Port de Douala: La douane accorde une dérogation spéciale à deux entreprises

La Société anonyme des brasseries du Cameroun et ADER Cameroun vont désormais sortir leurs marchandises du port de Douala sans contrôle douanier

Onze entreprises concernées par les contrats opérateurs
Les deux entreprises sont les premières à tirer véritablement profit des contrats opérateurs mis sur pied par l’administration douanière en décembre 2010, à la suite des contrats de performance. «Malgré les résultats encourageants des contrats de performance avec les inspecteurs, le comportement de certains acteurs de la chaine de dédouanement peut être source de nuisance et diluer les effets bénéfiques de cette initiative. C’est pour cette raison que j’ai souhaité étendre l’expérience des contrats aux entreprises, celles-ci étant des donneurs d’ordre par excellence à certains intervenants sur lesquels elles ont un certain contrôle », explique Minette Libom Li Likeng, la directrice générale des douanes (DGD) et artisane de ce projet. La douane s’est proposée donc de commencer cette nouvelle aventure avec un échantillon limité d’entreprises remplissant certains critères objectifs tels que le volume d’activité, la régularité des opérations, la surface financière, la citoyenneté présumée et surtout la volonté de ces sociétés de servir de baromètre des délais de passage au port de Douala. Les 20 importateurs utilisés par le comité national de facilitation du trafic maritime international (Comité FAL) pour établir le baromètre du passage au port de Douala sont invités autour de la table par la DGD pour proposer le deal. Onze d’entre eux acceptent de négocier et de signer les contrats individuels avec l’administration douanière qui, en contrepartie, s’engage à accorder des facilités aux entreprises remplissant les conditions définies dans la feuille de route.

Facilités accordées par la douane
Ces facilités vont du bénéfice du circuit bleu pour les opérations impliquant un niveau symbolique des contrôles, jusqu’à l’attribution du crédit d’enlèvement au taux bonifié. «Le crédit enlèvement donne la possibilité à l’entreprise d’enlever sa marchandise et de venir payer après, avec bien sûr une garantie », explique Marcellin Djeuwo, le chef de la cellule de gestion des risques. Pour arriver à cette autre facilité, il faudra que l’entreprise soit déjà dans la barre de 80% de circuit bleu, le maximum accordé par la Dgd. La SABC et Ader Cameroun sont donc les deux entreprises qui ont parfaitement réalisé ces contrats qui les lient à l’administration douanière au trimestre. La première a exécuté ce contrat sans avoir raté un seul des six indicateurs sur lesquels sont assis les contrats. Pendant les trois mois, son taux de réalisation s’est situé à hauteur de 133,33%, ce qui lui permet de s’en tirer avec un taux trimestriel de 133,33%. Quant à la seconde, ses taux de réalisation pour les mois concernés sont de 116,7%, 127,7% et 122,2%, soit un taux trimestriel de 122,2%. Ces chiffres ont été divulgués ce vendredi 8 avril 2011 par le chef de la cellule des gestions des risques, au cours de l’évaluation trimestrielle des contrats de performance avec les inspecteurs et les entreprises. « Ces deux entreprises ont très bien rempli leurs contrats », a reconnu Marcellin Djeuwo. Et dans ce cas, les contrats stipulent que l’administration douanière, en contrepartie, doit accorder certaines facilités aux entreprises concernées.

Phase expérimentale de six mois
C’est ainsi que Minette Libom Li Likeng, la directrice générale des douanes, qui dirigeait cette cérémonie, a décidé d’augmenter le taux de circuit bleu de ces deux entreprises à 60%. « Cela veut simplement dire que la SABC et ADER vont désormais sortir leurs marchandises du port de Douala à la limite sans contrôle douanier », explique Marcellin Djeuwo. «Ces deux entreprises ont montré carte blanche, et bénéficient désormais de la haute confiance de l’administration douanière », ajoute-t-il. Ces contrats opérateurs feront l’objet d’une phase expérimentale de six mois allant de janvier à juin 2011. Cette phase va permettre à la douane d’évaluer les impacts positifs et négatifs des facilités accordées, d’adapter leur fonctionnement au suivi du respect des conditions par les importateurs bénéficiant des facilités et de résoudre les problèmes techniques ou informatiques qui pourraient éventuellement survenir à l’usage. « A la fin de la première phase, l’expérience pourrait s’étendre à d’autres entreprises qui le souhaitent et qui remplissent les conditions minimales exigées », promet Minette Libom Li Likeng. En dehors des contrats opérateurs, cette dernière a également fait le bilan trimestriel des contrats de performance par les inspecteurs. «Au niveau des contrats inspecteurs, la réduction des délais, l’amélioration de la rentabilité des déclarations, l’abandon des mauvaises pratiques, l’amélioration du temps mis au travail ont été obtenu dans les quatre bureaux sous contrat », commente la Dgd. On note, par exemple, que le temps de traitement des déclarations à Douala port I est passé de 11 heures environ en 2010 à 3h en 2011. Au niveau des recettes douanières, alors que le niveau d’activité n’a augmenté que de 17% entre le premier trimestre 2011 et le premier trimestre 2010, les recettes douanières se sont améliorées de 22%.

Avancées des contrats inspecteurs
« Nous avons également relevé que la rentabilité moyenne par déclaration s’est beaucoup appréciée pendant le premier trimestre 2011, par rapport à 2010. Ce qui a ramené au trésor public une somme supplémentaire de plus de 6,9 milliards de FCFA », souligne Marcellin Djeuwo dans son rapport. « Le montant des droits recouvrés par le service sur les dossiers déposés par les usagers et qui étaient susceptible d’être compromis par la fraude a sensiblement et régulièrement augmenté pour cumuler à près de 179 millions au cours de la période », ajoute-il. Les mêmes avancées sont enregistrées au niveau de la gouvernance. Ici, le taux des déclarations en circuit jaune liquidées, puis modifiées après liquidation par le même inspecteur a drastiquement diminué. «Il s’agit d’une man uvre par laquelle l’inspecteur s’attirait le maximum de dossiers, dans le but sans doute d’augmenter ses possibilités de contact avec les usagers ou pour augmenter ses chances de faire du contentieux facile », explique Marcellin Djeuwo. D’après lui, cette pratique a baissé de 87% en moyenne sur l’ensemble des quatre bureaux concernés par les contrats de performance. Dans le même ordre d’idées, la proportion de déclarations redressées parmi celles qui ont été reroutées du jaune au rouge s’est améliorée de 17% dans les quatre bureaux. Tout comme le temps mis au travail par les inspecteurs qui s’améliore de 14%. Fort de ces avancées, Minette Libom Li Likeng a décidé d’appliquer seulement les termes du contrat de performance qui, dans de pareils cas, obligent l’administration douanière à accorder des gratifications aux méritants. Ainsi, 25 inspecteurs de visite ont reçu ces gratifications des mains de la DGD. Soit, 5 au bureau hors classe Douala aéroport, 7 au bureau des transferts, 8 à Douala port I et 5 à Douala port V. Tous ces inspecteurs ont dépassé la barre de 100% exigée par la DGD.

Les Brasseries du Cameroun (et Ader) bénéficient de la dérogation douanière