelé de nombreuses caches d’armes et mis aux arrêts plusieurs complices présumés de la secte, à l’instar de l’arrestation, le 29 décembre de 13 chefs traditionnels.

Le Cameroun est résolument entré en guerre contre le groupe terroriste le 17 mai 2014, après des accusations répétées venues du Nigéria voisin et qui sous-entendaient que le pays constituait une base arrière pour la secte.

Boko-Haram, qui se limitait autrefois à des enlèvements sporadiques d’expatriés, attaque désormais de front les militaires camerounais et la population à l’arme blanche et lourde. Le phénomène est pour le moment concentré dans certains départements de l’Extrême-Nord, frontaliers avec le Nigéria voisin. Plus de 6000 militaires sont déployés dans la région, d’après des chiffres du ministère de la Défense, communiqués à l’Assemblée nationale en novembre.

Plus d’un millier de membres de Boko-Haram auraient déjà été tués par l’armée au cours de combats. La secte procède désormais par des incursions surprises envers les hommes en tenue, la pose des mines, et même les attaques contre des populations civiles. En fin d’année 2014, une quinzaine de voyageurs ont été égorgés sur l’axe Mora-Waza.

Le chef de l’Etat camerounais a dit, dans son discours de fin d’année à la Nation camerounaise, prononcé le 31 décembre 2014, toute sa détermination à éradiquer Boko Haram. «Nous avons donc mis en place un dispositif de riposte et de prévention qui a rapidement fait ses preuves. A chacune de ses tentatives, Boko Haram essuie désormais de lourdes pertes en vies humaines et en matériels. On peut espérer qu’ils en tireront des leçons», s’est félicité Paul Biya.

Les menaces explicites de Abubakar Shekau doivent néanmoins amener le Cameroun à redoubler de vigilance. Le week-end dernier, Boko Haram s’est emparé d’une base militaire importante dans l’extrême nord-est du Nigeria, sur les rives du lac Tchad, prenant ainsi le contrôle de frontières avec le Tchad, le Niger et le Cameroun.

Capture d’écran de la vidéo postée sur Youtube le 05 janvier et dans laquelle on voit Abubakar Shekau (centre), brandissant des menaces contre le Cameroun
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La Boko Haram connection au Cameroun

Un document légué par un pion de Boko Haram en terre camerounaise vient lever un pan de voile sur les hommes, l’origine des fonds de la secte. Décryptage d’une déposition posthume

Il aurait été difficile de trouver une meilleure occasion pour assassiner un dissident de Boko Haram basé au Cameroun. Le vendredi 16 mai 2014, Maroua, la capitale régionale de l’Extrême†Nord, accueillait des centaines d’invités à la cérémonie d’ordination du nouvel évêque du diocèse de Maroua†Mokolo. Un anonymat parfait pour le (s) tueur (s), noyé (s) au milieu du flot de personnes arrivées de partout, en groupe ou seules. Sur le site du sacre de Mgr Bruno Ateba, tout s’était bien terminé. En revanche, ailleurs dans la ville, quelqu’un avait été frappé avec une précision mortelle. Ce soir†là à Barmari (quartier qui talonne
le centre†ville de Maroua), Aladji Garé tombait sous trois balles dans la tête. à l’entrée de son domicile. Devant sa copine. tétanisée. Des témoignages concordants des voisins, on obtiendra que: «trois hommes sveltes, cagoulés, sont venus à bord d’une moto vers 19 heures et l’ont abattu. L’un d’eux a ensuite dit en Haussa: va dire tout à Allah, traitre. Et la moto a démarré». Selon la copine du défunt, Aladji Garé avait répondu nerveusement à un appel téléphonique en Haussa dans un premier temps, puis en arabe, quelques minutes seulement avant d’être froidement abattu. Cet assassinat, que l’on peut qualifier d’extrêmement habile et impitoyable, a aussitôt déclenché une vaste enquête policière. Lors des perquisitions dans la modeste demeure du défunt, la police a découvert des composants nécessaires à la fabrication d’un explosif liquide extrêmement volatile, «le HMTD». Dans une pièce se trouvaient aussi des documents relatifs au djihad, des reçus de transferts d’argent en provenance du Nigéria et du Qatar. Les enquêteurs ont également mis la main sur une clé Usb. Y était consigné un texte écrit en arabe regorgeant des révélations sur la secte Boko Haram. On a pu y retrouver aussi des renseignements sur les horaires de vols au départ de Doha, la capitale qatarie, à destination du Nigéria via la Libye et des hôtels disponibles. On fait également mention de tracts annonçant une attaque à la prison centrale de Maroua. Selon la police camerounaise, Garé était originaire de Banki, dans le canton Momoro, arrondissement de Bogo, à la frontière du Nigéria. A Maroua, on l’appelait Shahid (martyr). A Kousséri, il se cachait derrière le pseudonyme de Bilal (appel à la prière).

Accointances
De Aladji Garé, on dit dans son quartier qu’il ne décolérait pas souvent, et jamais bien longtemps. Sauf quand il parlait de ses parents qu’il a perdus à l’âge de 10 ans. Pourtant, quelques jours avant son assassinat, la colère est revenue. Une belle colère de fond. Pas aveugle, mais au contraire bien lucide, solidement documentée et parfaitement maîtrisée, braquée de bout en bout contre ses patrons de Boko Haram. Aladji Garé n’avait pas digéré le gel de ses «honoraires» par Aladji Abdallah au lendemain de l’attaque de la brigade de gendarmerie de Kousséri dans la nuit du 04 au 05mai 2014. Et il menaçait de vendre la mèche d’abord à la presse (notamment au journal nigérian «The Punch’s» avec lequel il avait amorcé des contacts eu égard au listing de ses appels téléphoniques) et ensuite aux services de renseignements camerounais. Selon les déclarations de sa copine aux arrêts à Maroua, il était reproché au défunt d’avoir éconduit un homme de main du réseau Boko Haram, l’adjudant†chef Dapsia Denis. Lequel a trouvé la mort au cours de l’attaque sus†évoquée. Aladji Abdallah, un Camerounais, est présenté comme importateur de véhicules d’occasion du Qatar. Au-delà, c’est l’homme-orchestre entre les membres de la secte Boko Haram disséminés au Cameroun et la base nigériane. Il est aussi celui†là même qui était aux avant-postes (avec le lamido d’Achigachia, extrême nord du Cameroun) lors des négociations entre les ravisseurs de la famille Moulin Fournier et ceux du père Vandenbeusch et les autorités camerounaises.

Message musclé
Selon une source proche de l’enquête, le texte écrit par A. Garé est un message d’assaut. «Si vous ne donnez pas l’argent là, je dis tout.». L’homme avait déjà entamé son «grand déballage» et consigné tout dans une clé Usb. A. Garé connaissait personnellement, une grande partie du monde de la secte nigériane. Il comprenait parfaitement les moteurs des attaques (espions, experts en tout genre ainsi que les amis, épouses et maîtresses de chefs de guerre). De sources policières, on apprend que Aladji Garé a tiré habilement parti d’un procédé consistant à centrer son texte autour de la vie et des caractères de trois individus très différents. Il a commencé par Abubakar Shekau, le gourou de Boko Haram. «C’est quelqu’un qui ne sert pas Allah» avait†il écrit. Ainsi, ce qui avait été simplement affirmé par certains est dit de manière convaincante: Abubakar Shekau est un génie solitaire qui perturbe l’Islam. Suffisant pour comprendre pourquoi il attire dans son organisation une génération de jeunes sous†scolarisés qui cherchent un sens à leur existence. Non seulement Abubakar Shekau a formulé une sombre théorie de guerre contre les chrétiens du sud Nigéria, il est aussi le chef d’un mouvement qui en veut au pouvoir actuel d’Abuja. Dans le texte de A. Garé aussi, figurent deux personnages: Mohamed Ijokepewu et Hoda Waobi. Le premier, relève†t†on, est un médecin issu d’une famille de notables nigérians ayant «une vision particulière» de l’alternance au sommet de l’Etat nigérian. Le second quant à lui, est un jeune malien qui collecte les fonds auprès de quelques dignitaires répertoriés dans la sphère militaro-politique du Nigéria. C’est également lui qui recrute les combattants. Ce sont ces individus qui forment le noyau dur de Boko Haram. Le texte exploité par la police apporte également de nouvelles informations, notamment sur la taille et la santé d’ Abubakar Shekau. Selon A. Garé, le chef de Boko Haram tient sur 1,70m environ et souffre d’une hypotension artérielle. De plus, un voile de secret recouvre le clan Shekau. Toutefois, on apprend que plusieurs membres de sa famille sortent peu à peu de l’ombre dans ce qui paraît être une volonté de les préparer à un «rôle». L’un d’eux, Allouf Ben (surnom) est le patron d’un espace converti en centre opérationnel ouvert en 2010 pour former ou recycler les combattants (jeunes nigérians et ex†rebelles maliens). Son boulot est d’élaborer les plans d’attaques et kidnappings en coordination avec les chefs.

Au Cameroun
Au regard des écrits de Aladji Garé, au Cameroun, «chacun a son rôle» pour égarer les services de renseignements. Pour éviter les fuites d’informations, Boko Haram insiste sur la non utilisation du téléphone. Sont privilégiés, les têtes à têtes entre les membres basés au Cameroun. Les rencontres ont généralement lieu dans des zones où l’autorité matérielle et morale de l’Etat est au plus bas. Des indications glanées auprès de la copine de Aladji Garé font savoir que celui†ci s’était rendu à Kousséri deux jours avant l’attaque du 16 mai 2014. «Je vais voir des amis mais je vais dormir à Oualiia» (l’un des premiers quartiers de Ndjaména au Tchad, à partir du Cameroun, Ndlr), avait†il confié. Ainsi, aidés par le flou peu exigeant de l’identité camerounaise, le groupe circule librement et avec la complicité de certaines autorités. C’est, de manière flagrante, ce qu’a révélé l’attaque de la brigade de gendarmerie de Kousséri. Dès lors, on se trompe en croyant que certains citoyens «au†dessus de tout soupçon» ne peuvent pas prendre part †activement ou passivement†à une incursion de Boko Haram en terre camerounaise. Dans les quartiers populaires de Maroua et de Kousséri par exemple, le texte de A. Garé met à nu la présence incontestable de la secte nigériane. Là-bas, le disparu avait révélé que «ces gens sont parmi nous, sillonnant les marchés et s’assurant
le contrôle des coins louches».

Aladji Garé, de son vivant était une pièce du puzzle Boko Haram dans le grand Nord Cameroun
Journal Intégration)/n

Boko Haram continue de donner des sueurs froides au Nigéria

Trois jours après un sommet tenu à Paris pour vaincre la menace islamiste au Nigéria, le centre du pays a été frappé par un attentat qui a fait au moins 118 morts

Les opérations de secours se poursuivaient au Nigeria mercredi, au lendemain d’un double attentat à Jos (centre) qui a fait au moins 118 morts, déstabilisant un peu plus le gouvernement malgré la mobilisation internationale contre Boko Haram. Selon Mohammed Abdulsalam, le coordinateur de l’Agence nationale de gestion des crises, le bilan pourrait s’aggraver car les secouristes vont sans doute retrouver « plus de cadavres dans les décombres » dus aux explosions. Le double attentat à la voiture piégée, qui a également fait 56 blessés, n’avait toujours pas été revendiqué mercredi, mais les soupçons se tournent vers le groupe islamiste armé Boko Haram, que le gouvernement dit lié à Al-Qaïda.

Mode opératoire de Boko Haram
Le mode opératoire du carnage de Jos rappelle celui souvent employé par l’internationale jihadiste: d’abord l’explosion d’un camion piégé au milieu de l’après-midi sur un marché de cette ville d’un million d’habitants, puis l’explosion d’un deuxième véhicule alors que les habitants et les secouristes ont déjà accouru pour aider les victimes.

Ce nouvel attentat ravive la crainte de violences interreligieuses, avec leur cycle infernal de représailles qui ont déjà ensanglanté l’Etat du Plateau et sa capitale Jos par le passé. Cet Etat est situé à la charnière entre le sud chrétien et le nord majoritairement musulman du Nigeria. Boko Haram a revendiqué une série d’attaques spectaculaires depuis un mois et demi. Le 14 avril, un attentat à la voiture piégée contre une gare routière dans un quartier populaire d’Abuja fait 75 morts. Le 1er mai, une semaine avant l’ouverture d’un forum économique international dans la capitale fédérale, un attentat similaire, au même endroit, fait 19 morts.

Le 5 mai, des hommes armés rasent la ville de Gamboru Ngala, près de la frontière camerounaise, tuant plus de 300 personnes. Et le 18 mai, quatre personnes périssent dans une attaque-suicide à Kano, la grande ville du Nord musulman. A ces attaques s’ajoutent l’enlèvement de plus de 200 lycéennes à Chibok, une petite ville du Nord-Est, revendiqué dans une vidéo par Abubakar Shekau, le chef de Boko Haram, qui a scandalisé l’opinion publique mondiale et entraîné une mobilisation internationale.

Action militaire insuffisante
Après l’attentat de Jos, le président nigérian Goodluck Jonathan, largement critiqué pour son inaction et son incapacité à faire cesser les violences, a réitéré son engagement à « gagner la guerre contre le terrorisme ». Le Parlement nigérian a validé mardi la prolongation de l’état d’urgence en vigueur dans trois Etats du Nord-Est, demandée par M. Jonathan. Mais cette mesure d’exception déjà en vigueur depuis mai 2013, accompagnée d’une vaste offensive militaire, n’a jamais pas permis d’enrayer les violences de Boko Haram. Les attaques se sont au contraire multipliées, visant de plus en plus les civils.

Les forces de sécurité nigérianes apparaissent dans les faits incapables de prévenir les attaques, Boko Haram frappant désormais aussi bien dans les Etats du nord-est du Nigeria, ses fiefs, que dans le Centre ou le Nord. Le Sud chrétien n’a pas encore été touché, mais le groupe islamiste a menacé de s’attaquer aux intérêts pétroliers dans le delta du Niger, stratégiques pour la première économie d’Afrique. Plusieurs pays occidentaux, Etats-Unis en tête, ont dépêché des experts, des avions-espions et des drones pour aider le Nigeria à retrouver les lycéennes kidnappées et à tenter de neutraliser les islamistes. Un sommet organisé à Paris, qui a réuni samedi le Nigeria, ses voisins et ses soutiens occidentaux, a adopté un plan global de lutte contre Boko Haram, établissant une large coopération militaire.

Toutes ces mesures apparaissent pour l’instant sans effet, les experts soulignant depuis longtemps qu’une telle insurrection, menée par des islamiste au sein d’une population dont une partie les soutient, ne peut être arrêtée uniquement par des opérations militaires.

Attentat à la voiture piégée le 20 mai 2014 sur un marché de Jos.
AFP)/n

Nigeria: Boko Haram veut échanger les lycéennes contre des prisonniers

Le chef de Boko Haram a diffusé ce lundi une nouvelle vidéo

Abubakar Shekau parle pendant 17 minutes dans une vidéo obtenue par l’AFP, qui montre ensuite une centaine d’adolescentes portant un voile couvrant tout leur corps, en train de prier dans un lieu non-identifié. La diffusion de cette video intervient alors que la mobilisation internationale pour obtenir la libération des lycéennes enlevées s’amplifie, au moment où Israël se dit prêt à aider à les « localiser » et Paris à organiser un sommet africain, probablement samedi, sur le sujet. Des experts américains, britanniques et français sont déjà au Nigeria pour participer aux recherches. La Chine a aussi proposé de partager les informations recueillies par ses services de renseignements et ses satellites.

Le président nigérian Goodluck Jonathan, très critiqué pour son inaction dans les jours qui ont suivi l’enlèvement des lycéennes, a affirmé dimanche qu’il était « très optimiste » à propos de l’opération de recherche en cours, grâce à cet appui logistique de la communauté internationale. Les exactions de Chibok, qui pourraient « constituer des crimes contre l’humanité » selon le Conseil de sécurité de l’ONU, ont suscité des réactions de soutien de célébrités mondiales comme la première dame des Etats-Unis Michelle Obama et l’actrice américaine Angelina Jolie. Dernière grande personnalité à prononcer son soutien aux captives nigérianes, le pape François a appelé les fidèles à « prier pour la libération immédiate » des jeunes filles, via son compte Twitter samedi soir.

Au total, 276 lycéennes avaient été enlevées le 14 avril à Chibok, dans l’Etat de Borno (nord-est), qui abrite une communauté chrétienne importante. 223 d’entre elles sont toujours portées disparues.

Capture d’écran réalisée à partir de la video obtenue lundi 12 mai 2014 par l’AFP auprès du groupe islamiste extrêmiste Boko Haram
afp)/n

Les filles enlevées au Nigéria seront « vendues », selon Boko Haram

Le groupe islamiste armé a revendiqué l’enlèvement de plus de 200 lycéennes mi-avril dans le nord-est du Nigeria

Le groupe islamiste armé Boko Haram a revendiqué lundi l’enlèvement de plus de 200 lycéennes mi-avril dans le nord-est du Nigeria, qu’il veut « vendre » comme « esclaves » et « marier » de force. Beaucoup de ces jeunes filles « ont probablement été déplacées hors du pays, vers des pays voisins », a affirmé plus tard la porte parole de la diplomatie américaine Marie Harf. Par ailleurs, des dizaines de militants du Boko Haram, à bord de véhicules blindés, ont détruit la ville de Gamboru Ngala, dans le nord-est, à la frontière camerounaise, tirant sur les habitants qui ont fui au Cameroun voisin, selon des témoins. Certains habitants, qui n’ont pas eu le temps de fuir, ont été abattus.

« J’ai enlevé vos filles », déclare le chef du groupe extrémiste, Abubakar Shekau, dans une vidéo de 57 minutes obtenue par l’AFP. Il évoque les 276 lycéennes enlevées le 14 avril dans leur établissement scolaire de Chibok (nord-est), dans l’Etat de Borno, dont 223 sont toujours en captivité, 53 ayant réussi à s’enfuir, selon la police. « Je vais les vendre sur le marché, au nom d’Allah », poursuit Abubakar Shekau. « Allah dit que je dois les vendre, elles sont à Lui ». « J’ai dit que l’éducation occidentale devait cesser. (…) Les filles, vous devez quitter (l’école) et vous marier », exhorte-t-il, précisant que son groupe garde « des gens comme esclaves ». « Je vais épouser une fille de 12 ans, je vais épouser une fille de neuf ans », dit-il ensuite.

Dans cette nouvelle vidéo, Shekau est habillé en treillis militaire et se tient debout devant un véhicule de transport blindé et deux pick-up surmontés de mitrailleuses. Six hommes armés se tiennent à ses côtés, le visage dissimulé. L’image est floue, mais on aperçoit assez clairement le visage du chef islamiste, qui s’exprime en haoussa, en arabe et en anglais, quand la caméra zoome sur son visage. Pendant les 14 premières minutes de la vidéo, Shekau vilipende la démocratie, l’éducation occidentale et ceux qui ne croient pas en l’islam. Diverses sources de l’Etat de Borno ont évoqué le possible transfèrement des adolescentes au Tchad et au Cameroun voisins, où elles auraient été vendues pour 12 dollars chacune.

Vive émotion au Nigeria
Le groupe Boko Haram (« L’éducation occidentale est un péché ») en langue haoussa, revendique la création d’un Etat islamique dans le nord du Nigeria. Le groupe extrémiste a déjà fait plusieurs milliers de morts depuis le début de son insurrection en 2009, au cours d’attaques visant des écoles, des églises, des mosquées et des symboles de l’Etat et des forces de l’ordre. Mais cet enlèvement en masse d’adolescentes est sans précédent depuis la création de ce mouvement, dont les attaques ont déjà fait plus de 1.500 morts depuis le début de l’année. Le sort des jeunes filles et l’incapacité des autorités nigérianes à leur venir en aide ont suscité une très vive émotion dans le pays et à l’étranger.

Un groupe baptisé « Bring back our girls » (Ramenez nos filles) a organisé une série de manifestations dans tout le pays pour demander au gouvernement et à l’armée de faire plus d’efforts pour libérer les adolescentes. Naomi Mutah, une des meneuses de ce groupe, a été arrêtée dans la nuit de dimanche à lundi, après un entretien avec la première dame nigériane, Patience Jonathan, pour avoir prétendu à tort être la mère d’une des victimes. Elle a été libérée lundi en fin de journée.

Le président nigérian Goodluck Jonathan, qui a commenté cette attaque pour la première fois dimanche, a donné l’ordre de « tout faire » pour garantir la libération des lycéennes et a dit espérer l’aide des Etats-Unis pour résoudre les graves problèmes sécuritaires auxquels le pays est confronté. Le secrétaire d’Etat américain John Kerry avait promis samedi que les Etats-Unis feraient « tout ce qui est possible » pour aider le Nigeria dans cette affaire. la porte-parole de la diplomatie américaine, Marie Harf, a précisé lundi que les Etats-Unis fournissaient une assistance au Nigeria sous la forme de partage de renseignements.

Jusqu’à présent, les violences perpétrées par le groupe islamiste étaient concentrées dans le Nord-Est, son bastion historique. Mais les deux attentats qui ont frappé récemment la même gare routière en périphérie d’Abuja, à moins de trois semaines d’intervalle, faisant 90 morts, rappellent la menace sérieuse que fait planer Boko Haram sur le pays tout entier.

Avec quelque 170 millions d’habitants, le Nigeria, première pays producteur d’Afrique subsaharienne, est confronté à une violence structurelle, dans le nord musulman avec Boko Haram, le centre du pays avec des affrontements inter-communautaires, ainsi que dans le delta du fleuve niger (sud) où les communautés locales réclament une meilleure répartition des revenus du pétrole.

La vidéo de Boko Haram est diffusée à quelques jours de l’ouverture du « Forum économique pour l’Afrique », appelé le « Davos africain », à Abuja, la capitale fédérale, qui a été placée sous sécurité maximum.

Manifestation le 5 mai 2014 à Lagos pour la libération des lycéennes enlevées
AFP/ Pius Utomi Ekpei)/n